Dans La Fille, roman autobiographique, Michèle Gazier évoque les doigts de fées de sa mère qui coud dans un atelier tenu avec sa sœur et leur père. Cette familiarité avec la couture et les étoffes, entre autres, l’a rendu sensible au travail de Leïla Menchari décoratrice des vitrines d’Hermès. Que Michel Tournier nomme reine-mage1 cette dernière et que Michèle Gazier soit un peu sorcière, comme l’interpelle un jour l’animateur de La grande librairie, et nous voici dans un conte marqué de réalisme magique. Imaginer Michèle Gazier en sorcière prête à sourire, à moins de retenir sa capacité à faire apparaître et disparaître ou à s’effacer soi-même, et que l’on pense à ses nouvelles de Sorcières ordinaires (1998), au fait que le personnage se pose la question d’échapper à son sort (Noir et or), à l’obscur, à l’énigme, voire à son simple prénom (Le Fil de soie)2. Peu importe la dualité entre cruauté rituelle de sorcière et douceur de magicienne, artifices, disparitions et effacements sont communs. Il y a des mages, qui enchantent, parce qu’elles3 savent l’obscurité de la vie, le mystère des forêts.
Entre les mages, Michèle Gazier et Leïla Menchari, il est donc une familiarité avec le monde de la couture comme terreau de rencontre, terreau intimement lié à l’univers du conte, à la manière du récit. Si le plaisir du texte tient à ce qu’il raconte comme pour les enfants qui savent déjà la fin de l’histoire et veulent réentendre ce qu’ils savent, il tient aussi à la structure même du récit, à son patron sur lequel l’écrivain vient retailler, couper des passages, accepter les chutes. Dans le chemin de la mage-couturière, une expérience des plus singulières ne peut que retenir l’attention, celle de la reprise. Michèle Gazier a en effet écrit quatre textes en lien avec Leïla Menchari : le premier Les vitrines Hermès - Contes nomades de Leïla Menchari est un court texte4 sur les vitrines que l’artiste a réalisées depuis 1975 dans la boutique parisienne d’Hermès, au 24 de la rue du faubourg Saint-Honoré. Ce livre publié en 1999 à l’Imprimerie nationale est somptueux, avec une reliure en soie, clin d’œil à la fonction de directrice du comité de la couleur de la soie assumée par Leïla Menchari chez Hermès. Le deuxième texte est un roman, Le Fil de soie, dont l’artiste décoratrice est une des dédicataires. Le troisième est publié aux éditions les Busclats en 2010 dans un catalogue hors commerce de l’exposition qui présentait une dizaine de décors reconstitués à l’Institut du Monde Arabe5. « Le texte » est selon de Michèle Gazier « un jeu de question/réponse sur les objets présentés, leur gestation et leur langage ». Enfin le dernier, Leïla Menchari, la Reine Mage, est un texte biographique pour la rétrospective au Petit Palais en 20176. Tous mettent l’accent sur l’itinéraire artistique de la créatrice, inextricablement lié à ses origines méditerranéennes et à ses rencontres. Écrit dix-huit ans après le premier, documenté au fil des entretiens conduits et entièrement soumis à relecture de Leïla Menchari, ce dernier livre atteste d’une fidélité amicale. Sans être un pur exercice de style, les variations entre les quatre textes reprisent des thèmes similaires – impressions, jardin, rêve, artisanat, conte – traités dans les genres différents que sont l’entretien, le récit biographique ou la fiction romanesque ou biographique7. Comme si, ayant ouvert une fenêtre, une brèche dans la forêt, il fallait toute cette patience pour livrer un dernier récit moins fragmenté8 qu’Orient-Express, Voyages de Leïla Menchari. Soulignons encore que cette reprise en plusieurs textes est tout à fait singulière dans la production de Michèle Gazier qui écrit régulièrement mais un seul livre sur d’autres artistescomme Grau-Garrica, Colette Deblé, Rotraut, Sophie Combres, etc.
Outre la différence générique des quatre textes, qui constituent notre corpus principal, les trois premiers apparaissent rétrospectivement comme la genèse du quatrième et dernier. Le premier est écrit avec la fluidité d’un style alerte et structuré en 6 chapitres : le parcours biographique ; la vitrine (ou trompe l’œil) et ses saisons, aux « couleurs et sonorités différentes »9 qui donnent lieu à une écriture en tableaux miniatures ; « les dessous du rêve » qui évoque le processus de composition mais aussi l’histoire d’Hermès ; « l’envers du décor » qui situe les collaborateurs, notamment les artistes Giraudon, Houtin, Rudelle, Bruet, Angélique Lefevre, et les sculpteurs César, Albert Féraud, Nic ; l’univers du conte avec ses synesthésies facilitées par l’usage de parfums dans la vitrine – ce qui relève d’une tradition théâtrale – et un épilogue. Le fil directeur sous-jacent à la luxuriance et à la saturation, perceptible dans les descriptions à la manière de miniatures orientales, est le temps immobile du conte figé dans une époque, de la vitrine inanimée, suspendue en dépit de son statut saisonnier et cyclique. Ce que Michèle Gazier nomme, non sans malice : « Un temps sans fil »10. Art de la formule magique qui fait disparaître son propre medium.
