« La Picardie, terre de cathédrales » peut-on lire sur des panneaux indicateurs et dans des brochures touristiques, ou entendre dans des émissions télévisées1. Une demi-douzaine de ces vastes édifices religieux gothiques sont en effet situés sur le territoire de l’ancienne région administrative, constituée des départements de la Somme, de l’Oise et de l’Aisne, et absorbée dans les Hauts-de-France en 2016. Toutefois, ils semblent un peu moins connus par les visiteurs que ceux de Paris, Reims ou Chartres, comme l’attestent les chiffres de leur fréquentation. Cela invite à s’interroger sur le regard que les Picards portent sur ces cathédrales de la région, des monuments inscrits dans leur paysage depuis plus de sept siècles. Comment s’exprime leur attachement ? Celui-ci influence-t-il la promotion patrimoniale, culturelle ou religieuse de ces édifices ? Après une présentation de ces cathédrales picardes, il s’agira de mesurer l’intérêt patrimonial, religieux et identitaire dont elles font l’objet avant d’étudier leur attractivité, et donc leur rayonnement.
Combien y a-t-il de cathédrales en Picardie ? La question peut sembler étonnante dans la mesure où de tels édifices sont bien identifiés. Pourtant, il convient de tenir compte de leurs statuts juridiques et canoniques, voire symboliques, qui en nuancent les définitions, et donc le recensement. Ainsi, l’État n’en reconnaît que trois – soit une par diocèse / département –, dont il a la propriété depuis le Concordat de 1801, Notre-Dame d’Amiens, Saint-Pierre de Beauvais et Saint-Gervais-Saint-Protais de Soissons. En réalité, Beauvais n’a été concerné qu’à partir de 1822, à la suite du rétablissement de son évêché, d’abord rattaché à celui d’Amiens. Dans l’Aisne, Soissons est considéré comme siège épiscopal depuis la Constitution civile du clergé (1790), et non Laon, pourtant chef-lieu du département : c’est donc sa cathédrale qui est reconnue. Une disposition de la loi de séparation des Églises et de l’État en 1905 a ensuite confirmé la propriété étatique sur les cathédrales, dont la gestion a été attribuée en 1912 au Secrétariat d’État aux Beaux-Arts, mais le clergé en reste « l’affectataire ». Au XIXe siècle, la cathédrale était « mise à disposition » de l’évêque.
Sous l’Ancien Régime, il y avait, du point de vue ecclésiastique, six cathédrales, qui correspondaient aux six évêchés situés alors en Picardie, et dont les ressorts couvraient alors l’essentiel du territoire : aux trois premières s’ajoutaient Notre-Dame de Noyon, Notre-Dame de Senlis et Notre-Dame de Laon.
Néanmoins, si ces diocèses ont été supprimés, les titres épiscopaux liés à ces anciennes cathédrales n’ont pas disparu. Le bref Inter Cœteras du pape Léon XII en date du 16 juin 1828, confirmé par une ordonnance royale du 31 août, rétablit le titre d’« évêque de Laon » en souvenir de cet ancien diocèse et l’unit à celui de Soissons2, après une délibération du conseil municipal. Cette décision en revient en fait à une pratique déjà en cours de 1802 à 1822. Puis, à la suite de la mobilisation du clergé local et de fidèles, un bref du 21 juin 1901 dû à Léon XIII, autorise d’adjoindre le nom de Saint-Quentin à celui du diocèse de Soissons et à son évêque3 : c’est en souvenir de l’ancien diocèse du Vermandois, dont le siège a été transféré à Noyon au Ve siècle. Mais Vermand est alors confondu – à tort – avec Saint-Quentin. Depuis le début du XXe siècle, la titulature religieuse est donc celle d’« évêque de Soissons, Laon et Saint-Quentin ». De fait, mais pas de droit, la basilique saint-quentinoise est assimilée à une église cathédrale. De même, le 12 avril 1851, l’évêque de Beauvais a été autorisé à porter le titre d’« évêque de Beauvais, Noyon et Senlis » – le bref pontifical est d’ailleurs reconnu par décret du président de la République le 13 janvier suivant4. Ces modifications, qui classent les évêchés par ordre d’ancienneté, ne modifient en rien les droits et prérogatives de leurs titulaires, tout en satisfaisant le clergé et les fidèles des villes concernées. Elles justifient seulement que l’on parle encore de cathédrale malgré la disparition des diocèses en 1790. Elles visent à en rappeler le souvenir, mais plus encore à prévenir toute velléité de scission des diocèses. C’est notamment le cas pour Beauvais, alors que le concordat de 1817, finalement pas appliqué, avait prévu le rétablissement du diocèse de Noyon5.
