À l’orée des années cinquante, le cinéaste Jean Grémillon – qu’il serait pertinent de considérer en premier lieu comme un documentariste – participe à un projet ambitieux mené par les productions du Trident ; la petite société de Bluette Christin-Falaize et Nino Constantini met en chantier une série de courts métrages didactiques, des « définitions » réunies sous l’appellation l’Encylopédie filmée. En bonne logique, c’est la lettre A qui connaît un début de réalisation, avec des films dont le titre commence par la première lettre de l’alphabet. Grémillon qui en prévoit trois (Amour, Alchimie, Astrologie) en réalisera deux. Le premier d’entre eux, entrepris en 1951, achevé en 1952, se nomme Alchimie. Il s’agit pour l’essentiel d’un film de banc-titrage de gravures extraites d’ouvrages ésotériques du seizième au dix-huitième siècle. Cependant il s’ouvre et se referme sur deux séquences en prises de vues réelles, ayant pour cadre Notre-Dame de Paris et ses abords. À elles seules, ces deux scènes brèves forment la représentation la plus saisissante de l’idée de cathédrale qui ait été élaborée dans les années d’après-guerre. Comment comprendre une telle réussite ? Et d’abord, que vient faire une cathédrale dans un documentaire consacré à l’alchimie ?
Si Jean Grémillon établit un lien étroit entre le monument qu’est la cathédrale de Paris et le domaine de l’alchimie, c’est qu’il fait référence de façon implicite à l’étude qui a proposé dans les années vingt une lecture alchimique des édifices religieux médiévaux, Le mystère des cathédrales, édité par Jean Schemit à Paris en 1926. Sous-titré L’interprétation ésotérique des symboles hermétiques du grand-œuvre, cet ouvrage publié sous le pseudonyme de Fulcanelli et accompagné des dessins évocateurs de Julien Champagne, a contribué à redonner à l’alchimie ses lettres de noblesse au vingtième siècle. Féru de culture médiévale, le cinéaste a dû le lire dès 1926, une année importante pour lui : il tourne alors son premier essai esthétiquement marquant Tour au large, et s’apprête à passer du documentaire à la fiction. Lorsqu’il élabore en 1951 son film sur l’alchimie pour l’Encyclopédie filmée, Grémillon conçoit un prologue et un épilogue en lien précis avec le livre de Fulcanelli. Lien direct et discret ; il ne le mentionne pas ouvertement, mais il suffit de se reporter à la façon dont il rédige le commentaire d’un plan majeur, le quatrième de son film, pour apprécier le retravail de Grémillon du texte de Fulcanelli. Voici le texte du commentaire, que le cinéaste prononce sur les différentes phases de ce plan complexe qui détaille, par une série de mouvements, une figure allégorique du trumeau central :
[…] sur le grand porche de Notre-Dame de Paris.] Il y a là une femme assise dont le front touche les nues : c’est l’Alchimie. Sa main droite supporte deux livres : l’un ouvert, celui des signes visibles de la Nature, l’autre qui est fermé : celui de la nature secrète des choses. Maintenue entre ses genoux et appuyée sur sa poitrine se dresse l’échelle aux neuf degrés. Ce sont les neuf opérations successives de l'Alchimiste qui surprend la vie à l'œuvre, ce sont aussi les neuf voies de la Sagesse1.
Maintenant, reportons-nous à la manière dont la cathédrale de Paris est abordée dans le Mystère des cathédrales, à partir de cette même allégorie de pierre :
Franchissons la grille du porche, et commençons l’étude de la façade par le grand portail, dit porche central ou du Jugement. Le pilier trumeau, qui partage en deux la baie d’entrée, offre une série de représentations allégoriques des sciences médiévales. Face au parvis, – et à la place d’honneur, – l’alchimie y est figurée par une femme dont le front touche les nues. Assise sur un trône, elle tient de la main gauche un sceptre, – insigne de souveraineté, – tandis que la droite supporte deux livres, l’un fermé (ésotérisme), l’autre ouvert (exotérisme). Maintenue entre ses genoux et appuyée contre sa poitrine se dresse l’échelle aux neuf degrés, scala philosophorum, hiéroglyphe de la patience que doivent posséder ses fidèles, au cours des neuf opérations successives du labeur hermétique (pl. II)2.
Avec son sens de la synthèse, Grémillon a su condenser en quelques termes choisis la description de Fulcanelli. Il va à l’essentiel, reprenant quelques tournures qui vont droit au but.
