Quelles sont les répercussions de la surdité profonde sur le langage et comment se manifestent-elles dans la langue des jeunes sourds ? Une bonne réhabilitation de la perception auditive suffit-elle à assurer une production orale dénuée de spécificités ? Comment les praticiens pourraient-ils utiliser les résultats fournis par l’analyse linguistique de cette parole ? Pour traiter ces questions, il est indispensable de prendre en compte à la fois la langue, le langage et le développement cognitif survenu en l’absence de perception auditive et d’aborder les spécificités linguistiques des sourds comme un système.
Benveniste pose ainsi la distinction langage-langues (1966 : 19) :
Le langage, faculté humaine, caractéristique universelle et immuable de l’homme, est autre chose que les langues, toujours particulières et variables, en lesquelles il se réalise.
Pour Culioli (1999 : 95-96), le but de la linguistique est de :
rechercher les invariants qui fondent et règlent l’activité de langage, telle qu’elle apparaît à travers les configurations des différentes langue.
Le langage est une faculté humaine, mise en œuvre dans les langues. Les langues inspirent aux linguistes des hypothèses sur le langage, non observable directement.
Mon hypothèse est que la surdité profonde pré-linguistique, par son impact sensoriel, entraîne des schémas cognitifs spécifiques ayant des implications au niveau du langage, produisant des reconfigurations des langues de référence1. Mon analyse porte sur des productions orales de jeunes sourds profonds, dans deux langues, l’anglais et le français, afin d’identifier des récurrences qui pourraient être significatives de représentations spécifiques liées à la surdité profonde prélinguistique. Ma contribution au domaine de la surdité profonde devrait aider les praticiens à intervenir au niveau de la langue mais aussi à celui du langage, niveau des concepts et des représentations.
Le cadre de mes analyses est la théorie des opérations énonciatives (Culioli, 1990 & 1999), inspirée de Benveniste, pour qui le sujet énonciateur est le lien entre le langage et la langue. Le sujet énonciateur, instance du langage et lieu conceptuel des choix et des repérages, est à distinguer du locuteur, instance de la langue et « sujet parlant ». Pour Lapaire (2009 : 58), le locuteur est « un sujet cognitif et un acteur social, intégré à un environnement culturel et interagissant avec lui ».
L’être humain devient sujet par divers processus qui permettent le développement des représentations et l’accès au symbolique.
Des expérimentations menées par Fagan (cité par Dortier, 2014b : 199) montrent la capacité des tout-petits à mettre en œuvre une catégorisation (Dutilleul-Guerroudj, 2005 ; Markman, 1989) et une conceptualisation des connaissances dès 5 à 7 mois, donc à une période où l’enfant sourd n’est pas encore appareillé (ni implanté). La perception d’événements, séquences de variations d’entités dans l’espace, permet l’acquisition des représentations spatiale et temporelle (Delmas, 2009 : 8). Pour les enfants sourds profonds, les premières catégorisations et conceptualisations s’effectuent donc en l’absence d’audition, alors que l’audition est par ailleurs reconnue comme vecteur principal de la perception de l’espace et donc du temps (Lafon, 1985).
Le jeu avec le miroir favorise le processus de reconnaissance de soi. Selon Zazzo, cité par Morgenstern (2006 : 45), ce processus commence entre 10 et 18 mois et se développe jusqu’à 36 mois. En s’objectivant corporellement, le bébé peut construire une représentation de lui-même et devenir un objet de son propre discours.
Le passage du non-symbolique au symbolique est marqué par des gestes ritualisés puis des gestes à valeur de signes (Tomasello, 2003 : 32-34), comme le pointer du doigt destiné à diriger l’attention du co-locuteur. Il apparaît entre 11 et 13 mois et manifeste la prise en compte de l’autre par le bébé. Cette étape est essentielle : vers 15 mois, le pointer du doigt ou son absence ont une valeur prédictive du développement du langage (Robichez-Dispa et Cyrulnik, 1992).
