Je vais bientôt savoir quel mort va m’habiter,
le cas échéant, pour me sauver la vie1.
L’étude2 de la génétique d’une œuvre est toujours une démarche complexe. Mais, chance ici, au sein des emboîtements dont il a le secret, Semprun et ses doubles narrateurs glissent souvent des indices sur le creuset de l’écriture et les « manigances de l’inconscient littéraire »3 : l’annonce du suicide de Primo Levi modifie l’écriture de Netchaïev est de retour4, la claustration à Madrid et les récits de Manuel, déporté à Mauthausen, font naître5 Le Grand Voyage6. La rencontre pragoise ressuscite donc le mort qu’il faut, silhouette évanescente et émouvante dans le linceul de son anonymat et la lumière de l’écriture. Tout le récit s’inscrit dans un espace-temps feuilleté, plié, déplié, enfin déployé. Le temps a fait son œuvre.
Le passage retenu7 est repris presque intégralement en quatrième de couverture et, l’ouvrage, dans sa représentation matérielle elle-même, peut être ainsi considéré comme un message directement adressé au lecteur. Sauf erreur ou omission, c’est le seul livre de Semprun utilisant ce procédé éditorial. On trouve bien des extraits pour la quatrième de Quel beau dimanche ou celle d’Exercices de survie, mais dans ces deux cas ils sont accompagnés d’un mot de l’éditeur. Faut-il y voir un sens particulier ? Comme Gérard Genette8 l’a montré, le texte n’arrive jamais seul chez le lecteur et les éléments qui l’entourent – jaquette, bandeau, prière d’insérer, préface, postface, introduction et autres appendices –forment un réseau de significations multiples. Le « péritexte »9 (car proche du texte) qu’est la quatrième est une invitation à la lecture après l’accroche du titre de la une. Une fois saisie, retournée, la proie est parfois emportée ! Ici, il s’agit plutôt d’un paratexte ou même, littéralement, du texte sorti tout droit de sa cage. Hasard ? Stratégie ?
Plusieurs points peuvent être notés. En 2001, Semprun est un auteur connu, une figure médiatique. Écrivain, scénariste, témoin, homme politique, membre de l’Académie Goncourt, nul besoin de le présenter. Le lecteur achète souvent pour l’auteur10. Avec son lectorat fidèle que Françoise Nicoladzé a étudié11, l’auteur s’adresse désormais directement à lui. Preuve sans doute que le message est d’importance. Et c’est bien le cas. En regardant le livre, une et quatrième de couverture, ouvertes, tel un papillon aux ailes déployées, aux couleurs rouge, noir et blanc, apparaît une magistrale condensation digne du travail du rêve : deux survivants présents (Jiri Zak et Jorge Semprun), un survivant évoqué (Walter Bartel), Résistance clandestine à Buchenwald (Le Mort qu’il faut – Rotfront – Le Grand Voyage). Ainsi, matrice de l’ouvrage Le Mort qu’il faut, la scène des retrouvailles de Zak et Semprun au printemps 196912 forme une des matriochkas mémorielles emblématiques de l’écrivain. Cette scène signe le retour d’un présent du passé jamais achevé : Buchenwald.
En 1969 Semprun a 46 ans. Il s’est trouvé en écrivant Le Grand voyage, s’est retrouvé en imaginant le gars de Semur, double malicieux et réconfortant, affrontant la mort du wagon. Le détenu 44 904 a pu approcher le camp grâce à de longs détours couleur d’oubli : vie amoureuse, politique, créative. Il a couru, couru, longtemps, avec brio, couru loin de Buchenwald et de ses dimanches enneigés à la beauté trompeuse. « Je ne veux pas devenir un ancien combattant […] je suis un futur combattant »13, affirme le narrateur du Grand Voyage. S’engager encore, résister toujours. Ce sera au Parti Communiste Espagnol encore clandestin. Puis, viendront l’exclusion, la littérature, le cinéma.
Le contexte de la rencontre de ces anciens de Buchenwald est très chargé émotionnellement. Plus tôt, en janvier, l’étudiant Jan Palach, 20 ans, s’immole par le feu sur la place Wenceslas pour protester contre l’écrasement du Printemps de Prague en août 1968 qui mit un coup d’arrêt aux réformes du « socialisme à visage humain » initiées par Alexander Dubček (1921-1992). Avril 1969, Costa-Gavras et Semprun sont arrivés pour le tournage de L’Aveu d’après le récit d’Artur London14, troisième film dont il est le scénariste15. Ils viennent d’achever Z16 qui raconte l’assassinat du député grec Grigóris Lambrákis en mai 1963 et la dictature des colonels. Costa-Gavras relate les circonstances entourant le tournage : « Il faut faire le film à tout prix, il est nécessaire… Ici, c’est fini. Prévenez London, dites-lui qu’il faut faire le film… »17 lui-dit Aloïs Poldnak, le directeur général du cinéma tchécoslovaque. Mais, impossible de tourner, la ville est occupée. Semprun raconte :
J’avais demandé à des cinéastes amis, qui ne s’étaient pas encore résignés à l’exil, de rechercher pour moi la trace de Jiri Zak. Ils l’avaient retrouvé […]. Ce fut dans un appartement dont les fenêtres s’ouvraient sur la place Wenceslas. Zak avait les cheveux gris mais son regard n’avait pas changé, sa démarche non plus. Une femme âgée, petite, visage de pomme ridée, l’accompagnait. C’était la veuve de Josef Frank, notre copain de Buchenwald, Pepikou18.
Dans le labyrinthe de la mémoire, le fil d’Ariane est rouge. Le livre messager rappelle la permanence de l’idéal : Rotfront ! Le procès Slansky et la réparation.
Le Mort qu’il faut, paru en 2001, illustre à travers l’épisode d’une tentative de substitution d’identité une des périlleuses activités de la Résistance clandestine au camp de concentration de Buchenwald près de Weimar en Thuringe. La gestation a été longue, Semprun y travaillait déjà en 1975 comme nous l’indique une lettre adressée à Zak :
Jetz bin ich aber in den letzten Wochen einer Arbeit (Roman, und Erinnerung, und Essay, alles in einem) wo ich über die Buchenwald-Zeit und Erfahrung zurückkomme. Hier wird unsere letzte Begegnung in Prag, im Frühling 1969, mit Frau Frankova, auch beschrieben. Ich hoffe dass Du dieses Buch bald lesen kannst19.
Maintenant, depuis ces dernières semaines, je travaille à un (roman, souvenirs et essai, tout cela en même temps) dans lequel je reviens sur l’époque et l’expérience de Buchenwald. Là je raconte les choses telles que je les connais maintenant. J’y décrirai aussi notre dernière rencontre à Prague, au printemps 1969 avec Madame Frankova. J’espère que tu pourras bientôt lire ce livre.
La rencontre des copains de Buchenwald permet d’évoquer des périodes cruciales de l’histoire du communisme :
Alors, dans le brouhaha de la boîte de jazz, dans la fumée des cigarettes, nous avions levé nos verres et trinqué à la santé de Walter Bartel.