L’art de la condensation, de la quintessence d’esprit, n’est pas le seul que pratique le cinéaste normand. L’art du déplacement, du retournement magique des formes, est autant caractéristique de son style. Pour en mesurer la portée, il faut voir comment deux plans pivots de son film se trouvent être des variations sur deux gravures figurant en bonne place dans Le mystère des cathédrales, les planches 2 et 3. La première de ces deux planches, l’auteur caché du livre y renvoie dans le texte que reprend le cinéaste, où se trouve interprétée l’allégorie figurant au trumeau du porche ; il s’agit de la planche II de l’ouvrage de Fulcanelli ; Julien Champagne y a reproduit fidèlement l’allégorie de l’Alchimie, désignée ainsi : bas-relief du grand porche de Notre-Dame de Paris. La deuxième des planches dont s’inspire Grémillon est la suivante dans l’ouvrage, la planche III sous-titrée : Notre-Dame de Paris – L’Alchimiste, une pleine page qui offre une plus grande liberté au dessinateur, Champagne disposant de l’espace pour situer la sculpture dans son environnement architectural. Si l’on désigne de 1 à 4 les plans du prologue du film, et de A à E ceux de son épilogue, on observe que le cinéaste reprend la planche II pour son plan 4, et la planche III pour ses plans B et C. L’aboutissement de son prologue filmé est son dernier plan, l’allégorie de l’Alchimie ; en parallèle, le cœur de son épilogue se trouve être la sculpture de l’Alchimiste, avec pas moins de deux plans d’échelle différente. Si l’on a en tête les deux gravures, on se rend compte que le film repose sur deux arches ; son prologue expose le sujet de sa quête (Alchimie, titre du film), son épilogue en révèle l’incarnation dans l’alchimiste que figure la sculpture parmi les gargouilles. Grémillon lance une verticalité entre ces deux pôles : si au début du court métrage le médaillon du trumeau se trouve proche du sol, la sculpture de la fin surplombe la ville, dans les hauteurs de la cathédrale. Autrement dit, le cinéaste bâtit par son film un espace dynamique ; Alchimie est à vivre comme espace ; le film est à comprendre en tant que construction, il est cathédrale. Du porche de son prologue à la flèche de son épilogue, Alchimie est plus qu’un film, c’est une demeure sacrée. On peut avancer que Grémillon se considère comme un bâtisseur de cathédrale. Trois ans après ce documentaire, il en entreprendra un autre – Au cœur de l’Ile de France – où il citera les carnets du fameux bâtisseur médiéval Villard de Honnecourt.
Si Grémillon s’inspire de planches du livre de Fulcanelli dans ses cadres des deux figures allégoriques de la cathédrale qui l’intéresse, surtout il les recompose par son regard. Dès son premier film-essai de sa série sur l’art, Les charmes de l’existence (1949-50), il ne se contente pas de donner à voir les peintures qu’il extrait en la circonstance de l’art officiel, il construit sa mise en scène vivifiante par un tressage de points de vue portés sur ces œuvres, dont il modifie la portée avec des mouvements et recadrages qui sont autant de chemins de pensée, de chemins du regard de l’objectif, cet œil camérique, pour reprendre une expression qu’affectionne le cinéaste. Ainsi le plan 4 d’Alchimie diffère des trois premiers par sa mobilité : un zoom avant l’ouvre, un zoom arrière le referme, deux recadrages distincts complétant l’annonce de la construction entière du film : d’abord un prologue, puis deux parties, enfin un épilogue. Les recadrages mettent en relief deux détails de l’allégorie : d’abord les deux livres – l’un ouvert, l’autre fermé – que tient de sa main droite le personnage féminin, d’autre part l’échelle aux neuf degrés posée sur sa poitrine, entre ses genoux. Cette façon de progresser dans le bas-relief par la vertu d’un regard qui distingue et révèle signe la mise en scène grémillonienne, qui est apprentissage du regard – toujours il s’agit d’agrandir le monde, c’est-à-dire d’y voir mieux, sans les œillères de la convention. D’où, à l’inverse, le rôle du passant contemporain dont le cinéaste suit la démarche sur le parvis de la cathédrale, en début et fin du film : seulement préoccupé par l’inessentiel de son quotidien, le passant ne lève pas les yeux et, après une brève pause, reprend sa route, sa routine. En costume cravate sombre, serviette de cuir à la main, l’homme ordinaire de 1951 marche machinalement. Ce passant, c’est aux yeux du cinéaste l’homme moderne, c’est-à-dire l’homme sinon aveugle, du moins inattentif ; celui qui ne regarde pas.
Accompagnant les deux passages du personnage à côté de Notre-Dame, le commentaire du cinéaste est révélateur. Au prologue : « Un homme marche seul, n’ayant pour compagnie que son ombre. Dans sa tête des mots bourdonnent : certains lui sont familiers, d’autres, lettre morte. Il vient d’entendre : AL-KHE-MIA. AL-CHI-MIE. Ces trois syllabes n’évoquent rien, sinon une pierre philosophale qui ne lui en dit guère plus. Si cet homme avait levé la tête et regardé tout droit devant lui, il aurait trouvé réponse à son énigme sur le grand porche de Notre-Dame de Paris ». À l’épilogue :
Et si, revenant à notre point de départ, l’homme qui entendait ALCHIMIE levait la tête jusqu’aux Galeries de Notre-Dame, il y verrait l’image d’un vieux maître, d’un Alchimiste, d’un philosophe penché sur le monde, pour trouver la vérité qui conduit le sage ouvrier au terme de son labeur3.