Le jeu symbolique, notamment celui de l’adulte qui fait mine de disparaître en se cachant derrière un objet avant de réapparaître, est essentiel pour le langage : le bébé associe l’absence à la réapparition qui lui fait suite. La personne absente reste présente sous forme d’une représentation (re-présent-ation) qu’en construit le bébé.
Le corps, par les sens et le mouvement, joue un rôle de « prisme de la connaissance et des savoir et savoir-faire linguistiques » (Guignard, 2012 : 16). Selon Lakoff (1987 : 267), l’expérience corporelle est première et génère la formation pré-conceptuelle des schèmes-images qui modélisent les concepts (Guignard, 2012 : 77). Il y a donc des corrélations entre perception et conception, unifiées sous le terme de « ception » (Lakoff et Johnson, 1999 : 37).
Dortier (2014a) fait une synthèse des connaissances sur les liens entre les schémas cognitifs et les représentations linguistiques sous-jacentes à l’utilisation d’une langue, grâce aux contributions de spécialistes des sciences cognitives, des neurosciences et des sciences du langage (Reboul, 2014 ; Rossi, 2014 ; Fuchs, 2014).
Le lien entre le cognitif et les représentations linguistiques était déjà établi par Guillaume (1990) pour qui « le langage humain n’existe qu’à partir du moment où le vécu expérimental est mué en représentation » (Leçons 1956-57), au sens de reconstruction de la réalité perçue. Le langage consiste principalement à communiquer des représentations mentales, fondées sur des schémas cognitifs.
Dans la théorie des opérations énonciatives, les représentations mentales sont des « notions » ; ce sont des « systèmes de représentation complexes de propriétés physico-culturelles d’ordre cognitif » (Culioli, 1990 : 50), issus d’un filtrage culturel et d’une restructuration de l’extralinguistique (une représentation du monde).
Malgré les progrès techniques dans le domaine de la réhabilitation auditive, l’absence d’audition chez le jeune sourd profond reste une réalité tant que la surdité n’est pas diagnostiquée et qu’une forme de réhabilitation n’a pas été mise en place. Cette phase se situe à une période de la vie où l’enfant, sur la base de son expérience sensori-motrice, commence à développer sa connaissance du monde perçu et à la traiter par des processus cognitifs qui l’ordonnent et la structurent.
Chez un individu, les représentations qui en résultent ont des traits spécifiques (l’expérience qu’il fait de son cadre de vie est unique et personnelle) mais elles présentent aussi des traits partagés par les membres de la communauté humaine qui ont le même cadre de vie (Vincent-Durroux, 2013). Les personnes sourdes de naissance constituent une communauté cognitive en soi puisqu’elles partagent le fait que la perception auditive ne participe pas à leur expérience sensorielle initiale.
Puisque la langue unifie une communauté cognitive (Donald, 2001, cité par Lapaire, 2006 : 16), les enfants sourds pourraient, sur la base des conceptions et des représentations propres aux sourds, configurer leur langue de référence d’une manière qui leur serait commune.
Ma recherche découle des éléments présentés ci-dessus et des travaux de Charrow (1975) qui fait l’hypothèse du Deaf English, reconfiguration systématique de la langue anglaise par les sourds anglophones, en établissant des liens entre divers pans de la langue, contrairement à ce que faisaient et font encore la plupart des travaux. Mon hypothèse est plus large : les « langues sourdes » seraient des reconfigurations des langues de référence, reconfigurations dues aux représentations cognitives propres aux sourds (Vincent-Durroux, 2009).
Pour caractériser les répercussions éventuelles de la surdité sur la langue orale et le langage chez les sourds, j’ai recueilli des données orales en deux langues et sur différentes tâches, chez des adolescents oralistes au développement linguistique stabilisé (Bochner et Albertini, 1988), fondé sur des réalités neurologiques et cognitives (Droit-Volet, 2001 : 28). Les sujets enregistrés n’ont pas eu recours aux langues des signes2 : leur caractère visuel peut conduire à une réaffectation des aires cérébrales (Dumont, 1996 : 43) et avoir une influence sur l’usage de la langue orale de référence.