Rotfront ! s’était écrié Jiri Zak.
Et je lui avais répondu :
— Rotfront ! C’était le salut des communistes allemands, autrefois, à l’époque sectaire et exaltante, misérable et glorieuse, de la lutte finale et du mot d’ordre apocalyptique : classe contre classe !20
L’hommage au survivant Walter Bartel (dont nous reparlerons) signe la fidélité à l’engagement politique explique le narrateur pédagogue :
À une table voisine, une très jeune femme, très blonde et très belle, nous avait jeté des regards indignés. Elle avait interpellé Jiri Zak. Celui-ci lui avait répondu, de sa voix calme et lente, posée, pédagogique, sa voix de militant, de survivant de Buchenwald. Il avait dû lui expliquer les raisons, ironiques et émues, de notre « front rouge ». Alors, elle avait levé son verre et trinqué avec nous. Très belle, vraiment21.
« Front rouge ! C’était le salut des communistes allemands […] »22. Ce salut est né sous la République de Weimar en réponse aux actions paramilitaires des partis de droite et nazi. Selon Philippe Burrin, pendant cette période chaotique émaillée de nombreux coups de force :
Les groupements de la droite nationaliste affirmaient dans leurs organisations uniformées et militarisées la continuité avec l’Empire et avec une guerre qu’ils refusaient de tenir pour perdue ; ce faisant, ils prétendaient appliquer à la société civile le moule militaire. Les nazis portaient à extrême cette tendance […]. Confrontés à cette nouvelle pratique politique, avec les risques de prise de pouvoir qu’elle impliquait et les affrontements qu’elle comportait, les partis de gauche réagirent en s’alignant sur l’exemple de leurs adversaires […]23.
Avec le serment prêté au Drapeau et le cri Rotfront, le salut – « poing fermé, la paume de la main tournée en avant, l’avant-bras-tendu »24, levé à hauteur de la tête –, est devenu, grâce au dessin de John Heartfield25, un emblème du RFB (Rote Frontkämpfer Bund) créé par le Parti communiste allemand (KPD)26. Pour les communistes, écrit Philippe Burrin, ce front des combattants n’était pas seulement une structure d’auto-défense, mais «le noyau de la future armée rouge allemande »27. Interdit après « le mai sanglant »28 en 1929, l’activité du RFB se poursuivit illégalement.
L’explication donnée à la jeune femme réprobative et ignorante est une façon de rappeler le cœur de l’engagement politique des protagonistes qui les a conduits à Buchenwald où ils ont continué leur lutte. Un cœur rouge qui bat encore, envers et contre tout, car Zak comme Semprun (et tant d’autres) lui doivent la vie.
Fidèle à ce mot d’ordre, les militants communistes et antifascistes ont donc poursuivi le combat clandestin dans les prisons et camps où ils furent internés. Créé en 193729, destiné à la rééducation politique, le camp de concentration de Buchenwald accueillit opposants politiques, détenus de droit de commun, citoyens juifs après le pogrom de novembre 1938, dit « nuit de cristal », personnes considérées comme asociales, et, à la fin de la guerre, les détenus d’Auschwitz et des camps de l’Est, dont de nombreux enfants30, évacués dans des conditions dramatiques. Cette société carcérale très hiérarchisée est régie par une discipline de fer. Les détenus sont, dès leur arrivée, repérés, interrogés sur leur parcours de résistant et formés. Semprun, qui parle espagnol, français et allemand, est affecté à l’Arbeitsstatistik où on tient le décompte des vivants et des morts pour le calcul des rations alimentaires et les affectations aux kommandos de travail.
Ne pouvant assumer la totalité de la gestion du camp, l’administration SS délègue des fonctions aux détenus. Les politiques, rouges, prirent le pouvoir sur les droit commun, verts31. Ce changement de gouvernance, obtenu au prix de luttes terribles, a rendu possible la formation de comités de résistance nationaux qui se fédéreront ensuite en instance internationale. Leurs objectifs : améliorer les conditions de détention, sauver des détenus, saboter la production des usines d’armement affiliées au camp, préparer la libération et l’après-guerre.
L’action qui nous intéresse est celle de la falsification des listes de transports par le service de l’Arbeitsstatistik où travaillait Semprun en liaison avec la Polititscheabteilung où était Zak.
Il arrivait que Hammann32, raconte Jiri Zak, annonce au département politique que le prisonnier qu’il réclamait venait de mourir. Cette soi-disant mort sauvait la vie du détenu réclamé, et ce ne fut pas un cas unique33.
Cela restait périlleux et pas toujours possible, Robert Desnos ne put être sauvé malgré les démarches entreprises par Julien Caïn (1887-1974) ainsi que le raconte Daniel Anker de l’Arbeitsstatistik : « Il [Julien Cain] a essayé, je me souviens, c’est moi-même qu’il a contacté. Malheureusement, il n’y avait rien à faire. Il a été désigné et on ne pouvait pas l’enlever »34. On retrouve des éléments identiques dans le récit de Stéphane Hessel pour lequel l’organisation clandestine du camp a aussi cherché le mort qu’il faut, ainsi que pour Harry Penlevé et Yves Thomas (Dodkin). Stéphane Hessel écrit :
Il est convenu que nous prendrons l’identité des trois premiers qui mourront […]. Si la tour nous appelle pour être pendus, nous serons « morts du typhus » […]. La vie de Boitel signifiait ma mort. Sa mort qui intervint le jour de mon vingt-septième anniversaire, signifia ma vie […]. Le 2 novembre, sous le nom de Michel Boitel35, je suis transféré au camp de Rohleberode36.
Il faut donc absolument avoir le mort qu’il faut :
J’avais de la chance, en tout cas, inutile de le nier. Mais je n’apporterai pas les preuves tout de suite, ça nous détournerait du propos principal, qui est de raconter comment ils avaient trouvé le mort qu’il faut. Et à quoi ça sert, le mort qu’il faut, pourquoi ça tombe si bien, aujourd’hui37.
La famille Semprun, réfugiée en France, s’inquiète d’être toujours sans nouvelles de Jorge. José María Semprún fait jouer ses relations. Une demande de renseignements arrive à Buchenwald par l’intermédiaire de José Félix de Lequerica (1891-1963), ambassadeur de Franco à Paris. Pour éviter toute enquête, on doit exfiltrer Semprun, le faire disparaître sous un autre nom, avoir le mort qu’il faut pour cela. Tout ceci paraît suspect aux vétérans communistes, Semprun est convoqué. Interrogé38 par Walter Bartel et Ernst Busse, il doit s’expliquer, impossible d’avoir un éventuel mouchard à l’Arbeitsstatistik : « Qu’un ambassadeur fasciste s’inquiète de la santé d’un militant communiste, ça ne t’étonne pas ? », lui demande Bartel39. Semprun parvient à les convaincre de sa loyauté et il est renvoyé à « la vie du camp » sur ce commentaire de Walter Bartel :
— Dire qu’on a pris des risques pour te protéger ! On avait même trouvé le mort qu’il fallait… et tout ça pour rien ! À cause d’une demande de l’ambassadeur de Franco à Paris adressée à von Ribbentrop !40
L’action pour le sauver menée par les anciens de Buchenwald restera à jamais gravée comme la preuve de l’existence de la fraternité. Mais les torrents de l’Histoire suivent leur propre chemin, les héros d’un moment peuvent être broyés. Le procès Slansky en est un exemple tragique.