Conjugué au conditionnel passé, le prologue est pessimiste, témoignant d’une possibilité non saisie : le quidam n’a pas levé la tête ; lui qui passait sur le parvis de la cathédrale n’a pas eu un regard pour la façade du monument médiéval, porteuse d’une science, d’une sagesse dont l’homme pressé du vingtième siècle aurait bien besoin. L’épilogue se veut moins sombre ; l’emploi du conditionnel présent entrouvre une porte ; et si l’homme levait un jour la tête ? Cet homme, le cinéaste ne l’identifie-t-il pas au public de cinéma ? Ce spectateur entrera peut-être un jour dans une salle où se trouve projeté un film de Grémillon. La cathédrale elle-même ne serait-elle pas une salle de cinéma, dans l’imaginaire du cinéaste ?
À l’opposé du passant profane qui passe sans regarder, sans écouter le message de la cathédrale, Grémillon place un personnage de pierre, un vieux maître, « un philosophe penché sur le monde, pour trouver la vérité qui conduit le sage ouvrier au terme de son labeur »4. Le cinéaste montre l’Alchimiste de Notre-Dame comme celui qui voit, qui scrute la vérité du monde. S’il ne reprend pas dans sa conclusion les termes de Fulcanelli pour décrire la statue de l’Alchimiste de la cathédrale, il ne les a pas moins en tête ; les voici :
Le savant, serré dans la cape légère du laboratoire, s’appuie d’une main sur la balustrade, tandis qu’il caresse, de l’autre, sa barbe abondante et soyeuse. Il ne médite pas, il observe. L’œil est fixe ; le regard, d’une étrange acuité. Tout, dans l’attitude du Philosophe, révèle une extrême émotion. La courbure des épaules, la projection en avant de la tête et du buste trahissent, en effet, la plus forte surprise5.
L’Alchimiste sait voir. Sa pensée passe par la vue – il observe. Grémillon s’attache à son regard – d’une étrange acuité. Voir ou ne pas voir, telle est bien la question pour le spectateur, celui que Grémillon nomme le regardant. Préparant ce qui sera son dernier film, il jette ces notes où, pensant au public de son nouveau documentaire, il retrouve ce dilemme :
Il faut que le regardant accepte l'élan poétique qui fait naître ces images d'une nouvelle cosmologie de l'humain. Pour celui qui le refuse, qui n'accepte pas l'éveil ou le départ, pour ceux dont la raison a besoin de parapets ou d'expériences rassurantes, cet agrandissement du monde reste vain, obscur et dénué de sens6.
Face à une peinture d’André Masson comme devant Notre-Dame de Paris, la question est d’accepter l’éveil de l’esprit. Grémillon place sur le même plan l’édifice religieux et la toile surréaliste : à ses yeux de poète, donc d’initié, ce sont là autant d’œuvres conçues comme un agrandissement du monde. L’expression rend compte de la poétique du cinéaste. Chez Grémillon, le regard change ainsi de statut et de portée. Le cinéaste a repris la planche II de Julien Champagne, en promenant son regard parmi les signes de l’allégorie de pierre ; comment procède-t-il avec la statue de l’Alchimiste de Notre-Dame, en référence à la planche III ? Il opère autrement. Cette fois, il confronte deux échelles de plans fixes : l’Alchimiste est découvert avec la ville à ses pieds, prise en plan général ; le second plan se rapproche de l’Alchimiste, maintenant en plein ciel, sur fond de nuages. On semble être passé du paysage au portrait, mais Grémillon suggère le lien entre les deux échelles de plans : le paysage – le monde – vit en celui qui le scrute et y participe par les vertus du regard poétique, celui du voyant. Ce regard réserve en la circonstance une surprise de taille : Grémillon a inversé l’image de la statue de l’Alchimiste, par rapport à la planche III du Mystère des cathédrales. Alors que les deux plans pris sur Notre-Dame montrent dans le film le personnage sculpté tourné vers la gauche, la planche de Julien Champagne le présente tourné vers la droite : les profils s’inversent. Cette inversion s’accompagne d’un changement de décor : dans la gravure l’Alchimiste est relié à la cathédrale quand le film le montre en plein ciel. Cet envol se réfère au plan programmatique concluant le premier long métrage de Grémillon en 1928, Maldone. On y voyait le fuyard galoper en plein ciel, un ciel rêvé qui était un reflet redressé pris dans l’eau du canal. Cette rétro-réflexion optique signait l’écriture magique du cinéaste. Par les moyens du cinéma, on pénétrait alors dans une autre dimension. Les deux plans de l’Alchimiste en fin du documentaire de 1951 s’inscrivent dans une logique poétique du même ordre : redoublée et inversée, la planche fulcanellienne se trouve aussi déplacée en plein ciel, par la grâce d’une transposition. Cette idée de reflet – l’image du philosophe penché sur le monde se trouvant inversée par rapport à la planche de l’ouvrage – concluant Alchimie mène au premier plan du documentaire, que nous n’avons pas encore évoqué. Un plan qui nous apparaît comme le plus beau jamais consacré à une cathédrale au cinéma.