D’autres églises insignes de Picardie sont parfois désignées sous le titre de cathédrale, sans autre justification que leur ampleur et leur architecture gothique, qui les font assimiler de fait à de tels édifices. C’est également une manière de leur donner de l’importance, ainsi qu’aux cités où elles sont situées. Il en va principalement de la collégiale de Saint-Quentin, mentionnée sous ce vocable par des journalistes et des érudits6, et parfois assimilée à la « septième cathédrale » de Picardie. Les autres exemples sont en revanche plus modestes et cités moins fréquemment. Ainsi, l’église Saint-Martin d’Harbonnières, en gothique flamboyant, a été surnommée « la petite cathédrale du Santerre » par Mgr de la Motte, évêque d’Amiens de 1733 à 17747. Il est également fait état de la « cathédrale Saint-Vulfran » à Abbeville8, alors qu’il s’agit d’une collégiale.
La confusion, au demeurant volontaire, peut provenir du fait que certaines grandes églises ont été érigées en basiliques mineures, au Moyen Âge, puis au XIXe siècle, dans une perspective d’affirmation de l’ultramontanisme, puisque c’est désormais le pape qui autorise cette titulature en fonction du rayonnement spirituel de l’édifice : c’est le cas des cathédrales d’Amiens (1854) et de Soissons (1857), de la collégiale de Saint-Quentin (1876) – désignée à partir de ce moment-là sous ce terme de basilique –, ou d’églises de pèlerinage plus modestes.
Sur le plan archéologique, selon l’abbé Corblet, la Picardie historique passe pour être « le berceau de l’architecture gothique »9, ou « des cathédrales [gothiques] ». Après Saint-Denis, les édifices de Noyon et de Laon, dont les travaux commencent au milieu du XIIe siècle, représentent en effet le style nouveau. Mais l’appellation de « berceau du gothique » vaut tout autant, sinon davantage, pour l’Île de France, qui, comme la Picardie, a aussi bénéficié d’influences normandes et bourguignonnes. Au Moyen Âge, il est question d’opus francigenum. L’adjectif « gothique » apparaît à la Renaissance pour désigner de manière péjorative l’art de la fin du Moyen Âge. Au XIXe siècle, le terme devient à la mode, en concurrence avec l’expression d’« art ogival ». Précisément, ce siècle est aussi celui où l’on met en avant la cathédrale – on la réinvente presque –, sous une triple influence : romantique, avec la nostalgie d’un passé révolu ; religieuse, avec l’aspiration à restaurer la chrétienté – qui est idéalisée – du Moyen Âge ; nationaliste, dans la mesure où la cathédrale gothique est vue comme le symbole du génie français, contre l’Allemagne10. Les dimensions religieuses et romantiques se rejoignent par ailleurs. Dans Le génie du christianisme, Chateaubriand écrit ainsi :
On ne pouvait entrer dans une église gothique sans éprouver une sorte de frissonnement et un sentiment vague de la Divinité […]. L’ordre gothique […] a une beauté qui lui est particulière […], [dont] nous aimons […] rapporter son origine à la nature11.
La Picardie est encore présentée comme une « terre de cathédrales » par le nombre des édifices qui y sont érigés, et dont Amiens serait la quintessence. Ainsi, selon l’historien d’art Yvan Christ, « pour le grand public, la Picardie, c’est d’abord Amiens. Et Amiens, c’est un des porte-drapeaux du génie gothique »12. Il fait écho à Viollet-le-Duc, pour qui sa cathédrale est « l’église gothique par excellence »13 et à l’archiviste Georges Durand, auteur d’une monographie de référence sur l’édifice, affirmant qu’il est « ce que l’art gothique a produit à la fois de plus grandiose, de plus complet et de plus parfait […], le monument dans lequel cet art a manifesté la plénitude de son système et de ses ressources »14. De fait, ces remarques se retrouvent aussi dans des arguments promotionnels et touristiques. Le groupe Vinci autoroute veut ainsi soutenir une « route des cathédrales » en Picardie.
Cela signifie toutefois aussi un héritage patrimonial lourd à assumer du point de vue de son entretien et de sa restauration. La plupart de ces édifices, y compris les collégiales d’Abbeville et de Saint-Quentin, ont été classés sur la première liste des Monuments historiques en 1840, qui précise d’ailleurs, à propos de Laon et Noyon, qu’il s’agit d’« anciennes cathédrales ». En revanche, Senlis et Amiens n’ont été classés qu’en 1862, peut-être parce que leur état n’était pas aussi menacé auparavant. Amiens a en outre été inscrite au patrimoine mondial de l’UNESCO en 1981. Les trois anciennes cathédrales picardes, ainsi que la basilique de Saint-Quentin, appartiennent aux communes, qui les gèrent directement depuis 1907. Cela représente une charge financière très lourde pour elles, surtout quand il s’agit de municipalités peu aisées comme Noyon, ou de taille restreinte, à l’instar de Noyon et Senlis, qui comptent moins de 16 000 habitants. Mais des aides étatiques ou européennes peuvent être attribuées pour des travaux de réhabilitation. Par ailleurs, les cathédrales communales très endommagées pendant la Grande Guerre ont été restaurées ensuite grâce aux réparations versées par l’État (Soissons, Noyon, Senlis). À l’inverse, les travaux sur les édifices de l’État peuvent être aussi cofinancés par la ville, le département et la région, comme à Beauvais en 2012. Des partenaires privés sont parfois associés pour du mécénat.