Dans ce texte, il est question du passant comme potentiel client et de ceux privilégiés qui pousseront la porte11, mais la seule occurrence du mot acheteur dans le dernier texte atteste par sa rareté du processus de sublimation auquel contribue aussi le récit. Dans le dernier livre, c’est l’intérieur de la maison d’une cliente qui sera même décrit pour son luxe. Michèle Gazier note la différence entre la vitre, simple séparation entre intérieur et extérieur, et la vitrine, dont la profondeur la fait paraître immense, en trompe-l’œil. Autrement dit, elle décortique le processus qui fait que le décor supplante la voix « discrètement distillée, par la maison Hermès ». Michèle Gazier pose le contexte pour expliquer la manière « éloquente, voire superlative ». L’objectif opératique n’est-il pas souligné par la mise en scène saisonnière du lever de rideau rituel de la nouvelle vitrine ? Alors son écriture épouse son objet, se déploie dans la luxuriance des grandes fêtes de l’hiver, citant « l’arrivée des rois mages venus d’Orient », et se plaisant à l’exubérance à l’appui de métaphores : « Dans la pénombre, elle fait briller des vagues cristallisées de sel ou de marbre qui charrient des objets de table : verres, assiettes, aux curieuses transparences »12. Pour transcrire l’univers de Leïla Menchari, elle recourt aux comparaisons avec l’univers musical : Verdi, partition, chef d’orchestre, chœur antique…
Le texte écrit pour le catalogue de l’exposition à l’IMA suit davantage une cartographie des lieux d’inspiration en neuf stations correspondant chacune à une vitrine reconstituée, posant toujours le paradoxe d’une dynamique de l’imaginaire dans un décor statique. Le mode de l’entretien par brèves questions ne donne plus lieu à des miniatures mais à des anecdotes relatées par l’interviewée. Les visuels alternent vues d’ensemble et de détails, croquis préparatoires pour sac et manteau, le détail met en valeur un motif ou un produit Hermès comme une selle. Les artisans photographiés sont au travail. La vie de Leïla Menchari n’est pas si facile à saisir, puisqu’elle la livre par anecdotes et bribes. Mais là encore, la romancière glane la matière du récit qui va offrir une densité de possibles.
Le dernier livre publié pour la grande rétrospective de 2017 affirme une volonté de narration plus distanciée, sortant du piège-vitrine, et plus intime aussi, forant le chemin de la création. Chacun des dix chapitres est ponctué des photographies plus intimes, où on voit cette fois la décoratrice au travail, sous l’objectif d’Édouard Boubat, ou dans son jardin. Les visuels sont des vues globales de chaque vitrine, ce qui favorise davantage la fusion dans le décor des produits Hermès, des bijoux pris dans la force d’un univers. La composition, la multiplication des 136 vitrines et le principe des bords perdus accentuent l’effet de luxuriance et de saturation. Le livre est à l’image de l’exposition dont la scénographie de Nathalie Crinière reconstitue des vitrines-écrins, sous le seul principe de la sublimation. Seules modifications majeures : l’absence de vitre et la présence d’assises.
Le récit n’est plus fait de nœuds mais court sur le fil chronologique. Le temps n’est plus haché en scènes mais donne à lire un continuum, un récit que je ne raconte pas ici. Michèle Gazier parvient à restituer ce à quoi la décoratrice se dérobe : le temps des pendules. Et elle substitue au temps d’un décor, celui de saisons, le temps d’un récit. En relatant une interview13 de Leïla Menchari, Michèle Gazier cherche l’origine exotique du temps suspendu dans le conte :
Les histoires que nous racontait ma tante, le soir, pour nous endormir, étaient parfumées d’ambre et de tabac. Plus loin, évoquant les siestes obligatoires : « Nous avions de petits matelas à même le sol, et des oreillers garnis de feuilles d’eucalyptus dont le bruit sec et froissé accompagnait chacun de nos mouvements d’un bruissement, tel un murmure dont le souffle parfumé caressait nos narines ». Les effluves apaisants des fleurs d’oranger de la région du cap Bon faisaient du printemps la « saison de l’oubli »14.
Voilà qui est dit, Michèle Gazier devait écrire contre, et toute contre, la saison de l’oubli.
La reprise de biographèmes concernant Leïla Menchari dans le roman Le Fil de soie consiste en l’évocation d’un univers lié à la mode en contraste avec celui d’un jardin privé. Le personnage d’Odile, certes inspiré de Chanel, se nourrit des amitiés de Menchari dans la figure triple Odon-Odile-Ahmed. Ahmed est l’ami styliste.