C’est un plan général en plongée sur une place parisienne où se croisent des piétons, dont certains lisent leur journal tout en marchant, tandis que circulent autour de la petite place cyclistes, voitures et camionnettes, avec en fond la perspective d’un quai animé. La circulation automobile ainsi que les vêtements des passants, tout indique la contemporanéité, tout rappelle que la vue a lieu au présent ; ces véhicules et ces êtres sont de notre temps. La voix de commentaire incite à rechercher lequel de ces passants est le héros involontaire du film qui s’ouvre : « Un homme marche seul, n’ayant pour compagnie que son ombre. Dans sa tête des mots bourdonnent : certains lui sont familiers, d’autres, lettre morte »7. Posées sur le premier plan, ces deux phrases dites dans le silence – ni bruit ni musique dans ce film d’ascèse – ont leur importance, sans qu’on s’en doute encore. La voix dirige l’attention sur l’ombre infime de l’homme, ainsi que sur ses pensées où l’actuel, le familier, côtoie l’inactuel, la « lettre morte ». Mine de rien, tout est déjà là, d’une autre présence aussi essentielle que dérobée au regard hâtif, une présence qui dépasse le présent, une présence presque absente pour qui reste absorbé dans l’écume de l’instant : l’ombre immense de la façade de Notre-Dame. Vaste silhouette silencieuse, avec le dessin projeté de ses deux tours qui tranche sur le bitume ensoleillé et découpe l’espace du parvis, la cathédrale a beau être hors champ, elle n’en est pas moins plus présente que jamais pour le spectateur, de par le cadrage choisi ; plus présente par son ombre en ce plan 1 que par la vue frontale de sa façade aux trois porches au plan 3.
Par l’élaboration subtile d’un plan, le premier d’Alchimie, sa composition remarquable tenant au cadre, à la plongée, la lumière et la voix, Grémillon affirme une philosophie de l’art qui est aussi une philosophie du temps. Ce plan d’ombre portée où Notre-Dame vibre sourdement, seul un homme ayant la certitude que le passé reste vivant a pu le concevoir. Passé présent dans ses traces matérielles comme spirituelles – un mot antique, comme Alchimie, n’est pas « lettre morte ». Vision de poète, de créateur, plus que d’historien comptable, car le cinéaste ne fait pas de la cathédrale un musée : c’est pour lui un lieu de vie, donc en mouvement. Son film prouve qu’il ne fige pas le monument dans un seul de ses états antérieurs. Son regard sur Notre-Dame de Paris est celui d’un homme de son temps, qui a pris connaissance à vingt-cinq ans de la thèse alchimique de Fulcanelli sur les cathédrales. Regard d’un homme du vingtième siècle sur un édifice médiéval. Regard d’un homme marqué par le dix-neuvième siècle, tout autant, car il importe de rappeler que le fameux médaillon portant allégorie de l’alchimie, au trumeau du portail central de la cathédrale, ne date pas du Moyen Âge mais se trouve être – comme d’ailleurs la statue de l’alchimiste – une création de Viollet-le-Duc au mitan du dix-neuvième siècle ! Féru d’ésotérisme, le restaurateur de Notre-Dame doit lui-même beaucoup à Victor Hugo et à Notre-Dame de Paris où l’on croise l’alchimiste Claude Frollo. Roman que cite Grémillon lorsqu’il entend évoquer le sens des cathédrales médiévales dans son documentaire de 1954 Au cœur de l’île de France. Toujours à la voix de commentaire, le cinéaste s’exclame : « Qui ne serait sensible à la grandeur de cet art dans lequel les choses visibles sont le signe des invisibles ? Au Moyen âge, disait Victor Hugo, le genre humain n’a rien pensé d’important qu’il ne l’ait écrit dans la pierre »8. Discrète profession de foi du cinéaste qui condense en deux phrases ciselées, où chaque mot est pesé, son idéal de bâtisseur de cathédrale de pellicule. Le terme de grandeur renvoie à l’impression du film sur son public, telle que la conçoit le cinéaste, et s’apparente de près à l’effet produit par une cathédrale. Quant à la définition d’un art dans lequel les choses visibles sont le signe des invisibles, il s’applique autant à la langue rare de sons et d’images que parle couramment le cinéaste, qu’à la symbolique des cathédrales. Il s’agit d’écrire dans la pierre, de prendre la mesure de l’acte cinématographique ; la formule évoque aussi l’idéal d’un art sur lequel le temps destructeur n’aurait pas de prise ; pour un filmeur lucide qui sait écrire sur du sable, un tel acte de foi tient de l’héroïsme. Le cinéaste modifie à peine le texte d’Hugo, que voici :
On est amené à ceci : que l’architecture a été jusqu’au quinzième siècle le registre principal de l’humanité, que dans cet intervalle il n’est pas apparu dans le monde une pensée un peu compliquée qui ne se soit faite édifice, que toute idée populaire comme toute loi religieuse a eu ses monuments ; que le genre humain enfin n’a rien pensé d’important qu’il ne l’ait écrit en pierre. Et pourquoi ? C’est que toute pensée, soit religieuse, soit philosophique, est intéressée à se perpétuer, c’est que l’idée qui a remué une génération veut en remuer d’autres, et laisser trace. Or quelle immortalité précaire que celle du manuscrit ! Qu’un édifice est un livre bien autrement solide, durable, et résistant !9