Cela traduit une forme de reconnaissance nationale et internationale, qui contribue à soutenir l’intérêt local pour les cathédrales.
Il convient de voir comment des Picards se mobilisent pour entretenir et promouvoir leurs cathédrales depuis deux siècles et en font, peut-être, un signe d’une identité régionale.
Les associations savantes, souvent créées par des notables et des érudits locaux au XIXe siècle, en sont l’un des premiers vecteurs15 : Société des Antiquaires de Picardie (1836), Société académique d’archéologie, sciences et arts du département de l’Oise (1847), Société historique de Soissons (1847), Société académique de Laon (1850) et Société historique, archéologique et scientifique de Noyon (1856). D’autres structures ont également vu le jour au XXe siècle. Elles s’intéressent notamment, à travers des publications et des recherches, à l’histoire de ces édifices. La Société des Antiquaires de Picardie, en particulier, veut démontrer la primauté de la région en matière d’innovation du gothique16. L’intérêt de ces associations pour le patrimoine des cathédrales tient également au fait que certaines d’entre elles ont subi le « vandalisme » révolutionnaire, selon l’expression de l’abbé Grégoire, comme les portails de Noyon et de Soissons. Il y a donc des enjeux autour de leur restauration. La Société des Antiquaires de Picardie suit ainsi de près les travaux de Viollet-le-Duc à Amiens, débutés en 1850, avec la création, le 9 novembre 1852, d’une commission pour « l’éclairer sur le mérite des travaux de suppression ou de modification déjà exécutés ou projetés dans la Cathédrale »17. Ces associations alertent également les responsables politiques et administratifs sur la nécessité de programmer des chantiers de réparation, et s’occupent de la mise en valeur des édifices.
La plupart des associations des Amis des cathédrales apparaissent à partir du milieu des années 1970, lorsqu’une nouvelle prise de conscience patrimoniale a émergé. Reims fait exception dans cette chronologie, puisque la société est créée en 1917, mais il s’agit alors de préparer la restauration de l’édifice incendié en 191418. À Amiens, la Société des Amis de la cathédrale est constituée dès 1952 – la remise en état de l’édifice tarde alors, avec des vitraux à réinstaller. Son fondateur, Edmond Duthoit, responsable des Rosati picards, est un descendant des artistes qui ont contribué aux restaurations du XIXe siècle. Le président de la Société des Antiquaires de Picardie, Charles de Favernay, est également administrateur des Amis, ce qui témoigne des complémentarités entre les deux associations. Mais quelques décennies plus tard, la Société des Amis traverse une période de délaissement, avant d’être relancée au milieu des années 1980 à la demande du chanoine Jean Dassonville. De la cathédrale, il s’agit, selon ses responsables de l’époque, « d’en faire sentir tout le “poids chrétien”, en particulier la foi fervente des “Compagnons constructeurs” et de ces foules de pèlerins venus […] se recueillir aux pieds de Notre-Dame d’Amiens »19. En d’autres termes, l’association est à la rencontre du culturel et du cultuel. Elle anime un service d’accueil des visiteurs, intervient auprès des différents acteurs pour s’assurer de l’entretien de l’édifice, finance des investissements destinés à des opérations de restauration, initie ou soutient des manifestations culturelles (exposition sur 1914-1918, spectacle en 2017, conférences et colloques, sur saint Jean-Baptiste en 2006, sur saint Martin de Tours en 2016…).
Des sociétés analogues se retrouvent ailleurs en Picardie à la même époque, ce qui peut expliquer d’ailleurs la relance de celle d’Amiens : les Amis de la cathédrale de Laon et de l’église Saint-Martin en 1976 ; l’Association des Amis de la basilique de Saint-Quentin en 1977. Puis vient l’Association Beauvais Cathédrale en 1987, qui a pour objet la mise en valeur de celle-ci ainsi que des églises Notre-Dame de la Basse-Œuvre et de Saint-Étienne. Enfin, les Amis de la cathédrale Saint-Gervais Saint-Protais de Soissons voient le jour en 1993.
À Senlis et Noyon, il n’y a pas de sociétés patrimoniales spécifiques, mais celles qui existent s’intéressent aussi à la cathédrale. Ces petites villes n’ont pas non plus les moyens de multiplier les associations culturelles, faute d’un vivier suffisant de bénévoles. En 1987 a été créée l’Association des amis de l’orgue et de la cathédrale de Noyon, par Pierre Baudoux et l’archiprêtre, l’abbé François de Mauny, pour restaurer l’instrument, ce qui a été réalisé seize ans plus tard. Toutefois, en juin 2019, après l’incendie de Notre-Dame de Paris, a été envisagée la création – actée en 2020 – des Cœurs de la cathédrale de Noyon, pour trouver des financements destinés à la restauration de celle-ci20. Quant à la Confrérie des Marguilliers Saint-Éloi, recréée en 2002, c’est une œuvre charitable. À Senlis, la promotion et l’entretien de la cathédrale sont portés par l’Association pour la Sauvegarde de Senlis (1969) et les Amis des orgues de Senlis, créée en 2008 notamment pour la restauration de l’instrument de la cathédrale. La plupart de ces associations reçoivent des subventions municipales, voire départementales (Beauvais).