Dans Le Fil de soie, le personnage porte en lui cette « ambiguïté intrinsèque d’être à la fois nourri de la personne réelle […] et de jouir malgré tout d’une certaine autonomie romanesque », qui permet de « sculpter [la] personnalité dans la matière vivante du texte, d’infléchir ici, de distordre là, bref de malléer les personnes réelles qu’ils étaient au gré de [l’]imagination et des besoins de [la fiction] » si l’on en croit Jean-Philippe Toussaint15. L’écrivain belge se compare à un sculpteur, quand Michèle se voit en couturière. C’est une des raisons pour laquelle cette figure de Menchari la fascine. Au sens propre, Menchari a imaginé les manteaux de cuir brodés de Maria Felix, sollicité l’artiste Angélique Lefevre sculpteuse d’organdi. Michèle Gazier redessine sa propre biographie au fil de ses rencontres avec la décoratrice :
C’est ce travail fait avec Leïla qui m’a promenée dans tous les services de la maison, qui a réveillé mes souvenirs d’enfance et notamment ceux concernant le travail de ma mère sur les soies des smokings et les gilets de soie qu’elle faisait pour les accompagner. C’est le travail qui appelle le souvenir et non l’inverse, dit-elle16.
Milan Kundera distingue la biographie du roman : la valeur de la première « consiste dans la nouveauté et l’exactitude des faits révélés », celle du roman « dans la révélation des possibilités jusqu’alors occultées de l’existence en tant que telle »17. Ouvroir de possibilités, le mot révélation n’est pas anodin, au sens littéral de lever le voile. Mais Le Fil de soie envoile aussi18. Les mots servent d’écran19, de détour20 ou d’écrin du silence21. Un récit ne dévoile pas toujours et systématiquement un secret, secret de Polichinelle dans certains romans, puisque Michèle Gazier nous livre ses ficelles. Par exemple, dans Le Fil de soie, le lecteur sait tout d’avance du secret d’être juif, et dans Le Merle bleu, la folie à venir est annoncée. Une romancière sait la forêt littéraire et file sa vie entière sur un métier à livres, par reprises. Mais ce ne sont pas des secrets liés à la biographie qui nous intéressent, qu’ils se réfèrent à Michèle Gazier ou Leïla Menchari. Rien de commun ici avec le secret si récurrent dans les romans et nouvelles, parce qu’il ne ressortit pas à une blessure individuelle, à un trauma historique, mais parce que demeure le secret de la création. L’expression peut prêter à sourire, tant elle est convenue, voire naïve. Et pourtant… Si Michèle Gazier reconstitue si patiemment le parcours biographique de Leïla Menchari, fait silence sur sa vie intime, elle revient par quatre fois interroger les mécanismes de sa créativité.
Michèle Gazier tente de répondre à la manière de l’artiste tunisienne de concevoir des dioramas ; plutôt que de dévoiler, elle invente des dispositifs pour voir à travers, à son tour. Pour tenter de passer de l’autre côté de la vitre, son écriture d’accompagnement de Leïla Menchari n’est jamais effraction. Elle passe son aiguille par le chas dans le tissu épais de la vie.
Mais dans le roman Le Fil de soie, elle opère un geste de réappropriation critique de l’illusion, pointant que c’est de l’autre côté de la vitre que nous vivons le spectacle social de notre vie.
Nonobstant la fidélité sur des années qui rend la personne familière pour l’écrivain, la conceptrice des vitrines d’Hermès est d’abord un personnage, au cœur d’une préoccupation de Michèle Gazier : la création plastique.
Alors reprenons, je reprise à mon tour un motif de l’histoire en passant par le chas d’un essai écrit par Michèle Gazier sur J. B. Pontalis, « L’âtre et la fenêtre » : « La fenêtre, c’est d’abord un cadre à travers lequel on aperçoit des échappées de paysages et de visages, des fragments de monde ». Pour Leïla Menchari, cette fenêtre est celle d’un trou dans le paysage ; tout part d’un jardin. Et Michèle Gazier de citer René Char dans Orient-Hermès, « Dans nos jardins se préparent des forêts »22.
Les variations commencent d’un texte à l’autre pour évoquer ce trou, ce passage vers un jardin23 quand Leïla, enfant, est envoyée remettre un message au voisin.
Le début du chapitre se réfère à Alice au pays des merveilles. La scène24 est rejouée dans Le Fil de soie : « Elle aurait pu utiliser la porte grillagée ». Dans ce roman, le lecteur croise aussi une lingère, « broda[nt] des jours de Venise qui, dans son rêve, étaient de minuscules fenêtres ouvertes sur des mondes infinis »25. Un autre souvenir de Leïla Menchari : une fenêtre appelle une liberté, dont ne jouissent pas les « hommes captifs qui tendaient à travers la fente des mains usées, ridées – des mains de pauvres – et qui la remerciaient par des bénédictions en arabe »26.