Les affinités du cinéaste avec la civilisation médiévale ont pris racine dans sa sensibilité d’homme du vingtième siècle ; nourri des rêves du dix-neuvième siècle, il est né en 1901. Récurrente dans son œuvre, la figure de la cathédrale n’est pas chez lui indice d’un passéisme stérile mais signe ardent d’une pensée vivante, d’une poésie toujours renaissante. Poésie qui se nourrit d’éléments réels, car Grémillon ne trahit pas le monde médiéval lorsqu’il le recrée, il s’en inspire en le prolongeant. Il met l’accent sur la valeur et la persistance des conceptions médiévales qui irriguent à ses yeux notre imaginaire. Au-delà de l’ésotérisme d’un Fulcanelli à l’orée du vingtième siècle ou du romantisme d’un Hugo et d’un Viollet-le-Duc au dix-neuvième, Grémillon puise avec intelligence et respect dans l’histoire de l’art médiéval. Il y trouve nombre de modèles pour son métier de cinéaste. Dans son documentaire Au cœur de l’Île de France, il s’inscrit avec discrétion dans une filiation spirituelle avec les représentants de l’art gothique français, que ce soit les bâtisseurs de cathédrale, tel Villard de Honnecourt – « un architecte remarquable du treizième siècle », dit-il en posant sa belle voix sur un banc-titrage ascensionnel, suivant le croquis d’une flèche de cathédrale figurant dans le précieux album – ou avec la foule innombrable de ceux qui y inscrivirent des images, en relief ou pures surfaces, de pierre ou de verre : ce monde inventif de tailleurs de pierre et de verriers, ces imagiers – terme médiéval élu par Grémillon, au point qu’on peut le considérer dans ce contexte comme équivalent à celui de cinéaste. Dans la cathédrale œuvrent les imagiers, comme dans les studios créent les cinéastes. Et c’est le travail qui ennoblit, qui sacralise ces lieux. Écoutons la voix de Grémillon évoquer l’art gothique : « Dans ce système nouveau apparaissent une vigueur, un élan, une fécondité inventive que traduisent les qualités d’un travail fait de main d’ouvrier »10. La main de l’imagier, voilà qui enchante le cinéaste.
Si Au cœur de l’Île de France s’ouvre par les ossuaires des catacombes parisiennes, recueillant les restes de générations où se mêlent anonymes, politiques et artistes illustres, succèdent bientôt des gravures de cathédrales, façon de reprendre l’idée du prologue d’Alchimie : le passé n’est pas mort, les œuvres – architecturales et autres – le prouvent vivant. Grémillon enchaîne les mouvements verticaux : jusque dans son banc-titrage, le cinéaste compose ses films comme des cathédrales aspirées par le ciel. Chaque plan précise son évocation d’un espace sacré habité de figures végétales, animales et humaines. Si les vitraux de Chartres le retiennent, c’est qu’ils le rattachent à son premier film – il n’avait que vingt-deux ans, et si mûr déjà. Imagiers aussi, les compositeurs dont Grémillon donne à entendre les cathédrales invisibles ; images sonores à l’unisson des splendeurs architecturales qu’il ordonne pour en révéler l’harmonie cachée, celle de l’esprit français qui se trouve être le fil rouge de ce sobre film-essai condensant tant de siècles de créations, du douzième au dix-neuvième. Pour le cinéaste, les artistes forment une suite d’imagiers par-delà les siècles, imagiers reliés par « cette longue chaîne d’audaces qui constitue l’art français » : enlumineurs, graveurs, peintres… et Grémillon de surprendre art gothique et impressionnisme se tendre la main.
C’est la grande leçon de ces documentaires d’exception : pour Grémillon le temps se conjugue, le passé irrigue le présent qui en révèle à son tour les courants vigoureux. La cathédrale est le signe visible de ces flux et reflux de l’océan temporel. Le titre d’un de ses derniers films est ainsi à prendre à double sens : la Maison aux images (1955) renvoie certes à un atelier d’impression en taille-douce où opèrent artisans discrets et artistes de renom, c’est également une cathédrale cachée, un lieu rendu sacré par le travail de ces imagiers contemporains ; une cathédrale qui est chapelle de l’esprit, comme apparaîtra par la suite l’atelier provençal d’un André Masson, chapelle à l’abri des regards profanes, atelier que Grémillon filmera comme un théâtre sacré, magique, où se rejoue un rite élémentaire au sens propre. Et ce n’est pas seulement le lieu du travail de l’œuvrier qui sera perçu comme cathédrale, l’œuvre cinématographique elle-même le sera tout autant. Déjà l’atelier mental d’un Goya, dans les Désastres de la guerre (1951) et l’exploration par Pierre Kast et Jean Grémillon de ses eaux-fortes insoutenables restées longtemps inédites (elles ne seront éditées que plusieurs décennies après la mort du peintre), se trouve ressenti comme un espace imaginaire d’ordre sacré. Après un funèbre roulement de tambour, Les Désastres de la guerre s’ouvrent de fait par un saisissant portique sonore composé par Grémillon pour un orgue terrible et hiératique : façon pour le cinéaste de signifier que ce film puissant est cathédrale, une cathédrale de pellicule aussi imposante qu’une cathédrale de pierre. Imagier du vingtième siècle, Grémillon écrit dans la pierre de son temps, qui est aussi le nôtre, la pierre d’images et de sons. Austères et fraternelles, ses cathédrales renaissent à chaque projection.