Les objets de ces sociétés sont variés : les unes s’attachent à l’orgue, quand d’autres ont un centre d’intérêt patrimonial plus large, qui parfois ne se limite pas à la seule cathédrale. Leur dynamisme est fluctuant, plusieurs associations ayant dû être relancées. Il est difficile de mesurer leur influence, mais celle-ci dépend aussi de la taille de la ville : les Amis de la cathédrale d’Amiens comptent plus de 200 adhérents, Beauvais une centaine, quand les autres ont des effectifs plus modestes. Le nombre d’adhérents est rarement élevé, notamment en comparaison de Reims, où ils étaient 350 en 2009 et 700 en 201621, mais c’est le propre de beaucoup d’associations culturelles. Le dynamisme se mesure par ailleurs à la présence de ces associations sur les réseaux sociaux : toutes n’ont pas un site internet, un blog ou un compte Facebook à jour – du coup, leur visibilité est plus réduite. Néanmoins, elles partagent des préoccupations communes, qui ont amené plusieurs d’entre elles à constituer en 2017 une Fédération des associations des amis des cathédrales et des orgues des cathédrales picardes. Celle-ci, qui inclut la basilique de Saint-Quentin, se montre active : édition d’une série de timbres, publication d’un ouvrage22 et réalisation d’une exposition sur « Les 7 cathédrales picardes ».
Les publications relatives à chaque cathédrale témoignent également de l’intérêt pour celle-ci, même si on ignore bien souvent les tirages et les ventes, quoique les succès d’édition peuvent parfois aussi se vérifier (ouvrages épuisés, rééditions). On peut esquisser un tableau à partir des catalogues des bibliothèques municipales et départementales, en retenant les monographies et les guides spécialisés, à l’exclusion des brochures et des articles. Logiquement, les grandes cathédrales, situées aussi dans les villes plus importantes, suscitent davantage de publications que les plus petites. Pour Amiens, on peut évaluer leur nombre à 36 depuis le début du XIXe siècle ; deux fois moins à Laon (17), trois fois moins à Beauvais et Noyon (13 et 11), quatre fois moins à Senlis (8). Malgré les incertitudes et les limites d’une telle enquête, il apparaît que Laon serait davantage étudiée que Beauvais. La répartition chronologique de ces ouvrages révèle quelques moments privilégiés, même s’ils sont édités à toutes les époques : une série de publications est parue sous la Monarchie de Juillet, à l’époque où se développe l’intérêt pour l’histoire et le patrimoine local ; le tournant des XIXe et XXe siècles est assez bien représenté, avec notamment des ouvrages de référence comme ceux de Georges Durand (Monographie de l’église Notre-Dame, cathédrale d’Amiens, Amiens-Paris, 1902) ou d’Eugène Lefevre-Pontalis (Histoire de la cathédrale de Noyon, 1901). Enfin, depuis les années 1990, le flux éditorial se poursuit, notamment dans le cadre de collections de monographies (« Zodiaque » : Amiens en 2002 et Laon en 2004 ; « la grâce d’une cathédrale » : Amiens, 2012).
L’attachement aux cathédrales passe encore par les manifestations culturelles exceptionnelles qui les mettent en avant. Il en va des grandes expositions patrimoniales de 1920 et 1980 à Amiens. La première s’inscrit dans le cadre des célébrations du septième centenaire de l’édifice, alors que pèse encore le souvenir des risques de destructions encourus par celui-ci pendant la guerre. Elle a été organisée à l’initiative de la Société des Antiquaires de Picardie, par Pierre Dubois, directeur de la bibliothèque municipale, et Georges Durand, archiviste départemental. Installée au pavillon Maignan du musée de Picardie du 21 juin au 22 juillet, elle présente notamment de nombreuses pièces du fonds de la famille des frères Duthoit23. L’exposition de 1980 s’inscrit dans la programmation de l’année du patrimoine et marque l’achèvement de la restauration de la flèche, de la toiture, des voûtes du chœur et de la chaire de la cathédrale. Elle est également organisée par le musée, où elle est présentée, et les Antiquaires de Picardie, en partenariat avec la DRAC : elle expose surtout des documents iconographiques, mais aussi quelques statues et moulages24. Ces manifestations, qui associent différentes structures culturelles amiénoises, remportent de grands succès. La Maison de la Culture a également consacré une exposition à l’édifice vers la même époque.