Dans Orient-Express, Voyages de Leïla Menchari, la décoratrice est guidée par les questions de Michèle Gazier sur les liens qui unissent ses vitrines et ses origines, son jardin d’Hammamet, comme « source essentielle de mon imaginaire ». L’archéologie des inspirations revient toujours à cette essence, « L’imaginaire de la Reine Mage s’enracine en effet dans une histoire familiale qui a toujours tourné autour d’une oasis »27.
Une fois entrée chez Hermès, elle va créer ses fameuses vitrines saisonnières. La vitrine fonctionne comme un diorama fantasmé, exotique, pour littéralement voir à travers. Les vitrines sont inspirées de ces toiles peintes en fond de diorama avec illusion et trompe-l’œil qui présentaient des irruptions volcaniques avec un grand sens du spectacle. Le bestiaire de Menchari – cheval, licorne, rhinocéros hybridé d’une corne d’or, autruche – n’est pas sans rappeler les animaux taxidermisés au muséum qui, dès 1920, reconstitue des écosystèmes animaliers. La légende des cerfs est une vitrine-diorama exemplaire, un extérieur-intérieur. Rappelons que lorsque Leïla fait la connaissance de Pierre Giraudon, il « travaille pour le Muséum d’histoire naturelle qui a pris l’habitude de lui commander toutes sortes d’inclusions en résine : insectes »28. Elle lui commanda « des inclusions de flacons de parfum, des cornes de cerf transparentes, des feuilles de chou, des écorces, une grotte fabuleuse, un cheval de cristal… »29.
Le motif de la vitre nécessaire aux vitrines de Leïla Menchari ne s’inscrit pas à contrepied de la traversée des frontières. L’objet séparant, mettant le spectateur à distance, donne en effet à voir des inspirations des cultures tant indiennes, arabes qu’européennes, mettant en valeur la maroquinerie ou les foulards Hermès.
Cette vitrine-monde construit l’illusion, le fantôme d’une présence absente. Aucun effet de réel n’est bien sûr visé, le fantasme est parfois très cinématographique – une cabine de plages comme un boudoir, des jeux de glace à la Cocteau (Contes de chat, 1986), visages arcimboldesques – ou réminiscence picturale – vague de marbre japonaise d’Hokusai ou rhinocéros blanc de Dürer.
Dédié à des sujets comme la chasse, le diorama de curiosités préserve paradoxalement une invisibilité. La créatrice fait tout pour qu’on oublie que ses vitrines mettent en avant un produit Hermès en les transformant en scène où des objets scénographiques retiennent davantage le regard. Car ce ne sont pas de simples produits qui sont exposés, mais un univers à part entière de boîtes à histoire et à imaginaire, comme on le dit d’une boîte à musique. Cette autonomisation suppose une signature forte ; la création de Leïla Menchari conjuguant les contrastes, les matières, à la fois son univers oriental et celui des classiques d’Hermès, – cuir et soie. La reine-mage absorbe Hermès dans sa signature. C’est l’effet du texte dans le dernier livre, quand la photographie des vitrines, elle, rappelle que par un changement d’échelle un sac peut parfois prendre une place démesurée.
Ces vitrines sont bien loin des premières scènes de mannequinat de Leïla Menchari. La présence humaine y est au retrait, le plus souvent en fond de salle et au filtre d’un art. En voici une liste exhaustive sur l’ensemble des photographies : la sculpture (Égypte, femme au jardin), la mosaïque (femme) ou la peinture (femme, cavalier, couple oriental à deux reprises, couple moghol, portrait de femme, ou indienne sur bas-relief, les yeux baissés sur une fleur). Rares sont les peintures de groupe (Éloge de la soie, hiver 1989 et Les Soleils d’or, hiver 1994), et exceptionnelle la figuration d’une égérie : Maria Felix (2009). Si le filtre des arts existe bel et bien, avec Durer, Cocteau, Visconti, la référence occidentale fait presque figure de repoussoir, et sûrement d’exception dans l’ensemble des vitrines.
Un petit détour par le rapport de Michèle Gazier aux figures artistiques religieuses nous permet ici de croiser leurs communes inclinations qui se rencontrent pour transformer ou évacuer les jalons de l’histoire de l’art occidental, dont les expressions de la souffrance. Les mages feraient bien disparaitre les Vierges, chacune à sa manière.