On verra que les activités des détenus communistes dans l’univers concentrationnaire vont, après l’euphorie de la Libération, se retourner rapidement contre eux. Karel Kaplan rappelle que la longue liste des procès politiques en Tchécoslovaquie s’organise en deux vagues. La première a touché, dès février 1948, Jan Ursiny (1896-1972), leader du Parti démocrate slovaque, de nombreux députés, militaires et personnalités non-communistes41. La seconde convoqua au banc des accusés des dirigeants du Parti communiste tchèque (PCT).
Pour donner une idée du climat suspicieux régnant, à l’Est comme à l’Ouest, notons qu’en France, le 7 septembre 1950, dans le cadre de l’opération Boléro-Paprika, 292 arrestations visant majoritairement des Espagnols et des Tchèques, le plus souvent communistes et résistants, sont réalisées. Accusés de faire « œuvre de trahison et de démoralisation »42, ils sont assignés à résidence avant leur expulsion vers la RDA, la Pologne, la Tchécoslovaquie et la Hongrie43. À Prague, le procès du « Centre de conspiration anti-État et anti-parti » dirigé par Rudolf Slansky débuta le 29 novembre 1950 :
Parmi ses co-accusés figuraient trois hauts responsables de l’appareil du parti (Sling, Gemeinder, un ministre : Clementis), sept vice-ministres (Löbl, Hadju, London, Svab, Reicin, Margolius, Fischl), un journaliste célèbre (André Simone) ainsi que le conseiller économique du président de la République (Frejka)44.
Ce procès à grand spectacle, monté de toutes pièces par les enquêteurs de la sécurité tchécoslovaque, dûment chapitrés par les conseillers soviétiques, dura huit jours. Haute trahison, espionnage, sabotage sont les principaux chefs d’inculpation. Les accusés auraient conspiré pour éliminer le président Clement Gottwald (1896-1943), soustraire la République au bloc soviétique pour la rapprocher des capitalistes américains et sionistes. Ces actions auraient été menées de longue date et Slansky se serait entouré de ces comparses en raison de « leur origine juive, leurs sympathies trotskystes ou titistes […] »45.
Face à l’invraisemblance des accusations, malgré les nombreux faux témoignages recueillis, les aveux étaient absolument indispensables, d’autant plus que le montage s’enlisait. Impossible de construire un nouveau procès Rajk46, la thèse du complot sioniste est donc préconisée par Moscou. On mentionne les origines des accusés, onze sur 14 sont d’origine juive. Sous couvert d’antisionisme, c’est pourtant bien un antisémitisme latent qui se dévoile47. Dans le contexte de la Guerre Froide, la recherche de légitimité pour les démocraties populaires (Hongrie, Pologne, Tchécoslovaquie), la nécessité d’avoir une stabilité pour l’URSS, les difficultés économiques grandissantes, appellent la désignation de responsables. Ils sont vite trouvés : les juifs. De plus, écrit Laurent Rucker : « [ …] cette purge des cadres juifs, d’origine bourgeoise selon les canons staliniens, vient à point nommé pour procéder à la prolétarisation de l’appareil de l’État et du Parti »48.
Ne pas être d’extraction ouvrière, avoir eu des liens avec l’étranger, appartenir à une minorité nationale, avoir été affilié à un parti non communiste ou à un groupe d’opposition au sein du parti, avoir des liens familiaux avec un « ennemi du peuple » sont, selon Annie Kriegel49, les critères retrouvés chez les accusés des procès. Dans le cas présent, les trois premiers critères sont observables. D’autres facteurs concernant la politique nationale, l’influence de Moscou et les relations internationales ont également joué. Pour Laurent Rucker, bien que les accusations de sympathie pour le sionisme soient centrales, plus que la judéité des accusés (Slansky, Geminder, Frejka, Reicin, London, Hadju, Löbl, Margolius, Fisch, Sling, Simone), c’est leur expérience politique acquise dans la Résistance et dans l’immédiat après-guerre qui constituerait une menace50. Ils sont devenus bien encombrants !
En effet, Laszlo Rajk, responsable des Hongrois dans les camps de Saint-Cyprien, Gurs et du Vernet51, avait lui aussi combattu dans les Brigades Internationales. Artur London est juif, ancien brigadiste international en Espagne, il a résisté en France et à Mauthausen où il a été déporté. Quant à Josef Frank, s’il n’est pas juif, il a également occupé des fonctions importantes à Buchenwald.
Artur London alias Gérard Elberfeld, dont une grande partie de la famille a été déportée à Auschwitz, est né le 1er février 1915 à Ostrava. Cadre des Brigades Internationales pendant la Guerre d’Espagne, responsable des FTP-MOI en France, il est arrêté le 12 août 1942 dans le contexte de l’affaire de la rue Daguerre où son épouse Lise avec d’autres camarades prirent la parole52. Condamné, il est incarcéré à Poissy, Blois, Royallieu-Compiègne puis déporté vers Mauthausen. Il est un des responsables du comité clandestin de résistance malgré une santé très dégradée. Après sa libération, en 1947, il va en Suisse pour soigner sa tuberculose. Son visa lui ayant été refusé (c’est la Guerre Froide), il ne peut regagner la France53. Il rentre en Tchécoslovaquie et devient vice-ministre des Affaires Étrangères. Arrêté le 28 janvier 1951, il est mis à l’isolement. Interrogatoires, privation de sommeil, tout est fait pour briser sa résistance. Ce traitement aboutit aux aveux lors du procès. Même son épouse doute un moment de son innocence. Artur London avouera mais en souhaitant le retrait de ce chef d’inculpation : « Pour moi, c’est certain, je préfère dix accusations d’espionnage […] que répondre du crime le plus monstrueux qui soit : avoir livré mes camarades à la hache d’Hitler »54. Les notes rédigées en prison ont servi à la rédaction de L’Aveu que Costa-Gavras portera à l’écran.
Si elle est foisonnante et luxuriante, peuplée d’une foule de personnages réels et fictionnels, l’œuvre de Semprun installe aussi les éléments traumatiques de façon fragmentaire, métonymique. Le blanc, souvent signe annonciateur d’une crise d’angoisse mémorielle55 voisine avec la fumée et la cendre.
La neige rappelle le froid meurtrier de Buchenwald, les cadavres gelés sur lesquels on trébuche, la cendre, l’ombre menaçante du crématoire. Mêlées, elles font surgir le souvenir des exécutés du Procès de Prague, unis dans le même linceul. Il y a les cendres de Joseph Frank et de Clementis56 « dispersées sur une route enneigée de Bohême »57 pour que surtout ils soient effacés à jamais.