Des expositions plus modestes ont concerné d’autres édifices : en septembre 1975 en est présentée une sur « Naissance et vie d’une cathédrale » au musée municipal de Noyon. Celui-ci, devenu musée du Noyonnais, en organise une autre en 2019 sur « Fragments gothiques : la sculpture retrouvée de la cathédrale Notre-Dame de Noyon ». Par ailleurs, depuis quelques décennies, sont également présentées des expositions d’œuvres contemporaines, d’artistes locaux ou pas, sur les cathédrales de la région, qui sont autant de sources d’inspiration.
Le son et lumière organisé à l’intérieur de la cathédrale d’Amiens en 1987 à l’occasion du millénaire capétien – et inauguré par le président de la République – a contribué aussi à afficher l’identité de l’édifice. De même, la colorisation de ses portails à partir de 199925 – une première en France, imitée ensuite – à l’initiative du service Patrimoine d’Amiens métropole, a fait rayonner la cathédrale, avant le lancement du spectacle Chroma du studio Spectre Lab en 2017. Beauvais a suivi en 2012 avec « La cathédrale infinie et Horizons imaginaires », puis Laon, avec « Lumières d’été ».
D’autres événements culturels annuels confortent encore l’image régionale des cathédrales. En 1988 est lancé le festival des cathédrales de Picardie, qui, au-delà de son nom, associe également des églises gothiques plus modestes, et qui a perduré une vingtaine d’années. Tous les édifices de France se sont également associés à la nuit des cathédrales, un événement d’envergure européenne, initié au Luxembourg en 2006.
La plupart des initiatives de promotion d’une cathédrale émanent d’acteurs culturels locaux. Dans quelques cas néanmoins, ces derniers répondent à des sollicitations internationales, comme la nuit des cathédrales, ou nationales. C’est d’ailleurs cette impulsion extérieure qui a contribué à faire accroître l’intérêt local pour ce patrimoine. Le ministère de la Culture a ainsi lancé au cours de la décennie 1970 des « années » dédiées à un thème patrimonial et à une région : châteaux en Bourgogne en 1973, châteaux en Auvergne en 1974 ; art roman en Poitou-Charentes-Vendée en 1976. En 1975, c’est l’art gothique en Picardie, un événement par ailleurs contemporain de l’Année européenne de sauvegarde du Patrimoine monumental. Cela a stimulé les acteurs locaux, comme en témoignent les créations de deux associations d’amis de la cathédrale vers 1976-1977. L’année du patrimoine, en 1980, puis le classement de la cathédrale d’Amiens au patrimoine mondial de l’UNESCO en 1981, en même temps qu’était organisée l’exposition, ont participé à la mise en valeur, et donc à la redécouverte de l’édifice. Or celui-ci semble parfois mal connu des Amiénois eux-mêmes, comme les autres cathédrales de Picardie d’ailleurs.
L’attachement patrimonial et identitaire d’une cathédrale peut s’observer enfin à travers les débats concernant les restaurations et les aménagements. À Amiens en particulier, l’opinion publique – en réalité, principalement les érudits, les notables et la presse locale – se passionne pour l’agencement des alentours de l’édifice : d’abord sous le Second Empire, lorsqu’il est question d’ouvrir une avenue avec une large perspective en face de la cathédrale ; puis dans la deuxième moitié du XXe siècle, quand il s’est agi de reconstruire les abords du parvis détruits lors des bombardements de 1940. Édifiée en 1971, la très moderne maison de verre de Bernard Bougeault, dans laquelle se reflète la façade de la cathédrale, nourrit ainsi d’intenses polémiques. Enfin, au tournant de l’an 2000, celles-ci ont repris à propos du projet d’aménagement de B. Huet26.
Ces cathédrales attirent croyants, pèlerins et touristes. Églises épiscopales, églises-mères des diocèses, pour Amiens, Beauvais et Soissons, elles sont le cadre des grands rassemblements religieux diocésains ou nationaux, qui accueillent des milliers de fidèles dans les édifices ou sur les parvis : fêtes diocésaines annuelles (saint Firmin à Amiens) ou moments plus exceptionnels (sacre ou installation d’un nouvel évêque, ordinations presbytérales, congrès nationaux sur le sacerdoce en 1949 ou sur les vocations en 1982 à Amiens, jubilés, tels ceux des 1700 ans du diocèse de Soissons en 2014 ou des 800 ans de la cathédrale d’Amiens en 2020). Cela n’est pas contradictoire avec le fait que la Picardie (mais c’est vrai aussi pour Reims et Chartres) faisait partie, au XIXe siècle, des « malheureux diocèses entourant Paris », selon le mot de Mgr Dupanloup, à cause de la faiblesse de leur pratique religieuse. En même temps, il est plus difficile de remplir une immense cathédrale comme celle d’Amiens que celle de Paris.