Entre esprit médiéval et contemporain, les lieux sanctifiés par une création toujours recommencée qu’explore Grémillon sont autant d’ateliers d’imagiers. Le grand film de son retour au documentaire, entrepris en 1944 sur les ruines encore fumantes du Débarquement anglo-américain (Le six juin à l’aube) pose avec force cette équation première entre passé et présent. Dix ans avant Au cœur de l’Île de France (1954), Grémillon intègre déjà du banc-titrage vertical de gravures de cathédrales à sa présentation d’un Normandie heureuse, d’avant la guerre. Il alterne vues de nature et d’architectures souvent religieuses, dans cette introduction paisible aux accents personnels, puisqu’il y intègre un plan de l’abbaye de Cerisy-la-forêt, la commune où résident ses parents et où il aime à se rendre. Au même titre que les richesses naturelles, les édifices religieux sont compris comme éléments de vie ancestrale de ce pays. Un geste sonore va être porteur de sens. Grémillon enchaîne deux musiques sur deux séquences donnant à voir les travaux agricoles traditionnels puis modernes – traite, labours, semis et moissonnage, puis battage. Deux musiques d’allure contrastée : la première est un chant médiéval a capella (une reverdie du treizième siècle, Ce fut en mai de Moniot d’Arras), la seconde, sur la batteuse, une composition orchestrale avec chœur, d’écriture contemporaine (on songe à Honegger). Révélateur de la philosophie du cinéaste, le geste de mise en scène musicale est le suivant : il s’agit en fait de la même mélodie, que le cinéaste-compositeur (il signe la partition de son documentaire) présente sous deux aspects : médiéval puis contemporain. Il n’y a donc pas opposition mais lien organique entre les époques ; ainsi la cathédrale de Grémillon est à la fois de son temps et du nôtre, passé et présent formant l’avers et le revers d’une même réalité inépuisable.
Dans Le six juin à l’aube églises et cathédrales représentent le stade ultime de la civilisation, que la guerre aveugle anéantit. La grande idée de ce vaste poème funèbre, cette ample méditation sur la guerre comprise comme agent monstrueux du néant, est que les édifices religieux – église, abbayes et cathédrales – forment dans le paysage normand les repères vivants de l’humanité. Grémillon les montre comme des êtres souffrants, blessés, éventrés, massacrés. Le premier signe de la guerre est une flèche d’église qui s’écroule. Plus tard, il donne à voir l’abbaye d’Evrecy martyrisée, ainsi que le fantôme de l’église Saint-Sauveur de Condé-sur-Noireau, étrangement debout au milieu des ruines de la ville. Puis le clocher grêlé de l’église d’Aunay-sur-Odon, dont Grémillon va chercher le reflet dans une flaque d’eau, dans un panoramique descendant. Et l’église Saint-Malo de Valognes, en ruines. « Merveille de l’architecture romaine primitive »11, l’abbaye de Lessay semble laissée pour morte. On suit une logique poétique : vainement tendus vers le ciel, les troncs muets démembrés des forêts calcinées par les combats, ces arbres qui « ne sont plus que de tragiques signaux de détresse »12 évoquent les colonnes brisées de quelque édifice religieux renversé ; forgée par Baudelaire, l’image des vivants piliers s’impose, tandis que fait retour le chant médiéval de la campagne fertile d’avant le cauchemar, comme si la reverdie du treizième siècle se faisait acte de foi, appliquée aux ruines du vingtième siècle. Scandée par une musique devenue stridente et qui va s’épuisant, une des plus fortes séquences s’attache alors aux fragments de statues encore debout dans une église dévastée ; du visage en stuc ne subsiste qu’une partie du visage : un œil, une joue, le nez, la bouche… Révélatrice est la façon dont Grémillon introduit la scène : « Les églises, les églises cathédrales et celles de hameau […], tout n’est que cendres, poussières et fantômes »13 ; pour le cinéaste, entre la cathédrale imposante et l’église modeste, pas la moindre différence. Et il n’y a pas de hasard : lorsque Jean Grémillon s’entretient – en son direct, grande nouveauté pour l’époque – avec le charpentier résistant Victor Guérinel, il choisit le moment de l’angélus, ainsi les cloches de l’église de Saint Barthélemy se mêlent au témoignage ; façon de relier les espaces. À Caen, le cinéaste panoramique sur la ville fantôme depuis l’église Saint-Pierre, décapitée de sa flèche, surplombant les ruines. Et c’est à Saint-Lô – là même où vécut enfant Grémillon – qu’il reconstitue une procession de cercueils sur fond des ruines fumantes de l’église Notre-Dame, poignante dans sa désolation.