Cette pratique ordinaire pour l’État soviétique (circulaire du 14 octobre 1922), explique Elisabeth Anstett, s’inscrit dans la volonté de ne pas rendre les corps des victimes à leurs familles. Les cadavres étaient « […] logiquement mis au rebut par l’État et anonymement enterrés, noyés, incinérés ou abandonnés dans des zones reculées »58. Les services de sécurité devaient s’assurer de « ne pas laisser de traces »59. C’est ce qui s’est produit pour les dépouilles du Procès Slansky. Heda Margolius dont le mari a été pendu raconte :
J’appris alors que les corps avaient été incinérés et les cendres confiées à deux agents de la Sécurité pour qu’ils s’en débarrassent. Dans la limousine officielle qui les conduisait, le chauffeur aurait fait la plaisanterie suivante :
— C’est la première fois que je transporte quatorze personnes d’un coup, nous trois et les onze contenus dans le sac […]. Les agents de la Sécurité sortirent de la voiture pour répandre les cendres sous les roues60.
Neige et cendres mêlées, comme les séries d’enveloppements, où chaque souvenir s’enroulant autour d’un autre61, forment la mémoire selon Maurice Halbwachs que Semprun évoque longuement dans de nombreux ouvrages. La scène des retrouvailles à Prague en est un parfait exemple. On se souvient que le motif de sa venue à Prague en 1969 est le tournage du film de Costa-Gavras L’Aveu62 dont il est le scénariste. Nul doute que le récit terrifiant d’Artur London dont il avait pris en hommage le nom de guerre, Gérard, ne l’ait replongé dans les années et les activités clandestines de Buchenwald. Si Semprun est vivant, c’est grâce à ses camarades de Buchenwald dont un des accusés du Procès Slansky : Josef Frank. Personnage récurrent de l’œuvre, il surgit au détour d’une phrase63 ou elliptiquement par le biais de son diminutif affectueux Pepikou, comme dans La Montagne blanche64, ou bien encore dans Quel beau dimanche ! :
[…] j’ai brusquement retrouvé avec une extrême précision cette image de ma mémoire : Joseph Frank se retournait […], il me voyait, me faisait à son tour un signe de connivence, un bref sourire aussitôt disparu65.
Né en 1909, Josef Frank, membre du PCT, est arrêté en 1939. Interné à Buchenwald, il est un des responsables de l’Arbeitsstastistik, le représentant des Tchèques au Comité international. Toujours évoqué avec émotion66, sa disparation tragique ouvre d’autres plaies. Non, une quelconque culpabilité du survivant67 que Semprun (et bien d’autres) a toujours récusée, mais celle du militant communiste aveuglé par la loyauté au Parti comme il l’écrira plus tard dans Quel beau dimanche ! :
[…] je me souvenais de mes silences sécurisants d’autrefois et de ma surdité serve et volontaire aux cris de certains de ces suppliciés qui avaient été mes camarades. Il n’y avait plus de mémoire innocente, plus pour nous68.
Et dans Autobiographie de Federico Sánchez :
Si Frank avait été un agent de la Gestapo, cela fait des dizaines d’années que tu aurais été réduit en cendres et en fumée dans le crématoire de Buchenwald […]. Tu ne proclamas nulle part l’innocence de Frank […]. Tu préféras vivre à l’intérieur du Parti le mensonge de l’accusation portée contre Frank plutôt que de vivre hors du Parti la vérité de son innocence69.
Cette trahison de la vérité, qui en 1949 lui avait fait aussi dans une scrupuleuse obéissance tourner le dos70 à son ami Georges Szekeres71 que le parti (PCF), au moment du procès Rajk, invite à considérer comme suspect, est un véritable joug dont il parviendra à se ‛libérer’ progressivement à partir du rapport Khrouchtchev (1956) et jusqu’à son exclusion du PCE en 1964. Ainsi, cette année-là (Semprun est sur la sellette depuis 1961), il écrit à Szekeres qui est alors à Budapest :
Mon cher Georges, ton mot a été pour moi une vraie joie (pour des raisons très profondes, où une certaine amertume, une certaine douleur ne sont pas absentes). J’y réponds toute de suite, pour te souhaiter une bonne année et tout le bonheur possible (si tant est que le bonheur est possible, je ne sais plus rien, peut-être n’y a-t-il que des bonheurs qu’on arrache un à un). […] Il y a de la place à la maison et tu peux te considérer comme un invité permanent. C’est peut-être très con de te dire ça; mais je voulais que tu saches que tu peux compter sur mon amitié.
Bien à toi,
Jorge Semprun72.
Donc, l’aveu de Josef Frank reconnaissant avoir travaillé pour la Gestapo à Buchenwald est le révélateur de l’évidence :
L’impossibilité absolument évidente de cette accusation et de cet aveu, donc, qui est si on veut, le premier doute, ou […] la première expérience, même par personne interposée, par cadavre interposé, la première expérience personnelle du mensonge qui jusqu’alors avait été éloigné avec une certaine mauvaise foi ou éloigné pour des raisons d’action ou des raisons impératives ou immédiates […]73.
Incontestablement, L’Aveu d’Artur London est l’occasion d’affronter la faute, de réparer l’outrage et de les honorer. Et cela est si important que Semprun demande à Costa-Gavras de lui permettre de signer seul le scénario74.
— Toi qui écris, dit Jiri Zak, tu devrais donner une suite au Grand Voyage […]. Tu devrais raconter la nuit au Revier, à côté de ton Musulman. Tout ce qui va avec… Y compris Busse et Bartel !
Peut-être avais-je trop bu, mais il m’avait semblé que c’était une idée75.
L’idée fera son chemin et deviendra plus de trente après Le Mort qu’il faut. Rotfront ! Le cri de ralliement condense l’histoire du communisme du début du siècle à 1969 et les figures tutélaires de Frank, Busse et Bartel. En creux s’écrit celle des protagonistes de la boîte de jazz. Le narrateur pédagogue qui veut expliquer (et sans doute s’expliquer) donne les informations par la voix de Zak. Ce dernier évoque le destin76 de Frank et Ernst Busse. Alors qu’après la libération, il occupe des fonctions ministérielles dans le Land de Thuringe, Busse, qui fut le kapo du Revier, est accusé par les autorités d’occupation soviétiques de ne pas avoir sauvé assez de prisonniers de guerre. Ces derniers, que les nazis craignaient par-dessus tout, furent affamés et astreints à un régime particulièrement sévère. 8 000 d’entre eux furent exécutés entre 1941 et 194277. Mort à Vorkuta en 195278, Busse ne sera réhabilité qu’en 199079.
Quant à Walter Bartel, honoré par le cri de guerre Rotfront ! et les verres levés en signe d’hommage, c’est le seul survivant de cette tragédie rouge, de neige et de cendres. Bartel, qui interrogea Semprun au sujet de ses possibles accointances avec l’ambassadeur de Franco, est décrit ainsi par le narrateur :
Vieilli avant l’âge, plutôt. Il avait connu les premières années de Buchenwald, inimaginables. Quand le camp n’était pas encore un sana. En 1934, lors de son arrestation, il avait eu la mâchoire fracassée par la Gestapo au cours d’un interrogatoire80.