Ces églises sont aussi des lieux de pèlerinages, même si ce n’est pas leurs fonctions premières. À Amiens, le chef de saint Jean-Baptiste et, à Laon, l’icône de la Sainte-Face ont longtemps fait l’objet de la dévotion des pèlerins. Toutefois, ces pèlerinages ont fortement décliné à l’époque contemporaine, malgré quelques tentatives ponctuelles de relance. À Amiens, ce sont des orthodoxes qui sont le plus intéressés par la relique.
Le passage des visiteurs témoigne de l’attractivité des cathédrales. Il est difficile d’avoir des chiffres précis de fréquentation, et plus encore pour les périodes éloignées, puisque l’entrée dans ces édifices est gratuite et non contrôlée. Néanmoins, les offices et comités départementaux du tourisme tentent de les estimer, sachant que les cathédrales sont souvent les monuments les plus visités dans les villes. Là encore, l’importance de l’agglomération et la taille de l’édifice expliquent les différences de fréquentation. Amiens est la plus visitée, avec 550 à 650 000 personnes par an depuis 2010 (mais près d’un million lors des débuts de la colorisation lumineuse de la façade en 1999-2000). C’est trois à quatre fois plus que Beauvais (150 à 180 000 depuis 2015) ou Laon (160 000 en 2018)27. Les chiffres pour Noyon, Soissons et Senlis, ainsi que Saint-Quentin, sans doute inférieurs, ne sont pas connus. À titre de comparaisons, Amiens reçoit deux fois moins de visiteurs que Reims (1,3 million), trois fois moins que Chartres (deux millions) et vingt fois moins que Paris (12 millions). Comment expliquer ce relatif manque d’intérêt pour les cathédrales picardes ? Celles-ci sont souvent à l’écart des tour-operators qui drainent les touristes étrangers, et notamment asiatiques. Par ailleurs, d’autres villes sont privilégiées quand elles offrent des atouts supplémentaires, touristiques ou commerciaux, comme Paris, en tant que capitale, ou Reims, avec ses caves de Champagne. Durant l’entre-deux-guerres, des travaux importants de restauration de plusieurs édifices fortement endommagés en 1914-1918 les ont rendus peu accessibles, même s’il existait un « tourisme des ruines » ou des liens entre la visite des champs de bataille et celle de cathédrales28. Soissons est en travaux jusqu’en 1937, Noyon jusqu’en 1939, Saint-Quentin jusqu’en 1956 – il est vrai que Reims est dans une situation analogue, mais la forte médiatisation de son incendie en 1914 et sa place dans l’histoire nationale l’ont mise en avant.
Ce n’est cependant pas toujours le gigantisme de la cathédrale qui attire les visiteurs ponctuels, parfois attachés à un aspect particulier ou à une curiosité. Autrefois, ils venaient notamment à Amiens pour voir d’abord l’ange pleureur ; à Beauvais, c’est l’horloge astronomique qui attire les touristes.
Cette fréquentation touristique évolue. À Beauvais, la proximité de l’aéroport amène de plus en plus de passagers à séjourner en ville, même brièvement. L’incendie de Notre-Dame de Paris a suscité un intérêt pour les autres cathédrales gothiques, qui ont connu dans les mois suivants une hausse de leur fréquentation : c’est ce qu’a observé en 2019 le directeur de l’office du tourisme du Beauvaisis pour Noyon, Senlis et Beauvais29. Les professionnels du tourisme et du Centre des monuments nationaux s’efforcent de leur côté de promouvoir les cathédrales. Ce n’est certes pas nouveau puisqu’après 1918, celles-ci sont vantées par la Compagnie des chemins de fer du Nord. L’ouverture aux scolaires depuis plusieurs décennies accroît aussi un peu la fréquentation. Celle-ci est facilitée par la diffusion de romans jeunesse ayant pour cadre le chantier de construction de la cathédrale d’Amiens, ceux de Martine Pouchain, Meurtres à la cathédrale30, recommandé par l’Éducation nationale, et de Béatrice Nicodème, Le secret de la cathédrale31. Le Centre régional de documentation pédagogique d’Amiens s’est aussi impliqué dans l’édition de ressources, en publiant notamment les livres de Maurice Crampon sur La cathédrale d’Amiens (1re éd. 1972) et de Jacques Thiébaut sur les Cathédrales gothiques en Picardie, étude architecturale (1987).
Au-delà, il faudrait pouvoir mesurer l’attachement des habitants d’une ville à leur cathédrale. Ils ne la connaissent pas toujours bien, mais elle représente une silhouette connue, un point de repère. Deux exemples en témoignent. L’abbé Laloy, curé de Morlancourt (Somme) mobilisé comme aumônier pendant la Grande Guerre, raconte : en septembre 1914,
Ce défilé du 16e régiment territorial à travers les rues d’Amiens est presque une marche triomphale. Amiens et sa cathédrale ! On croirait que beaucoup de ces Picards à qui elle est cependant familière, la voient pour la première fois. C’est qu’à leurs yeux, elle représente si bien la Picardie !32
Un quart de siècle plus tard, pour les Amiénois de retour d’exode, l’édifice est un « symbole de continuité et de leur raison d’espérer » selon l’écrivain Marie-Louise Heren33. Lorsque « la silhouette de Notre-Dame d’Amiens apparaît » au détour d’une courbe, « une formidable ovation s’élève du train » qui ramène les réfugiés. « C’est le salut émouvant des Picards très fidèles à leur cathédrale retrouvée ».