Pour faire émerger des formes linguistiques variées, différents types de discours ont été sollicités : la narration, la description et l’argumentation. Le discours narratif suppose un cadre temporel évolutif et un déroulement chronologique antérieur au moment de l’énonciation. Il peut faire surgir du discours direct et du discours rapporté, avec les repérages qui leur sont propres. Le discours descriptif porte souvent sur l’organisation spatiale, mettant à contribution la détermination nominale. Enfin, le discours argumentatif s’appuie sur la position adverse attribuée au co-énonciateur. Des formes de modalisation sont attendues.
Les tâches demandées ont été une description sans support fourni, une description avec un support fourni, une narration sans support fourni, une narration avec un support fourni et une tâche d’argumentation.
Afin d’évaluer l’effet des progrès en perception apportés par les nouvelles formes de réhabilitation auditive, j’ai constitué deux corpus : le premier en 1988 au Canada; le second en 2006, en France et en Angleterre3. Les sourds enregistrés en 1988 avaient des prothèses au bénéfice très limité, conduisant parfois les sujets à les enlever ou les éteindre. Les sujets de 2006 avaient des gains situant leur perception dans la zone de fréquence de la conversation. Ils avaient un implant cochléaire unilatéral (Nucleus 22-channel) depuis au moins sept ans.
En tout, 20 sujets oralistes (10 francophones et 10 anglophones) ont participé à l’étude. Ils avaient tous une surdité bilatérale, congénitale, un seuil de la meilleure oreille supérieur à 100 dB sans prothèse et n’avaient aucun handicap associé.
Les données ont été transcrites de manière orthographique et réparties en unités de communication (Loban, 1976) : une UC est une prédication grammaticale indépendante. Les deux corpus comportent un peu plus de 4200 UC (Vincent-Durroux, 2014).
L’activité de pensée conduit à mettre en relation des notions (la prédication), typiquement trois éléments, dont deux de même nature, associées par un relateur (R). Les relations prédicatives sont notées <a, R, b>.
Le marqueur préférentiel utilisé pour renvoyer à la notion est le marqueur Ø en anglais (tea is cheaper than coffee) et dans certains usages du français (il y a café et café). Ce marqueur est très fréquent dans les deux corpus :
(1) [ils sont habillés comment]
habit un un un petit chandail (mjl128)4
La cause de l’emploi récurrent du déterminant Ø par les sourds pourrait être que les déterminants sont généralement inaccentués, donc peu audibles et peu reproduits.
Certains éléments contextuels (en italique) signalent le renvoi effectif à la notion ; le sujet évalue le choix de la notion :
(2) il y a comme une petite cave (TM36)
(3) it’s like a football pitch (BL8)
(4) une petite maison normale hein (TM1)
Dans les langues de référence, les prédications prennent la forme canonique ternaire S-V-O, avec verbe obligatoire. L’immense majorité des énoncés des deux corpus comporte un verbe. Toutefois on remarque l’absence de verbe avec des adjectifs dans des formes syntaxiques binaires calquant la structure sémantique thème-rhème :
(5) le bébé triste (jd325)
(6) puis l’intérieur jaune (na231)
(7) la maison couleur sable (TM13)
(8) our kitchen quite small (EB7)
Les répétitions tautologiques dans les corpus montrent par ailleurs que la relation de prédication ne constitue pas une unité solide, avec l’abandon du sujet :
(9) et il attend le taxi
attend le taxi (mjl53)
(10) and
and he
like it took much time
it took much time
took much time (ms185)
Quant aux syntagmes, ils ont un caractère unitaire chez les entendants, mis en évidence par la remontée au début du syntagme en cas de reprise / répétition. Cette remontée est rendue visible par une représentation paradigmatique (Blanche-Benveniste, 1985) :
(11) ce sont les voiles qui vont sur le
qui iraient plutôt sur le mât
Dans les deux corpus, de nombreuses occurrences se distinguent par l’absence de remontée au début du syntagme. En cas de modification du nom, du pronom ou du déterminant, il n’y a pas de remontée au déterminant (12), ni à la préposition le cas échéant (13). La reprise suit la structure d’une apposition, rendant l’interprétation confuse :
(12) my home
apartment (dd7)
(13) et on descend c’est comme une petite cave avec la machine à laver euh
sèche-linge (TM36)
Lorsque la reprise est motivée par l’ajout d’un adjectif, le locuteur devrait remonter au mot de fonction ; or, dans tous les cas, la reprise débute avec l’adjectif ajouté (14-15) : l’adjectif représente pour les sourds une forme de détermination qui se substitue au déterminant (Vincent-Durroux, 1999) :
(14) they cut them a bed
double bed (dd84)
(15) when the m- the man’s had him up of the b-
wrecked boat boat (AX72)
Des principes d’économie pourraient être mis en œuvre : ce qui n’est pas modifié n’est pas repris car, pour les sujets sourds, la cohésion des syntagmes et celle des relations prédicatives diffèrent par rapport aux entendants.