Ce retour à la jeunesse du cinéaste, avec les allusions intimes qui parsèment Le six juin à l’aube, incite à considérer avec attention son tout premier film de 1923, qui prouve à quel point la pensée de Grémillon s’est forgée tôt. Chartres est infiniment plus qu’une commande de la ville (même si son syndicat d’initiative s’y trouve associé), c’est un acte de foi en une culture, une civilisation. La place qu’y occupe la cathédrale de Chartres en dit beaucoup de la poétique du jeune Grémillon. Dès les premiers plans, on se rend compte que son titre véritable n’est pas tant Chartres que La cathédrale (même si le titre est déjà pris depuis une vingtaine d’années par le roman de Huysmans). Une cathédrale montrée comme un élan de l’homme vers le sacré, d’où le choix constant de la verticalité dans la mise en scène. Grémillon passe de l’horizontalité enivrante et matérielle des plaines onduleuses de blé – la terre relève dans ce contexte de l’aquatique, du maritime – aux tours dynamiques, spirituelles, de la cathédrale ; le mot de cathédrale se trouve verticalisé dans son carton, et même gothisé : tout le long du film, l’écriture gothique des intertitres renforce l’élan vertical de la graphie. Et si au générique Grémillon définit son travail comme animation, c’est que, de fait, il passe son temps et ses plans à animer l’édifice sacré, non seulement par ses choix de cadres et de montage, mais aussi par une série de caches qui viennent dynamiser l’architecture de la cathédrale. Mouvements à l’unisson de sa présentation de l’édifice : « Symbole ardent que les enthousiasmes mystiques du Moyen Âge nous apportèrent en quatre siècles »14. Cathédrale vivante : non seulement le cinéaste peuple ses plans de quelques passants, mais lorsqu’on pénètre dans l’édifice, par le porche central du portail sud, les deux portes s’ouvrent toutes seules, comme par magie : l’édifice respire ! Le même plan conjugue la lumière du dehors, celle qui illumine les sculptures, et celle du dedans qui fait vibrer les vitraux dans la paix intérieure de la pénombre. Le voyage que le cinéaste entreprend par son montage est cohérent : après l’ange au cadran vient le pavillon de l’horloge. Un autre ange, celui qui surplombe la toiture, donne à Grémillon l’occasion d’un cache mobile du plus bel effet vertical. Les cartons de texte qui succèdent à cette figure visuelle inédite sont essentiels : « Et on ne sait ce qu’il faut admirer le plus… ou des longues verticales qui gravissent le ciel… ou de l’angoisse universelle qu’expriment certaines figures… »15. Et de montrer le saint Jean-Baptiste portant l’agneau, sculpture du tout début du treizième siècle, de la façade nord « … ou de l’austère grandeur du symbolisme architectural… ou du silence et de la quiétude que répandent les vitraux… »16. Et de contempler la rosace du jugement dernier, la plus ancienne de la cathédrale. La pénombre de l’intérieur de l’édifice semble celle d’une salle de cinéma. Rédigés par le cinéaste, ces cartons sont révélateurs. D’un côté le motif obstiné du film, l’élan vers le ciel, dans une verticalité constante ; de l’autre l’angoisse ancrée au fond de l’homme, que transcende le métier (l’austère grandeur comme idéal sublime) et qu’apaise l’œuvre accomplie (la quiétude répandue par les vitraux, sortis de mains d’imagiers).
Grémillon sort ensuite de la cathédrale, pour faire découvrir que l’édifice se trouve relié à la ville de façon organique. Il s’attache d’abord aux maisons médiévales, puis étend son exploration jusqu’à la pointe du contemporain, consacrant un plan impressionnant au nouveau monument aux morts de la ville, adossé au mur d’enceinte, monument aux morts de la guerre qui venait d’être inauguré le 16 septembre 192317. L’éclat du monument dit sa nouveauté et suggère la blancheur de l’écran de cinéma. Chapitrée Au long de la ville-basse, la dernière partie du film expose la façon dont le jeune cinéaste conçoit l’image cinématographique. Il se livre alors à d’étonnantes variations sur le thème du reflet, à partir de l’image de la cathédrale. Fondé sur la figure du pont, donc du passage, le plan le plus mobile est précédé d’une vue des deux tours de la cathédrale, en surcadrage sous la porte Guillaume, aperçue de côté dans un plan précédent. La composition du plan du pont Bouju, ce pont de la porte Guillaume, se révèle très élaborée. Grémillon part en plan fixe du reflet flou des flèches de la cathédrale dans l’Eure, passe à une mise au point qui rend net le reflet de la cathédrale tout en provoquant l’équivalent d’un léger zoom arrière, puis redresse le plan par un panoramique bas-haut qui, abandonnant rivière et reflet, cadre en fin de parcours la cathédrale en surplomb de la ville.
Que comprendre de cette invention plastique, en presque fin de ce film en forme d’ode à la cathédrale ? Le premier plan, celui de la porte Guillaume, semble interdire l’accès à la vue de la cathédrale. Surcadré par la sombre entrée voûtée de la porte fortifiée, le deuxième plan dessine à distance l’image de la cathédrale, comme vue par un trou de serrure vertical. Les flèches de la cathédrale apparaissent ensuite inversées, près du vieux pont Bouju, avec leur reflet dans la rivière d’abord flou puis rendu net par la mise au point de l’objectif de la caméra, cette révélation indirecte de l’édifice faisant place à sa découverte directe, au fur et à mesure de la montée du panoramique vertical qui s’extrait de l’eau de la rivière pour s’en aller gagner les hauteurs de la cité. Cette étonnante alchimie visuelle s’organise autour de l’image de la cathédrale – d’abord cachée, puis mise à distance par un encadrement vertical, puis inversée dans un reflet flou, puis révélée nette par sa mise au point, enfin découverte par un mouvement de caméra vertical qui s’accorde au mouvement des flèches de l’édifice vers le ciel. Comme si Grémillon suggérait que le cinéma est affaire de métamorphose, de révélation, et qu’il fallait en passer par l’image oblique du reflet pour accéder ensuite à la vision directe, de face, de l’objet du regard – en ce cas, cet élan de pierre mystique qui rompt avec la plaine.