Comme pour Frank, ses qualités humaines sont évoquées : « Walter était l’un des rares vétérans communistes allemands avec qui l’on pouvait parler. L’un des rares à ne pas être devenu fou. Agressivement fou, du moins »81. Né en 1904 à Fürstenberg, il adhère au KPD en 1923, va étudier à l’école Lénine à Moscou. De retour en Allemagne, il est arrêté en 1933. En 1936, il émigre en Tchécoslovaquie. Incarcéré à Buchenwald en 1939 où il occupe diverses fonctions dans la résistance clandestine dont celle à l’Arbeitsstatistik82. Mais pourquoi le destin de Bartel est-il différent de celui de ses camarades ? Parce que son procès a été instruit par la sécurité allemande et non par les Soviétiques et parce qu’il :
S’est farouchement refusé à collaborer avec les procureurs, les inquisiteurs de son Parti. Il a défendu ses positions politiques, admettant avoir commis des erreurs, le cas échéant, mais n’avouant aucun des crimes qu’on lui imputait83.
En 1969, au moment où Zak et Semprun trinquent à sa santé, Water Bartel, qui a fait une brillante carrière au sein du Parti, est Professeur d’Histoire contemporaine à l’Université Humboldt. Il mourra en 1992 à 88 ans.
Ni les silences coupables, ni la dette de vie contractée à Buchenwald, ne pourront être définitivement effacés. En faisant apparaître régulièrement dans ses écrits les copains de Buchenwald aux côtés de ceux du maquis, le détenu 44 409 devenu écrivain leur offre un présent renouvelé. L’hommage aux disparus est toujours associé à la fraternité et à leur engagement. Ainsi, Zak, le parrain du Mort qu’il faut habite-t-il l’œuvre en invité familier. C’est dans une mise en abyme qu’il côtoie Josef Frank dans La Deuxième Mort de Ramon Mercader : « Il était copain avec Jiri, le Tchèque de la Schreibstube, celui qui était fou de jazz »84. Évoqué dans L’Écriture ou la Vie85, Quel beau Dimanche !86 et jusque dans le dernier ouvrage, Exercices de survie87, qui était-ce copain tant admiré ?
Né en 1917 à Budejovice, il fait ses études à Pilsen. Écrivain, compositeur, journaliste, communiste, il est arrêté en 1939, incarcéré et interné à Dachau puis à Buchenwald. Affecté au département politique, il créé un orchestre de jazz clandestin, Rhythmus88, dans lequel jouent amateurs et professionnels tel Marco Marcovich89. En 1952, il devient rédacteur en chef du magazine Kvèti à Prague90. Il a écrit plusieurs ouvrages, parfois sous des pseudonymes, dont un livre insolite, Zirkus91, récit d’un reporter dans le monde du cirque. Comme Semprun, Zak aime jouer avec les identités, les photos sont de Viktor Radnecky (son pseudonyme) et le texte de Zak. Exclu du PCT, il est sous surveillance. Alors qu’il voyageait en Allemagne, il tomba malade et ne rentra pas. Rédacteur pour le magazine Stern, ses collègues Claus Lütterbeck92 et Günther Garde93 décrivent un homme très érudit, « un maniaque du détail qui ne parlait jamais de Buchenwald et possédait un humour ravageur ».
Cet homme discret ne leur a donc probablement pas raconté les sauvetages réalisés, tel celui d’un homme devenu restaurateur à Paris, rapporté par Alexander Goldscheider, ni celui d’Elie Wiesel. Bien des années plus tard, ce dernier, invité à Prague par le président Vaclav Havel, chercha à contacter Zak. Il était trop tard. Zak était mort en exil à Hambourg en 1986 à l’âge de 69 ans.
Le Mort qu’il faut est donc un «tombeau», une réparation-hommage, entreprise mémorielle rappelant également l’inconnu du Revier dont Semprun devait prendre l’identité, François L. :
Ce mort vivant était un jeune frère, mon double peut-être mon Doppelgänger : un autre moi-même ou moi-même en tant qu’autre. C’était l’altérité reconnue […] précisément qui nous rendait si proches94.
Dans l’immédiat antichambre du crématoire qu’est le Revier, Semprun rencontre un copain d’autrefois, Olivier Crette95, de la prison d’Auxerre, avant de retrouver François L., le Musulman, « lumière vacillante d’une étoile morte »96 sur le châlit97. Parisien, étudiant, arrivé pendant la même période, il a eu le parcours inverse de celui de Semprun : pas de protection, des kommandos pénibles, autant de motifs de dépérissement assuré. L’énigmatique jeune homme conserve à ce jour l’anonymat de son alias littéraire, il est introuvable – en tenant compte des indices donnés par Semprun –, dans les 2050 entrées nominatives à la lettre L. et les 63 au prénom François du « Livre-mémorial » de la Fondation pour la mémoire de la déportation...
Quoi qu’il en soit, si Semprun est au Revier, c’est parce qu’il est protégé par le Parti qui va tenter de le faire renaître sous un autre nom. C’est justement ce qui sera reproché aux communistes des camps.
Les procès politiques, dont celui de Slansky, s’inscrivent dans des causalités complexes déjà partiellement évoquées. On se souvient qu’un des chefs d’accusation concernait les actions menées par les accusés dans les camps. Dans un grand retournement, ce qui leur valut un temps gloire et honneurs s’est donc retourné contre eux, conduisant presque à faire oublier la responsabilité des nazis…
Ainsi Marcel Paul98, accusé d’avoir « redistribué la mort » explique-t-il à ses détracteurs l’infernal univers du camp :
Ne pas lutter de toutes ses forces pour arracher d’un transport vers un kommando d’extermination par le travail un Français, même un seul Français sur mille […] aurait été capituler devant l’ennemi, aurait été trahir sa patrie […]. C’était à qui arracherait le plus possible des siens […]99.
Walter Bartel fait de même lors de son interrogatoire du 29 mai 1953 :
Où est la responsabilité lorsqu’on sait que 1 000 hommes vont être envoyés en kommando et on se met les mains dans les poches et on laisse partir ceux que les SS ont choisis? Tu ne peux quand-même pas exiger de nous tout ce qui n’a pu être fait au camp !100
Sonia Combe montre bien les enjeux des procès, à l’Est comme à l’Ouest, et le fait que ces changements de paradigmes et de focalisations permettent également d’éviter d’étudier la résistance au fascisme101. Ils empêchent de surcroît l’analyse des politiques de dénazification, du traitement des crimes de guerre et de la collaboration. De sauveurs, les communistes ont été ensuite présentés comme tueurs, assistants des nazis. Ainsi, écrit-elle :
Si donc un procès posthume devait être fait aux Kapos de Buchenwlad, tout survivant102 qui a bénéficié à un moment ou à un autre d’un « traitement préférentiel » devrait être également convoqué. Ainsi, le docteur Odic, Jorge Semprun, l’industriel Marcel Bloch-Dassault ou encore le journaliste chrétien Marcel Conversy, qui réussit à faire rayer son nom d’un transport. Et aussi Elie Wiesel, Imre Kertész, en bref, nombre de ceux qui ont survécu103.