L’audition joue un rôle important dans l’acquisition des conceptions spatio-temporelles. Celles-ci engagent notamment la gestion de la temporalité et celle des relations spatiales dans la langue.
Pour la temporalité, le concept de repérage temporel de la théorie des opérations énonciatives établit que le temps de l’énoncé est repéré par rapport à la situation d’énonciation, temps-origine. Ils peuvent coïncider (présent en anglais et en français, present perfect en anglais) ou être différenciés voire en rupture (imparfait, passé simple, passé composé en français et futur et prétérit en anglais).
Dans les corpus, l’emploi de l’imparfait et du prétérit dans les passages descriptifs est récurrent. Ces formes expriment une rupture entre le moment de l’énonciation et le référent. Elles pourraient souligner la préexistence du référent décrit, là où le présent serait le temps choisi par les entendants :
(16) là le mur elle avait avec un miroir (mjl7)
(17) et dans salle à rentrée il y avait une une objet un peu géante (SM8)
(18) la fenêtre était ouverte (kg160)
(19) eh ben la forme de la maison elle était est en forme de carré avec un espèce de rectangle sur le côté (AG1)
On constate par ailleurs une grande instabilité des formes verbales à l’intérieur du même passage narratif. Le changement de repérages le plus fréquent est celui où le verbe initial est au passé, suivi de verbes au présent (20 à 24) :
(20) la veille de Noël je suis allée chez ma grand-mère mais il y a beaucoup de monde chez ma grand-papa (jd283-284)
(21) j’avais voyagé avec mes parents puis je promène dans un panier jaune (na190-192)
(22) et après quand il était dehors il y a il y a des il y a des plein de jouets (SM79)
(23) last October we had a birthday-party (…) and we have lots of soft drinks (sb136-139)
(24) the children seemed quite happy and seem to enjoy this little trip with the frog seeing all these animals in different colours (LS138)
Certains de ces énoncés comportent des indicateurs de consécution temporelle à la jonction des séquences au passé et au présent : mais, puis, et, ensuite, après, and, and then. Ces termes indiquent l’ordre des procès situés dans un ancrage temporel mais n’indiquent pas en eux-mêmes la valeur de cet ancrage.
Dans ces séquences, le repère est posé une fois dans la morphologie verbale et n’est pas redonné dans la morphologie tant que le sujet ne souhaite pas le modifier. Il y a alors une stratégie d’économie mais aussi sans doute une difficulté à appréhender le système temporel grammaticalisé.
On note que dans les langues signées, le repère est généralement défini par un signe effectué au début de la narration et n’est pas rappelé tant qu’il n’est pas modifié, par exemple en Langue des Signes Américaine (Humphries et al., 1980 : 46-51 ; Cokely et Baker, 1980 : 34) ou en Langue des Signes Québécoise (Lacerte, 1993 : 140).
Pour ce qui est des repérages liés à l’espace, mes analyses portent sur la détermination nominale et sur les prépositions (Vincent-Durroux, 2008).