Michèle Gazier a évoqué les arts plastiques à l’occasion de critiques sur les beaux livres cadeaux de Noël, et ils sont très présents dans ses romans : le noir et blanc de Courrèges dans Le Fil de soie ; les cheveux de lumière rousse sur les tableaux flamands ou vénitiens dans ses Sorcières ordinaires ; le regard accroché « au vert de Lettera amorosa » (1963) de René Char dans Le Merle bleu30 ou à l’oiseau noir sur fenêtre et fond vert de Braque vu à la Fondation Saint-Paul-de-Vence. Sans faire l’inventaire romanesque, attardons-nous sur le recueil Nativités (1995). C’est moins le « sujet » que la colorimétrie qui la retient ; le recueil est à contre-titre sous ces airs de références à la peinture. Le livre botte en contrechamp les scènes de « nativités onctueuses et glorieuses de l’imagerie » pour préférer « saisir l’ordinaire de l’événement »31. La traversée de la mémoire picturale n’aura pas lieu, l’imagerie tombe dès la première page dans l’album de famille, dans le champ de la sociologie des gens ordinaires et des femmes, soit celles qui font les albums. Ainsi d’une comparaison à partir d’une photographie d’une mère et sa fille : « Elles sont serrées l’une contre l’autre comme l’enfant Jésus et la Vierge Marie »32, l’image reste en plan, sous l’œil de la première née, l’aînée, jalouse, dépossédée. La peinture ne traverse pas nos vies, elle n’en est qu’un miroir de conventions. La peinture est enfermée dans sa dignité, dans le genre de La nativité. Quand le récit, lui, « replace »33 les fausses couches, avortements ou humiliations chez le gynécologue, dans l’histoire des femmes. Pourquoi la peinture ne fait-elle pas le poids ? Parce que le récit a sa puissance : on y est traversé des récits des autres34. Comme l’écrit Michèle Gazier, « nous nous avouons nos craintes ou notre amour en racontant des histoires qui n’arrivent qu’aux autres, et qui bien sûr sont aussi les nôtres ou celles que nous redoutons ». Les toiles de maîtres sont pourtant bien narratives : « les saintes, les mystiques sur les tableaux anciens ont cet air ahuri entre enfer et extase qui me semble être celui que j’ai dans ces moments de souffrance et de résistance »35. Des femmes « enceintes partout. J’en ai même trouvé dans les collages de ce jeune peintre, Holder »36. « Un œil averti aurait remarqué que de nombreux bébés tout droit sortis de ces vieux catalogues évoluaient tels des anges de Mantegna habillés par Natalys ou Prénatal dans des paysages de ruines métalliques traversés d’éclairs bleus »37. Holder peint l’intimité des « corps féminins » dans l’attente de leur enfant : « les tableaux de cette période sont parmi les meilleurs »38. Dans la diégèse, un des personnages, Emma, est peintre. Même elle voudrait une exposition sur les nativités. On voit donc quand même le retour du « sujet », mais sous l’angle de l’obsession. Comme pour Nativités, l’anthologie Le Goût des mères39 présente pour premier texte « la figure de la mère qui pleure son fils », soit la piéta revisitée par Jean Rouaud élevé dans la religion catholique. Le second texte de la même anthologie sur la mystique Marie de l’incarnation est de Jean-Noël Vuarnet.
Les sources de Leïla Menchari ne sont pas des figurations humaines mais des impressions sensorielles, couleurs, saveurs, senteurs. Des influences esthétiques sont certes convoquées : la médina de Tunis des années 30, avec ses inspirations orientales arabes, et à partir du XVIe siècle les influences espagnoles d’Italie méridionale, ottomane, et la ville coloniale bâtie par les Français qui montre un certain nombre de monuments soumis aux critères de l’Art nouveau (1900) ou de l’Art Déco (1930). Mais Michèle Gazier s’arrête sur le rapport qu’a eu Leïla Menchari avec la mer, particulièrement à Hammamet, où elle passait ses étés : « C’était le Hammamet qui révéla Paul Klee à la peinture et qui a dû apporter à Leïla Menchari la franche subtilité du chromatisme qu’elle mit au service de ses décors ».
Ce qui fait poncif esthétique occidental est tenu à distance par l’écrivain comme par la décoratrice. Les vrais ancrages sont l’écrin : le jardin avec 78 occurrences ou la grotte. Voici un souvenir de Leïla Menchari que Michèle Gazier écrit comme une scène primitive, le désir y supplante la figure par un simple rituel :
Le dessin est le fil rouge qui depuis l’enfance l’a conduite sur les chemins de la création. Tout a commencé très tôt, quand elle n’avait que treize ans. La petite musulmane qu’elle est alors a eu l’idée de pousser la porte d’une église. Elle a bien sûr fréquenté la chapelle de l’école catholique, à Carthage, mais sans s’être forgé de véritable sentiment religieux. Ce jour-là – elle est seule dans l’église –, tout lui semble nouveau : le silence, la fraîcheur du lieu, et ce terrifiant tableau représentant un homme mort qu’on descend de la Croix. L’image de ce corps souffrant, souvent retrouvée aux Beaux-Arts, l’a toujours obsédée. Plus tard, mais dans ce même élan de curiosité vers une autre manière de penser le religieux, elle découvre une grotte dédiée à la Vierge Marie couverte d’ex-voto. Les mots gravés sur des plaquettes de marbre accrochées aux parois, les objets – moulages de pieds, de jambes – la troublent. À quoi peuvent-ils servir ? Il lui est répondu : ‘Si tu fais un vœu ici, il sera exaucé’. Alors, sans réfléchir, elle sort de son sac un crayon et écrit sur le marbre d’un ex-voto : ‘Faites que je réussisse dans mon dessin’. Pas dupe, elle se doute aussitôt que cette petite trace de crayon sur le marbre ne sera pas éternelle. Mais qui affirmerait aujourd’hui que son vœu ne fut pas exaucé ?40
De la scène reste le sceau du magique, de la croyance, et le décorum. Et les figures peintes dans les vitrines de Menchari auront toujours l’air d’être ailleurs, sans expression de souffrance, sans rôle maternel, sans scène sublimée d’une création incarnée.