Des observations superficielles pourraient donner l’impression que les Picards n’ont manifesté pendant longtemps qu’un intérêt relatif pour leurs cathédrales, qui étaient mal connues, peu visitées et guère mises en valeur. Pourtant, ils y semblent attachés : ils les ont reconstruites après les guerres, ils se préoccupent de leur entretien et de leur promotion. Sans doute convient-il de distinguer leur attachement profond et local à ce patrimoine, d’une familiarité intime sans doute moindre avec ces édifices et leur histoire. Il faudrait aussi tenir compte des fluctuations dans le temps : certains moments réveillent l’intérêt pour ces cathédrales, tels les anniversaires ou jubilés accompagnés par les pouvoirs publics et l’Église, les spectacles gratuits son et lumière qui attirent les foules, ou aussi, paradoxalement, l’incendie de Notre-Dame de Paris, qui a rappelé la place de ce patrimoine. Enfin, le fait que ces cathédrales n’aient pas toutes le même statut juridique peut influencer sinon directement les regards, du moins les moyens de les entretenir et donc de les faire connaître. Quant à l’attractivité touristique, elle dépend de multiples facteurs extérieurs. Les cathédrales picardes sont donc un patrimoine sans cesse en mutation, comme les regards qui leur sont portés.
[1] Par exemple : « Le patrimoine contemporain de Picardie trop méconnu », Le Parisien, 16 avril 2012. Émission Des Racines et des ailes, France 3, 11 décembre 2013. Patrimoine des Hauts de France. Nos églises et nos abbayes, Hors-série La Voix du Nord / Courrier picard, p. 8.
[2], Honoré Fisquet, La France pontificale (Gallia christiana) […]. Métropole de Reims. Soissons et Laon, Paris, E. Repos, [1864], p. 6.
[3] Article « Beauvais », in Gabriel JACQUEMET (dir.), Catholicisme, hier, aujourd’hui, demain, t. 1, Paris, Letouzey et Ané, 1948.
[4] Recueil des décrets rendus par le prince Louis-Napoléon […], 1re partie, Époque présidentielle, Paris, Imprimerie et librairie générale de jurisprudence, 1853, p. 76.
[5] Frédéric Vienne, L’évolution des circonscriptions diocésaines en France à l’époque contemporaine : exemplarité et singularité du Nord et du Pas-de-Calais, thèse, université de Picardie Jules Verne, 2019, p. 306 et p. 440-443.
[6] Albert Londres, « Un nouveau crime. La cathédrale de Saint-Quentin entièrement détruite », Le Petit Journal, 17 août 1917. Antony Goissaud, « La restauration de la cathédrale de Saint-Quentin », L’Illustration, 28 janvier 1928. Fonclause, « Les grandes orgues de la Cathédrale de Saint-Quentin », La Construction moderne. Revue hebdomadaire d’architecture, n°29, 20 avril 1930, p. 438.
[7] Société des Antiquaires de Picardie, La Picardie historique et monumentale, t. II, Arrondissement de Montdidier, Amiens / Paris, Yvert et Tellier / Picard, 1900-1903, p. 76.
[8] « Le dragon de Saint-Vulfran », dans : Office de tourisme de l’Abbevillois, Contes et légendes en Baie de Somme, 2012 [p. 2]. Tableau de Jules-Émile Zingg, La cathédrale Saint-Vulfran à Abbeville, acquis par la ville d’Abbeville en 2019, avec le soutien de l’association des Amis du musée Boucher de Perthes et du Fonds régional d’acquisition des musées. Tableau de 1926 ou de 1939.
[9] Abbé Jules Corblet, « De l’origine du système ogival », L’investigateur, journal de l’Institut historique, t. IX, 2e série, 189e livraison, août 1850, p. 165. L’expression est reprise sur maints supports de communication touristique.
[10] Voir Marie-Claude Coudert, Sylvain Amic (dir.), Cathédrales 1789-1914 : un mythe moderne, Catalogue d’exposition, Paris, Éditions Somogy, 2014, 416 p.
[11] François-René de Chateaubriand, Le génie du christianisme, Paris, Garnier frères, 1828 [1re éd. 1802], p. 293.
[12] Yvan Christ, « L’art dans la cité. Romanomanie », Revue des Deux Mondes, octobre 1975, p. 174.
[13] Cité par John Bilson, « La cathédrale d’Amiens et les “raffinements” de M. Goodyear », Bulletin Monumental, tome 71, année 1907, p. 43.
[14] Georges Durand, Monographie de l’église Notre-Dame, cathédrale d’Amiens, t. 1, Histoire et description de l’édifice, Amiens / Paris, impr. Yvert et Tellier / Picard, Mémoires de la Société des antiquaires de Picardie, 1901, p. 13.