Grémillon varie la figure du reflet dans les scènes qui suivent, reliées par l’image de la rivière. Il panoramique vers le bas depuis des maisons en bord de l’eau jusqu’à leur reflet seul, qui de net se fait flou, enchaîné en fondu à un autre reflet aussi flou qui devient net puis se relève par la grâce d’un panoramique symétrique vers le haut, révélant un autre bord de la rivière. Mise en reflet, mise au flou et mise au net, mouvement vers le bas qui efface la réalité et vers le haut qui la révèle de façon directe : autant de figures revenantes dans l’épilogue de Chartres. Pour en mesurer la portée, sans doute faut-il se référer à la façon dont Grémillon a filmé la cathédrale tout du long de son documentaire : un élan vers le ciel qui arrache l’homme à ses tourments intérieurs, un apprentissage de la rigueur qui mène à la sérénité. Une transmutation de l’homme, par les quatre Éléments. Pour le cinéaste, les cathédrales sont des demeures philosophiques dont il s’agit de déchiffrer les arcanes pour maîtriser l’art – celui du cinéma, en ce cas. Art magique, qui inverse la réalité familière pour révéler par sa mise en reflet une dimension cachée. Dès le début de la carrière du cinéaste, la cathédrale est désignée comme le lieu condensant la sagesse ancestrale qui se transmet à l’homme actuel de bonne volonté, l’homme qui accepte de voir.
[1] Commentaire du film lu par le cinéaste.
[2] Fulcanelli, le Mystère des cathédrales, Paris, Schemit, 1926.
[3] Commentaire du film lu par le cinéaste.
[4] Commentaire du film lu par le cinéaste.
[5] Fulcanelli, le Mystère des cathédrales, Paris, Schemit, 1926.
[6] BNF, Fonds Grémillon, JG 26 (014), p. 9-10.
[7] Commentaire du film lu par le cinéaste.
[8] Commentaire du film lu par le cinéaste.
[9] Victor Hugo, Notre-Dame de Paris, Paris, Renduel, 1832, livre 5, chapitre 2.
[10] Commentaire du film lu par le cinéaste.
[11] Commentaire du film lu par le cinéaste.
[12] Commentaire du film lu par le cinéaste.
[13] Commentaire du film lu par le cinéaste.
[14] Commentaire du film lu par le cinéaste.
[15] Commentaire du film lu par le cinéaste.
[16] Commentaire du film lu par le cinéaste.
[17] Conçu en 1919, ce vaste monument est l’œuvre de Léon Boucher, le père de l’aviatrice ; pour le futur auteur du Ciel est à vous, c’est là un beau signe.
Résumé
Dans le documentaire de Jean Grémillon Alchimie (1951), la cathédrale Notre-Dame de Paris occupe une place déterminante. C’est que le cinéaste s’appuie sur l’ouvrage de Fulcanelli Le Mystère des cathédrales (1926). Les autres courts métrages du grand réalisateur montrent une connaissance singulière du monde médiéval, que Grémillon relie de façon originale à sa perception du monde contemporain. La figure de la cathédrale et l’imaginaire qu’elle véhicule sont présents dès ses débuts de cinéaste en 1923 dans Chartres, où la cathédrale se trouve désignée comme le lieu condensant la sagesse ancestrale.
Abstract
In Jean Grémillon's documentary Alchimie (1951), the cathedral of Notre-Dame de Paris plays a key role. The filmmaker relies on Fulcanelli's book The Mystery of Cathedrals (1926). The other short films by the great director show a singular knowledge of the medieval world, which he links in an original way to his perception of the contemporary world. The figure of the cathedral and the imaginary that it conveys are present from his debut as a filmmaker in 1923 in Chartres, where the cathedral is designated as the place condensing ancestral wisdom.
Philippe ROGER
Université Lumière Lyon 2, Laboratoire Passages Arts & Littératures (XX-XXI)
CALVET, Yann, et ROGER, Philippe (dir.), Jean Grémillon et les quatre Éléments, Villeneuve d’Ascq, Presses Universitaires du Septentrion, 2019, 332 p.
FULCANELLI, Le Mystère des cathédrales, Paris, Schemit, 1926, 149 p.
GREMILLON, Jean, Le cinéma ? Plus qu’un art ! [écrits réunis par LHERMINIER, Pierre], Paris, L’Harmattan, 2010, 312 p.
HUGO, Victor, Notre-Dame de Paris, Paris, Renduel, 1832, 378 p. (tome 1), 442 p. (tome 2), 358 p. (tome 3).
ROGER, Philippe, Le Mystère de l’Œuvre : Remorques de Jean Grémillon, Lyon, Éditions du Cosmogone, 1998, 186 p.