Pour lire le travail de Menchari, Michèle Gazier pointe ses propres thèmes dont la sensorialité :
revisitant sans cesse son enfance tunisienne. Ses vitrines, merveilleux contes nomades, ses dessins, son art vibratoire de faire chanter la couleur des soies avec celle des cuirs, nous racontent une histoire pétrie de senteurs, de murmures, de mer, de soleil, de sable, de lumière noire et d’ombres bleu marine ;41
la figure de l’entre-deux :
Très occidentalisée, mais tout aussi attachée à la Tunisie, la famille Menchari offrait à sa fille les clefs de deux mondes : celui d’une France lointaine et proche qui fera plus tard rêver l’adolescente, et celui d’une Tunisie riche de sa culture, de ses coutumes, de son artisanat, de ses plages et de ses parfums ; 42
l’interculturel :
les différences de religions ne posaient pas de problème. On était Tunisien avant d’être Arabe, Berbère, Juif ou Romain, et l’on était amis sans se préoccuper du dieu prié dans chaque famille.
Cette liberté de pensée, cette absence de frontières43 et enfin la dé-hierarchisation, l’ascenseur du talent et du don : « Nombreux sont les artisans que Leïla a incités à franchir la frontière vers l’art »44 : François Houtin, graveur, ou Lison de Caunes, pour ses marqueteries. Ce qui atteste de son admiration pour l’artisanat : que ce soit l’homme des parfums, le miniaturiste ou le marbrier. Autant de corps de métiers valorisés dans les propos de Menchari dans Orient-Express, Voyages de Leïla Menchari où figurent de nombreux artisans au travail.
Au final, quid du mystère de la création ? Il prend la forme d’un jardin tunisien ou d’une grotte (Un jardin sous la mer, la vitrine de l’été 2000), grotte rêvée, qui l’obsède, écrit Michèle Gazier, au point de la créer : « pour exorciser ses fantômes ? Pour apprivoiser ses rêves ? » Mais ni un rêve ni un jardin ni un vœu ne donne la clef d’un talent. Le medium de création de Menchari reste le trompe-l’œil.
Michèle Gazier fait le parallèle entre décoratrice et romancière, et décrit Menchari en conteuse qui aurait son vocabulaire visuel Hermès : carré, cuir, cheval. Si Schopenhauer distingua l’écrivain chasseur de l’écrivain cueilleur45, Michèle Gazier distingue l’écrivain-ruisseau qui fait « entendre [sa] petite musique intime »46, l’écrivain-forteresse « qui avance en quadrillant l’espace » et l’écrivain joueur : celui qui s’amuse « à se donner des contraintes » et qui se passionne pour le mode du récit plus que pour la seule histoire. L’exercice de la reprise s’inscrit dans cette dernière catégorie, jouant sur une partition plus lumineuse que les entre soi mortifères et les histoires de famille.
Laissons alors le mot de la fin à la solarité :
Peintre formée aux Beaux-arts, chez Hermès, dans ses vitrines ou à la tête du comité couleur de la soie, elle a donné, par l’usage osé de teintes hardiment relevées, une tonalité chaude et enveloppante aux créations de la maison. Pas une vitrine, pas un foulard qui n’évoque un lever de soleil sur la médina de Tunis, la douceur d’une dune ou parfois même la lumière vive et argentée d’un plein midi47.
Avec Leïla Menchari, Michèle Gazier choisit la douceur de vivre, la lumière, qu’on entrevoit aussi dans ses romans, certes plus tendus sous la violence des secrets. Quel adjectif serait le plus nuancé ? Éclatante ? Rayonnante ? « L’éclat ne concerne que la surface. Le rayonnement, lui, vient de l’intérieur »48. De la vitre à la vitrine. La démarche de l’écrivain vers le rayonnement passe outre l’éclat.