Le déterminant nominal montre comment le référent est situé par rapport aux autres occurrences de la même notion. Il s’agit du pôle qualitatif de la détermination. Par ailleurs, certains termes délimitent l’expansion du référent : adjectifs, groupes prépositionnels, propositions subordonnées relatives. Ils correspondent au pôle quantitatif, lié à l’ancrage de l’occurrence. Sous ces deux aspects, la détermination est en lien avec la spatialité, du moins au plan symbolique.
Les corpus font apparaître des formes récurrentes où la détermination est assurée de manière spécifique, selon un système régulier. Ainsi, en association avec le déterminant Æ (figurant le choix de la notion et la valeur strictement qualitative), un rôle de détermination semble dévolu à ce qui limite l’expansion du nom (le pôle quantitatif). Il s’agit souvent d’indications visuelles, exprimées par des adjectifs indiquant des aspects spécifiques à l’occurrence, comme :
- sa couleur :
(25) il a manteau bleu royal (kg103)
(26) and she he was cuddling blue monkey (BL115)
- sa taille :
(27) le bébé prend petite pelle (jd331)
(28) the garden we’ve got big garden (AX11)
- sa position dans le temps ou l’espace :
(29) été prochain oui (GP127)
(30) my bureau is right right side (sb32)
Des groupes prépositionnels permettent aussi de construire l’occurrence en ciblant des propriétés non essentielles telles que :
- sa fonction :
(31) y’a machine pour presser des oranges (na61)
(32) and my mother’s desk is desk for homework (sb27)
- sa localisation :
(33) it has road on the front (sb47)
(34) y’avait oiseaux des fois par dessus (kg269)
- son destinataire :
(35) il donne nourriture au singe et au grenouille (SM84)
(36) il a acheté laveuse pour nous autres (jd131)
Les énumérations présentent elles aussi des traits spécifiques et systématiques :
(37) puis y’a des pommes farine poires sucre sel (na150)
(38) and then the cat and dog is looking at pie (sb114)
(39) there’s a clerk and shelf (sb72)
(40) there’s a boy and girl who is playing on the blue computer (AX80)
(41) and when the pink hippo and cat were playing a dance the e- the green elephant and cow and pink horse and and red lion were talking together (AM106)
Après sa première mention, il y a abandon définitif du déterminant, rappelant ce qui se produit avec le repérage temporel. Deux hypothèses sont envisageables :
(1) l’énumération est considérée comme une unité nécessitant un seul déterminant. Cette unité est attestée par la forme singulier du verbe en (38-40) : the cat and dog is looking, there’s a clerk and shelf, there’s a boy and girl who is playing.
(2) l’opération de détermination est conçue comme distributive. Cette hypothèse ne convient pas si des déterminants variés sont attendus, comme en (37) où des ne peut convenir à tous les termes : des pommes *des farine des poires *des sucre *des sel.
La spatialité est impliquée dans les prépositions. Celles-ci ont, pour la plupart, leur origine dans l’expression d’une relation spatiale (Groussier, 1997). Les prépositions sont employées dans un sens propre (souvent spatial) ou dans un sens dérivé (souvent temporel). L’emploi des prépositions est deux fois moins problématique dans le corpus de 2006 que dans celui de 1988; mais les analyses demeurent :
- préposition superflue :
(42) le mur elle avait avec un miroir (mjl7)
- préposition non adaptée au contexte :
(43) après il va dans la caissière (mjl44)
- absence de préposition :
(44) ils rentrent leur lit (MR98)
Les deux derniers cas sont les plus courants : 38% et 50% respectivement dans les données de 1988; 44% et 39% en 2006. L’absence de préposition est donc un peu moins fréquente en 2006 qu’en 1988 mais il y a plus de prépositions inadaptées au contexte en 2006. Lorsqu’il est fait référence à une situation qui implique de plus une valeur aspectuelle, cette complexité entraîne davantage de formes inadaptées (Vincent-Durroux, 2015).