On ne peut que conclure avec l’historienne :
Il était impossible de sauver tout le monde. Il n’y avait pas d’autre choix que de procéder à un choix. Le choix n’était justifié que parce qu’inévitable104.
Sur la place d’appel en 1995, Semprun rend hommage à la résistance antifasciste et aux communistes de Buchenwald en retraçant leur parcours et l’épuration qu’ils ont subie105. Il réaffirme l’innocence de Josef Frank : « Si Frank avait été un agent de l’ennemi nazi, je ne serais pas ici aujourd’hui […] »106.
Les spirales narratives de ce court passage du Mort qu’il faut sont indéniablement « tressées aux spirales de l’histoire », selon la formule de Françoise Nicoladzé107. Titre, quatrième, dernières pages et incipit performatif « On a le mort qu’il faut ! »108 conduisent le narrateur pédagogue à témoigner des heures de Buchenwald. Cette littérature mémorielle est toujours également combattante, marquée par le rouge, la neige et la cendre. En dépit de toutes les vicissitudes, des destinées tragiques de nombreux anciens de Buchenwald, ce qui reste intact chez Semprun, c’est l’attachement aux valeurs de l’engagement premier qui justement le mena à Buchenwald et, justement, lui sauva la vie. Zak l’écrit dans sa recension de La Deuxième Mort de Ramon Mercader :
Il se concentre sur ce qui fait le sens de sa vie : le dilemme tragique à l’intérieur d’un monde, le monde communiste duquel il a été exclu, mais dont il a été convaincu que c’était son propre monde. Il se concentre donc sur « le visage humain » pour lequel il s’est battu109.
La mort courtisane, masquée, travestie, esquivée, traversée, le poursuivra sous mille et une apparitions. « Dans un tourbillon de soie voltigeante, blanche et noire »110, passagère clandestine, elle hante l’œuvre et joue avec les osselets des souvenirs à la lisière du rêve : bruits du cercueil maternel que l’on cloue, coups frappés sur le châlit111, paillettes irisées des neiges de Buchenwald et du Goulag112.
Issu de la matrice de L’Aveu, dans l’ombre portée de l’expérience de la torture, Le Mort qu’il faut est un fragment du long travail de deuil à jamais inachevable. Sans doute, pourrait-on appliquer à Semprun la description d’Artur London par Chris Marker dans le documentaire On vous parle de Prague : « […] le drame d’un communiste pris au piège de sa fidélité, et qui a eu le courage dénoncer le piège sans renier la fidélité ». Il est aussi un appel à une lecture critique mais empathique de l’Histoire refusant le manichéisme : « Je pense qu’il faut avoir vécu leur mort, comme nous l’avons fait, nous qui avons survécu, pour poser sur eux ce regard pur et fraternel »113.
Rotfront ! Toujours ! « Il n’est jamais inutile de se ressourcer au courage des combattants »114, écrit Semprun. Le Rouge, la neige et la cendre ; les disparus veillent à jamais sur les revenants dansant dans les matriochkas de la mémoire, ils tissent l’avenir promis à son fils par Josef Frank dans sa dernière lettre : « […] dans cette société nouvelle ne se passeront et ne se répéteront plus des affaires comme la mienne »115. N’est-ce pas un chien d’ombre et de brouillard rappelant un résistant de Prague qui réconforte Karel Kepela déboussolé : « […] vieux Fučik116, petit corniaud, t’es revenu ? T’as entendu dans l’au-delà qu’il m’arrivait malheur, encore une fois […]. T’es venu me retrouver ? »117.
[1] Jorge SEMPRUN, Le Mort qu’il faut, Paris, Gallimard, 2001, p. 82.
[2] Tous mes remerciements à Dominique Brau, Corinne Daugan, Christian Langeois et Françoise Nicoladzé.
[3] Jorge SEMPRUN, L’Écriture ou la Vie, Paris, Gallimard, 1994, p. 237.
[4] Jorge SEMPRUN, Netchaïev est de retour, Paris, Gallimard, 1987.
[5] Jorge SEMPRUN, Le Grand Voyage, Paris, Gallimard, 1963.
[6]« […] en écoutant les récits décousus de Manuel Azaustre, j’avais eu l’impression que je pourrais raconter. Mieux que lui en tout cas » (J. SEMPRUN, Quel beau dimanche !, Paris, Grasset & Fasquelle, 1980, p. 111).
[7] Jorge SEMPRUN, Le Mort qu’il faut, p. 196-197.
[8] Gérard GENETTE, Seuils, Paris, Gallimard, 1977.
[9] Ibidem, p. 11.
[10] Deborah PESENTI, La Quatrième de couverture : bilan attente et mise en pratique, mémoire de Master en Édition imprimée et numérique, Université de Toulouse Jean Jaurès, septembre 2018, p. 92.
[11] Françoise NICOLADZÉ, La Lecture ou la vie, œuvre attendue, œuvre reçue : Jorge Semprun et son lectorat, Paris, Gallimard, 2002.
[12] Jorge. SEMPRUN, Le Mort qu’il faut, op. cit., p. 196-197 et quatrième de couverture.
[13] Jorge SEMPRUN, Le Grand Voyage, op. cit., p. 97.
[14] Artur LONDON, L’Aveu. Dans l’engrenage du Procès de Prague [1968], Paris, Gallimard, coll. « Folio », 2007.
[15] Jaime CÉSPEDES, « Filmographie », in J. CÉSPEDES (éd.), Cinéma et engagement. Jorge Semprun scénariste, Condé-sur-Noireau, Éditions Charles Corlet, coll. « CinémAction », 2011, p. 159.
[16] D’après le roman éponyme de Vassilis Vassilikos, le film obtient de nombreuses récompenses dont le Prix du Jury au Festival de Cannes en 1969.
[17] COSTA-GAVRAS, Va où il est impossible d’aller, Paris, Seuil, 2018, p. 198.
[18] Jorge SEMPRUN, Le Mort qu’il faut, op. cit., p. 179.
[19] Nous traduisons à partir de la lettre de Semprun à Jiri Zak du 10/04/1975 (un feuillet dactylographié) conservée à l’Archiv der Sozialen Demokratie, Friedrich-Ebert-Stiftung.
[20] Jorge. SEMPRUN, Le Mort qu’il faut, op. cit., p. 196.
[21] Ibid., p. 196-197.
[22] Ibid., p. 192.
[23] Philippe BURRIN, « Poings levés et bras tendus. La contagion des symboles au temps du front populaire », Vingtième Siècle, revue d’histoire, n°–11, juillet-septembre 1986, p. 8. Ce geste deviendra emblématique de nombreuse luttes comme celle du Black Power aux USA.
[24] Kurt G. P. SCHUSTER, Der Rote Frontkämpferbund 1924-1929. Beiträge zur Geschichte und Organisationsstruktur eines politischen Kampfbundes, Düsseldorf, Drotse, 1975, p. 41, cité par Gilles VERGNON, « Le ‘poing levé’, du rite soldatesque au rite de masse. Jalons pour l’histoire d’un rite politique », in Le Mouvement Social, n° 212, juillet-septembre 2005, p. 79.