[1] « Pour sa ‘Reine Mage’, il rédige la préface d’un très bel ouvrage consacré aux vitrines Hermès créées par Leïla. Pour elle, encore, il écrit « Lili ou l’Initiation parfumée », un conte sur l’enfant qu’elle a été à l’époque de sa découverte du Jardin. Des tirages de ce conte accompagnent en 2002 l’eau de toilette Un jardin en Méditerranée composée par Jean-Claude ELLENA, inspiré par les essences du mythique Jardin. Voir Leïla Menchari, la Reine Mage, Paris, actes Sud/Hermès, 2017, p. 266.
[2] Le nom aussi est une fenêtre, un passeport : Simon renommé Odon pour effacer « sa judaïté » est « un jeune homme caméléon » qui a la passion des carnavals et des masques. Il est ensuite nommé Authon Laplaine par Odile dans Le Fil de soie, Paris, Seuil, 2001, p. 116.
[3] Nous assumons d’écrire ici mage au féminin, par raccourci de reine-mage et écrivaine-mage.
[4] Les vitrines Hermès - Contes nomades de Leïla Menchari, édition dirigée par Marie-Claude CHAR, textes de Michèle GAZIER, préface de Michel TOURNIER (p. 7-9), conception graphique : Benoît Gillain, Imprimerie Nationale Éditions, 1999.
[5] Orient-express – Voyages de Leïla Menchari, Catalogue de l’Exposition Orient-Hermès - Institut du Monde Arabe, du 19 mars au 6 juin 2010. Entretiens en compagnie de Marie-Claude CHAR et de Michèle GAZIER et préface de Frédéric MITTERRAND, Paris, éditions Des Busclats, 2010.
[6] M. GAZIER, Leïla Menchari, la Reine Mage, Paris, actes Sud/Hermès, 2017.
[7] Dominique VIART, « Essais-fictions : les biographies (ré)inventées », in M. DAMBRE et M. GOSSELIN (dir.), L’Éclatement des genres au XXe siècle, Paris, Presses de la Sorbonne nouvelle, 2001, p. 331-346.
[8] Orient-Express, Voyages de Leïla Menchari semble être un catalogue classique : une seconde de couverture rappelle à grands traits la biographie de Leïla Menchari, juste avant la préface d’un officiel Frédéric Mitterrand. Une fois l’équipe Hermès présentée, Leïla Menchari prend la plume, de façon fragmentaire pour rendre hommage aux artisans, par corps de métier, nattier, dinandier, sculpteur de pierre, mosaïstes, verriers souffleurs. Le corps principal du livre se constitue de 9 voyages en réponse aux brèves questions de Michèle Gazier et Marie Claude Char.
[9] M. GAZIER, Les Vitrines Hermès – Contes nomades de Leïla Menchari, édition dirigée par Marie-Claude CHAR, préface de Michel TOURNIER (p. 7-9), Imprimerie Nationale Éditions, 1999, p. 9. Pour cette édition rare, nous disposons du tapuscrit original de 47 pages A4 auquel renvoie notre pagination.
[10] Ibid., p. 47.
[11] Ibid., p. 7.
[12] Ibid., p. 13.
[13] Qantara (magazine de l’Institut du monde arabe), n°11, avril-mai-juin 1994.
[14] M. GAZIER, Leïla Menchari, la Reine Mage, p. 13-14.
[15] Jean-Philippe TOUSSAINT, Made in china, Paris, éditions de Minuit, 2017, p. 125.
[16] Lors des échanges réguliers en 2017 que nous avons eus ensemble.
[17] Milan KUNDERA, Les Testaments trahis, Paris, Gallimard, 1993, p. 307.
[18] C’est ce que démontre par exemple Martine BOYER-WEINMANN, (dans La Relation biographique, Ceyzérieu, Champ Vallon, 2005) analysant plusieurs biographies littéraires d’un même écrivain.
[19] « […] cacher ses vraies peurs derrière un écran de mots », Nativités, Paris, éditions du Seuil, 1995, p. 151.
[20] Écrire pour « réduire la distance en maintenant la distance » (Le Goût des mères, Paris, Mercure de France, 2012, p. 25). Écrire pour tenir en respect une émotion, sous couvert du roman quand cela ne peut être dit que par le détour fictionnel.
[21] Pascal QUIGNARD, La Barque silencieuse, Paris, Éditions Grasset, 2009. Et« c’est ainsi que seul dans la cité le lecteur affronte physiquement, solitairement, dans le livre, l’abîme de la solitude antérieure où il vécut. Simplement, en tournant simplement les pages de son livre, il reconduit sans fin la déchirure (sexuelle, familiale, sociale) dont il provient ». Et Michèle Gazier de poursuivre : « Dans la littérature quelque chose résonne de l’autre monde. Quelque chose se transmet du secret », Le Goût de la lecture, Paris, Mercure de France, collection « Le petit mercure », 2010. Elle cite encore Dernier royaume : « la lecture est la famille des seuls, des solus, des absolus ».
[22] M. GAZIER, Orient-Express, Voyages de Leïla Menchari, p. 19.