[15] Voir Odile Parsis-Barubé, La province antiquaire. L’invention de l’histoire locale en France (1800-1870), Paris, éd. du CTHS, 2011, 459 p.
[16] Ibid., p. 336.
[17] Bulletins de la Société des Antiquaires de Picardie 1850–51–52, Amiens / Paris, 1852, p. 376. La commission présente son rapport lors de la séance du 23 décembre 1852, p. 390-414.
[18] Jean-Marie Henry et Philippe Petit-Stervinou, « La société des amis de la cathédrale à Reims », in Mgr Thierry Jordan (dir.), Reims, la grâce d’une cathédrale, Strasbourg, La Nuée bleue, 2010, p. 507.
[19] Louise Dessaivre-Audelin et Bernard Verhille, « Les amis de la cathédrale d’Amiens », in Mgr Jean-Luc Bouilleret (dir.), Amiens, la grâce d’une cathédrale, Strasbourg, La Nuée bleue, 2012, p. 472.
[20] Oise Hebdo, 19 juin 2019.
[21] « Bernard Poret, un entrepreneur au chevet de la cathédrale », Reflets actuels, 16 novembre 2016 [en ligne].
[22] Les 7 Cathédrales Picardes. Noyon, Senlis, Laon, Soissons, Saint-Quentin, Amiens, Beauvais. Comparaison par l’image, sl, Fédération des cathédrales picardes, 2021, 92 p.
[23] Société des antiquaires de Picardie. VIIe centenaire de la cathédrale d’Amiens. 1220-1920. Notice des travaux, dessins, estampes, sculptures, objets d'art livres et manuscrits exposés au musée de Picardie […], Amiens, Impr. Yvert et Tellier, 1920, 44 p.
[24] La Cathédrale d’Amiens, Musée de Picardie–Amiens, 1980-1981, 311 p.
[25] Anne Egger, Martin FRAUDREAU, Amiens. La cathédrale peinte 1220-1270, Paris, Perrin, 2000, 205 p.
[26] Muriel Rosemberg, « Questions sur un conflit d’aménagement : le parvis de la cathédrale d’Amiens », in Patrice Melé, Corinne Larrue, Muriel Rosemberg (dir.), Conflits et territoires, Tours, Presses universitaires François Rabelais, « Perspectives “Villes et territoires” », 2004, p. 165-186.
[27] Voir : Chiffres-clés du tourisme en Hauts-de-France (éditions 2017, 2019, 2020) ; chiffres-clés du tourisme dans l’Oise (éditions 2018) ; rapport d’activités de Somme tourisme (édition 2016) [en ligne]
[28] Reconstructions en Picardie après 1918, Paris / Blérancourt, Réunion des musées nationaux / Association des amis du musée de Blérancourt, 2000, 312 p.
[29] Le Parisien, 10 mai 2019.
[30] Gallimard jeunesse, « Folio Junior », 2008, 244 p.
[31] Hachette Jeunesse, 2008, 221 p.
[32] Archives diocésaines d’Amiens, DA 52, abbé Laloy, Avec un Régiment en campagne. Souvenirs de l’Aumônier au 16e RIT 1914-1917, manuscrit.
[33] Cité dans Véronique Alemany, « La cathédrale, source d’inspiration », La cathédrale d’Amiens, op. cit., p. 277.
Résumé
La Picardie est parfois présentée comme une « terre de cathédrales » : cette ancienne région administrative en compte six (Amiens, Beauvais, Senlis, Noyon, Laon et Soissons) – outre les édifices considérés comme telles. Ces cathédrales pas toujours bien connues sont de style gothique et datent de l’époque où le territoire était divisé en autant de diocèses. Comment ce patrimoine religieux et historique est-il perçu, mis en valeur et approprié par les habitants de la Somme, de l’Oise et de l’Aisne depuis le XIXe siècle ? Malgré les apparences d’un intérêt parfois relatif et évolutif, ils y sont attachés.
Abstract
Picardy is sometimes presented as a “land of cathedrals”. This former administrative region has six (Amiens, Beauvais, Senlis, Noyon, Laon and Soissons) – not to mention the monuments regarded as such. These not always well-known cathedrals are in Gothic style and date from the time when the land was divided into so many dioceses. How has this religious and historical heritage been perceived, developed and appropriated by the inhabitants of the Somme, Oise and Aisne since the 19th century? Despite the appearances of a sometimes relative and evolutionary interest, they are attached to it.
Un tableau d’ensemble des cathédrales picardes
L’intérêt patrimonial, religieux et identitaire pour les cathédrales
Xavier BONIFACE
Université de Picardie Jules Verne, Centre d’Histoire des Sociétés, des Sciences et des Conflits
BILSON, John, « La cathédrale d’Amiens et les “raffinements” de M. Goodyear », Bulletin Monumental, tome 71, 1907, p. 32-76.
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