[25] John Heartfield (Heltmut Herzfeld, 1891-1968) crée le logo du RFB, « poing fermé dans un cercle sur un fond noir, accompagné des trois initiales de l’organisation », à partir du dessin réalisé en 1922 par Georges Grosz (G. VERGNON, op. cit., p. 79).
[26] Philippe BURRIN, op. cit., p. 8.
[27] Ibid., p. 9.
[28] Après les manifestations du 1er mai 1929 qui avaient été interdites, lors des émeutes qui durèrent trois jours, 33 militants communistes furent assassinés et 200 civils blessés. La répression policière sévère fit des milliers d’arrestations.
[29] Pour l’histoire de Buchenwald qui deviendra le Camp spécial n°2 soviétique, voir Harry STEIN, Konzentrationslager Buchenwald. 1937-1945. Begleitband zur ständigenhistorischen Ausstellung, Wallstein Verlag, 1999.
[30] Certains deviendront célèbres : Thomas Geve (1929), Israel Meir Lau (1937), Elie Wiesel (1928-2016), Jerzy Zweig (1941).
[31] Les détenus classés par catégories portaient des triangles de couleur avec une lettre correspondant à leur nationalité. Pour Semprun, triangle rouge et S (Spanien), soit politique espagnol.
[32] Hermann Wilhem Hammann (1897-1955), communiste, a sauvé 159 enfants juifs du bloc 8. Reconnu Juste parmi les nations.
[33] Jiri ZAK, Ein Fall aus Buchenwald, 1947.
[34] Archives Daniel Anker. Tapuscrit de 7 feuillets. Franka GÜNTHER, interview avec Daniel Anker. Matricule 44364. 17/07/1994, p. 5.
[35] Michel Boitel, né le 18 juin 1823 à Amiens, mort le 20 octobre 1944 à Buchenwald. Hessel est né le 20 octobre 1917 à Berlin.
[36] Stéphane HESSEL, Danse avec le siècle. Souvenirs [1997], Paris, Seuil, coll. « Points », 2011, p. 115-117. Pour le récit de ce sauvetage, voir aussi Eugen KOGON, L’État SS. Le système des camps de concentration allemands [1946], traduit de l’allemand, Paris, Seuil, coll. « Points », 2002, p. 269-280 et J. SEMPRUN, Quel beau dimanche !, op. cit., p. 391.
[37] Op cit, Jorge. SEMPRUN, Le Mort qu’il faut, p. 16.
[38] Ibid., p. 183-189.
[39] Ibid., p. 188.
[40] Ibid., p. 189.
[41] Karel KAPLAN, Procès politiques à Prague, traduit du tchèque par Miléna Braud, Éditions Complexe, 1980, p. 23. Voir le documentaire de Ruth ZYLBERMAN Le Procès. Prague, 1952, Pernel Médias, Arte, France, 2021.
[42] Aurélie DENOYER, « L’opération Boléro-Paprika : origines et conséquences », in Résonances françaises de la Guerre d’Espagne, Paris, Éditions d’Albret, 2011, p. 297.
[43] Ibid., p. 304.
[44] Karel KAPLAN, op cit, p. 50.
[45] Laurent RUCKER, « Le complot sioniste II : Procès à Prague », chapitre VIII in Staline, Israël et les Juifs, Paris, PUF, 2001, p. 278, p. 57.
[46] En Hongrie, le procès de László Rajk (1909-1949) et de ses huit co-accusés s’est déroulé en 1949. Andras Szalai, Tibor Szöni et László Rajk furent pendus.
[47] Laurent RUCKER, op cit., p. 281.
[48] Ibid., p. 284.
[49] Annie KRIEGEL, Les Grands Procès dans les systèmes communistes : la pédagogie infernale, Paris, Gallimard, 1972, p. 44, cité par L. RUCKER, op. cit., p. 284.
[50] Laurent. RUCKER, op cit., p. 285.
[51] François FEJTÖ, « L’affaire Rajk est une affaire Dreyfus internationale », Esprit, novembre 1949.
[52] Lise LONDON, La Mégère de la rue Daguerre. Souvenirs de résistance, Paris, 1995.
[53] Ladislas Holdos (1911-1988), Pierre Kalierik à Buchenwald, brigadiste international, connaîtra un destin similaire. Rentré dans son pays, jugé en avril 1954 à Bratislava dans le « procès des nationalistes bourgeois », condamné à 13 ans de prison, libéré en 1957, réhabilité en 1963. Voir Christian LANGEOIS, Henri Krasucki. 1924-2003, Paris, Le Cherche Midi, 2012, p. 180 ; Pierre DURAND, « La mort d’un héros. ‘Pedro’ est décédé le 9 septembre dernier », Le Serment, n° 199, novembre 1988, p. 4 ; et J. SEMPRUN, Quel beau dimanche !, op. cit., p. 187.
[54] Arthur LONDON, op cit., p. 353.
[55] Corinne BENESTROFF, Jorge Semprun. Entre résistance et résilience, Paris, CNRS Éditions, 2017, p. 313-335.
[56] Vladimir Clementis (1902-1952).
[57] Jorge SEMPRUN, Quel beau dimanche !, op cit., p. 187.
[58] Elisabeth ANSTETT, « La longue vie des fosses communes. Enjeux symboliques et sociaux du traitement des restes humains du Goulag en Russie postsoviétique », in E. ANSTETT et Jean-Marc DREYFUS (éd.), Cadavres impensables, cadavres impensés. Approches méthodologiques du traitement des corps dans les violences de masse et les génocides, Paris, Petra, 2012, p. 120. La pratique est abandonnée pour les dépouilles du procès Imre Nagy, 3 exécutés le 16 juin 1958 furent enterrés en secret. Ce n’est qu’en 1989 qu’on put identifier les tombes. Voir Karel BARTOSEK, « Europe centrale et du Sud-Est », in Stéphane COURTOIS et al (éd.), Le Livre noir du communisme. Crimes, terreur et répression [1997], Paris, Éditions Robert Laffont, Paris, Pocket, 1999, p. 619.
[59] Ibid., Elisabeth ANSTETT, p. 121.
[60] Heda MARGOLIUS KOVÁLY, Le Premier Printemps de Prague. Souvenirs, 1941-1968 [1986], traduit de l’anglais par Isabelle CHAPMAN, Paris, Éditions Payot, 1991, p. 235, 236.
[61] Maurice HALBWACHS, La Mémoire collective, Paris, Presses Universitaires de France, 1950.
[62] COSTA-GAVRAS, L’Aveu, Films Pomereu, France, 1970.
[63] « Ah, merde ! Frank! À quoi bon remuer tout ça? », J. SEMPRUN, La Deuxième Mort de Ramón Mercader, op. cit., p. 302.
[64] Jorge SEMPRUN, La Montagne blanche [1986], Paris, Gallimard, coll. « Folio », 1988, p. 145.
[65] Jorge SEMPRUN, Quel beau dimanche !, op cit., p. 368.