[23] Le jardin de Jean et Violet Henderson ont inspiré à Michel TOURNIER les personnages de Ralph et Deborah des Météores (2017, op. cit., p. 56). Catherine HERMARY-VIEILLE, Le Jardin des Henderson, Paris, Gallimard, 1988.
[24] Michèle GAZIER précise que cette scène rappelle le roman Le Jardin des Henderson de Catherine HERMARY-VIEILLE, qui l’avait visité en compagnie de Leïla.
[25] M. GAZIER, Le fil de soie, Paris, Seuil, 2001, p. 20.
[26] M. GAZIER, Leïla Menchari, la Reine Mage, p. 12.
[27] Ibid., p. 393.
[28] Ibid., p. 217.
[29] Loc. cit.
[30] M. GAZIER, Nativités, 1995, p. 130.
[31] Présentation en première page non numérotée, ibid.
[32] Ibid., p. 11.
[33] Ibid., p. 155.
[34] Ibid., p. 94.
[35] Ibid., p. 110.
[36] Ibid., p. 61.
[37] Ibid., p. 123.
[38] Ibid., p. 128.
[39] M. GAZIER, Le Goût des mères, Paris, Mercure de France, 2012.
[40] M. GAZIER, Leïla Menchari, la Reine Mage, p. 215.
[41] M. GAZIER, Leïla Menchari, la Reine Mage, p. 9.
[42] Ibid., p. 10.
[43] Ibid., p. 11.
[44] Loc. cit.
[45] Arthur SCHOPENHAUER, Misère de la littérature, traduction aux éditions Circé, 2010.
[46] M. GAZIER, Le Merle bleu, Paris, éditions du Seuil, coll. « Points », 1999, p. 16.
[47] M. GAZIER, Leïla Menchari, la Reine Mage, dernière page.
[48] M. GAZIER, Le Fil de soie, Paris, Seuil, 2001, p. 67.
Résumé
Michèle Gazier a écrit à quatre reprises un texte (essai, roman, entretien, biographie) en lien avec la décoratrice des vitrines d’Hermès, Leïla Menchari. Les deux figures de l’écrivain et de la décoratrice se rejoignent parfois en miroir : par la thématique autobiographique commune de la couture, et par la négociation avec les héritages esthétiques, de l’art occidental religieux à l’artisanat méditerranéen. La question des frontières pose de fait des enjeux esthétiques : quel choix entre autobiographie, biographie et fiction pour tisser la mythologie personnelle de la décoratrice ?
Abstract
Michèle Gazier has written four texts (essay, novel, interview and biography) linked with Hermès’ shop windows designer, Leïla Menchari. Both figures of writer and the decorator sometimes join in mirror : biography both linked with sewing, negociation with the intercultural esthetic inheritances from the religious western art to the Mediterranean handicraft. The frontier’s question concerns esthetics : which choice between autobiography, biography and fiction to weave designer’s personal mythology ?
Isabelle ROUSSEL-GILLET
Université d’Artois, EA 4028, Textes & Cultures, F-62000 Arras
GAZIER, Michèle, Nativités, Paris, éditions du Seuil, 1995.
—, Sorcières ordinaires, Nouvelles (1re éd. Paris, Calmann Levy, 1997), Paris, Gallimard, coll. Folio, 2000.
—, Le Merle bleu, Paris, éditions du Seuil, coll. « Points », 1999. Prix Exbrayat, Prix Bibliothèque pour tous.
—, Les vitrines Hermès : contes nomades de Leila Menchari, (préface de Michel Tournier), sous la direction de Marie-Claude Char, Paris, Imprimerie nationale, 1999.
—, Le Fil de soie, Paris, éditions du Seuil, coll. « Points », 2001.
— et CHAR, Marie-Claude, Orient-Express, Voyages de Leïla Menchari, Catalogue de l’Exposition Orient-Hermès - Institut du Monde Arabe, du 19 mars au 6 juin 2010. Entretiens en compagnie de Marie-Claude et de Michèle GAZIER et préface de Frédéric MITTERRAND, Paris, éditions Des Busclats, 2010.
—, Le Goût des mères, Paris, Mercure de France, 2012.
—, et LEPAPE, Pierre, Noir et or, Paris, Seuil, 2015.
—, Leïla Menchari, la Reine Mage, Paris, actes Sud/Hermès, 2017.
HERMARY-VIEILLE, Catherine, Le Jardin des Henderson, Paris, Gallimard, 1988.
SCHOPENHAUER, Arthur, Misère de la littérature, trad. Sibylle Muller, Belval, éditions Circé, 2010.
VIART, Dominique, « Essais-fictions : les biographies (ré)inventées », in M. DAMBRE et M. GOSSELIN (dir.), L’Éclatement des genres au XXe siècle, Paris, Presses de la Sorbonne nouvelle, 2001, p. 331-346.