[66] « Homme froid et réservé au premier abord, mais qui se révélait plein de tendresse, d’alacrité, de fermeté placide et tolérante […] », J. SEMPRUN, Autobiographie de Federico Sánchez, op. cit., p. 119.
[67] La culpabilité du survivant fait partie des poncifs attribués aux survivants des camps alors même que ces derniers, principalement les déportés politiques, disent ne l’avoir jamais ressentie. « Je ne dois pas être doué pour cela », J. SEMPRUN, Quel beau dimanche !, op. cit., p. 58.
[68] Ibid., p. 193. Passage consacré au procès de Joseph Frank : p. 50-54.
[69] Jorge. SEMPRUN, Autobiographie de Federico Sánchez, op cit., p. 119-120.
[70] « J’ai tourné la tête, j’ai laissé tomber Szekeres dans le néant. J’étais un bolchévique, moi. Un homme d’acier. Un vrai stalinien, somme toute », J. SEMPRUN, Quel beau dimanche !, op. cit., p. 89.
[71] Georges Szekeres (1814-1974), communiste, commandant FFI. Journaliste, chargé d’affaires de la République populaire de Hongrie à Rome. Rentré en France, il est expulsé. Condamné à Budapest pour « activité antipopulaire », emprisonné. Il ne pourra revenir en France qu’en 1962. Meurt à Budapest.
[72] Lettre de Semprun à George Szekeres de janvier 1964, voir Vera VARSA-SZEKERES, Salamandre. Une vie confrontée à la Gestapo française et à la police politique hongroise, traduit du hongrois par Paul REMETEAN et Thierry LOISEL, Paris, L’Harmattan, 2016, p. 183.
[73] Jorge SEMPRUN interviewé par Chris MARKER dans On vous parle de Prague, minute 07 : 16.
[74] COSTA-GAVRAS, Va où il est impossible d’aller, op. cit., p. 205.
[75] Jorge SEMPRUN, Le Mort qu’il faut, op cit., p. 195-197.
[76] Ibid., Jorge SEMPRUN, p. 195-196.
[77] Op cit, Harry. STEIN, p. 121.
[78] Ibidem, p. 196. Vorkouta : ville minière près du cercle polaire et camp du Goulag créé au début des années trente.
[79] Le docteur Joseph Brau (1891-1975) travaillait avec Ernst Busse au Revier. Ils organisèrent le dispositif sanitaire à la libération du camp.
[80] Jorge SEMPRUN, Le Mort qu’il faut, op cit., p. 62.
[81] Ibid., Jorge SEMPRUN, p. 63.
[82] Harry. STEIN, op cit., p. 293-294.
[83] Jorge SEMPRUN, Le Mort qu’il faut, op cit., p. 196.
[84] Jorge SEMPRUN, La Deuxième Mort de Ramon Mercader, op cit., p. 302.
[85] Jorge SEMPRUN, L’Écriture ou la Vie, op cit., p. 70.
[86] Jorge SEMPRUN, Quel beau dimanche !, op cit., p. 369-370.
[87] Jorge SEMPRUN, Exercices de survie, Paris, Gallimard, 2012, p. 91-92.
[88] Wolfgang MUTH, « Rhythmus, ein internationales Jazzorchester in Buchenwald », in Eisenachertage 1984. 25 Jahre Ag Jazz im Klubhaus AWE, 1984, p. 10. Le musicien Miroslav Hejtmar est évoqué par J. SEMPRUN in Exercices de survie, op. cit., p. 92-94.
[89] Archives de l’Association Buchenwald-Dora et Kommandos, Paris, ABDK II/2/20. Témoignage tapuscrit de Marcovitch Louis Marco (1908-1994), p. 2. (5 feuillets).
[90] Archiv der Sozialen Demokratie der Friedrich-Ebert-Stiftung, Bonn, notice sur Jiri Zak.
[91] Viktor RADNICKY, Jiri ZAK, Zirkus, Prague, Artia Praha, 1960.
[92] Claus Lütterbeck, communication à l’auteure, 31/07/2012.
[93] Günther Garde, communication à l’auteure, 24/09/2012.
[94] Jorge SEMPRUN, Le Mort qu’il faut, op cit., p. 43.
[95] Olivier Crette (1910-1944) apparaît in Le Grand voyage, op. cit., p. 58, 208.
[96] Jorge. SEMPRUN, Le Mort qu’il faut, op cit., p. 36.
[97] Ibid., p. 128-144.
[98] Marcel Paul (1900-1982), résistant communiste, déporté à Auschwitz et Buchenwald, organisateur avec le colonel Frederic-Henri Manhès (1889-1959) du Comité des Intérêts Français en août 1944.
[99] Sonia COMBE, Une vie contre une autre. Échange de victime et modalité de survie dans le camp de Buchenwald, Paris, Librairie Arthème Fayard, 2014, p. 223.
[100] Ibid., p. 236.
[101] Ibid., p. 300-303.
[102] Odic (1894-1979), Jorge Semprun (1923-2011), Bloch-Dassault (1892-1986), Conversy (1897-), Kertèsz, (1929-2016), Wiesel (1928-2016).
[103] Sonia COMBE, op cit., p. 260-261.
[104] Ibid., p. 292.
[105] Jorge SEMPRUN, « Ni héros ni victimes. Weimar-Buchenwald », in Une tombe au creux des nuages. Essai sur l’Europe d’hier et d’aujourd’hui, Paris, Climats, 2010, p. 152-158.
[106] Ibid., p. 157.
[107] Françoise NICOLADZÉ, La Deuxième Vie de Jorge Semprun. Une écriture tressée aux spirales de l’histoire, Castelnau-le-Lez, Climats, 1997.
[108] Jorge SEMPRUN, Le Mort qu’il faut, op. cit., p. 13. Voir Alain RABATEL, « Effacement énonciatif et effets argumentatifs indirects in l’incipit du Mort qu’il faut de Semprun », Semen, 17, 2004.
[109] Archiv der Sozialen Demokratie. Friedrich-Ebert-Stiftung, Bonn, 1/JZ 52 AA 00015, Fonds Jiri Zak (recension de 4 feuillets, je traduis).
[110] Jorge SEMPRUN, Quel beau dimanche !, op cit., p. 202-203.
[111] Jorge SEMPRUN, Le Mort qu’il faut, op cit., p. 17, 89.
[112] Jorge SEMPRUN, Quel beau Dimanche !, op cit., p. 187.
[113] Jorge SEMPRUN, Le Grand voyage, op cit., p. 189.
[114] Jorge SEMPRUN, « Préface » de Paroles de déportés. Poèmes choisis par Yves Ménager, Paris, Les Éditions de l’Atelier / Éditions ouvrières, Paris, 2005, p. 16.
[115] Karel BARTOSEK et Karel KAPLAN, « Les dernières lettres des pendus du procès Slansky. Prague, 1952 », Communisme, n° 10, février 1970, p. 24.
[116] Julius Fučik (1903-1943), membre du PCT, arrêté par la Gestapo, pendu.
[117] Jorge SEMPRUN, La Montagne blanche, op cit., p. 179.
Corinne BENESTROFF
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