L’étude des prépositions non adaptées met en évidence une valeur « passe-partout » pour les prépositions À et DANS dans le corpus de 1988, alors que les prépositions cibles seraient beaucoup plus spécialisées dans leurs indications spatiales. Dans le corpus de 2006, seule la préposition À joue ce rôle. Celle-ci est l’une des premières prépositions acquises (Sekali et Morgenstern, 2009) et à ce titre, elle a un rôle particulier dans l’organisation du système des prépositions, dont elle est en quelque sorte prototypique ; elle tient lieu de toutes les autres prépositions dans certains cas d’aphasie (Sahraoui, 2009). Chez les sourds, elle pourrait avoir gardé cette valeur prototypique.
Dans les deux corpus, des prépositions statiques sont employées pour des prépositions cibles dynamiques : dans pour VERS (45), in pour INTO (46) et of pour TO (47) :
(45) il va dans la caissière (mjl44)
(46) and and you walking next in the kitchen (sb11)
(47) the frog took them into the computer of the land of animals (AM96)
Cette tendance est à mettre en relation avec les expérimentations sans langage effectuées par Vinter (2000) : les enfants sourds ont un mode statique d’exploration de l’espace alors que les enfants entendants adoptent un mode dynamique.
Le grand nombre d’erreurs liées aux prépositions spatiales pourrait être significatif de la difficulté des sourds à s’approprier un système mis en place par les entendants, système sous-tendu par des représentations spatio-temporelles construites différemment.
Concernant les prépositions absentes, une mauvaise perception peut être invoquée. Les prépositions ne sont pas des mots particulièrement saillants dans le discours, et lorsqu’elles sont monosyllabiques, elles peuvent être inaccentuées (en anglais) ou élidées (en français). Une mauvaise perception en phase d’acquisition conduit à la construction de règles erronées et à des erreurs en production écrite et / ou orale (Huart, 2010). Celles-ci sont habituellement corrigées par l’entourage et la lecture. Une perception lacunaire et une fréquentation insuffisante de l’écrit pourraient expliquer l’absence de prépositions dans des exemples tels que :
(48) c’est le bowling Montpellier (SM49)
(49) le bébé a fini manger (jd354)
(50) we had pizza take away (SR32)
(51) it’s like a game Cluedo (EB55)
Cette hypothèse ne rend pas compte des cas où la préposition absente aurait été bien audible, car elle est dissyllabique : PENDANT, AVEC, UNDER, UNTIL, ou monosyllabique sans élision ni inaccentuation possibles : DANS ou IN. La raison est ailleurs. Les relations sans préposition dans les corpus relèvent d’un nombre limité de valeurs, selon une typologie inspirée de Cadiot (1997 : 279) : attribution / datif, but, cause, catégorisation, contenant, contenu, direction, localisation, métaphore, métonymie, possession, quantité. Sur 72 cas de prépositions absentes, les valeurs les plus représentées sont la localisation (37,6% dont 32% pour la localisation spatiale et 5,6% pour la localisation temporelle) et la catégorisation (40% dont 8,3% pour la qualité et 31,6% pour le type). Les prépositions absentes sont, pour plus de 75% d’entre elles, en rapport avec le domaine spatio-temporel5.
Qu’en est-il des prépositions en langues des signes ? De Vriendt et Rasquinet (1990) décrivent les relations qui font l’objet d’un signe à fonction de préposition et celles qui ne sont pas signées en Langue des Signes Belge (LSB). Sur les deux corpus, 50 relations sur 55 cas de préposition absente n’auraient pas été signées en LSB.
Les corrélations entre les deux corpus, entre les deux langues, entre les corpus oraux étudiés et les langues signées permettent d’indiquer que le langage des sourds est manifestement sous-tendu par des représentations spécifiques du temps et de l’espace.
L’activité de langage est symbolique : elle s’organise autour de représentations, objets avec lesquels jouer : jeux mais aussi jeu au sens de distance, témoignant d’une maîtrise avancée du langage et prenant des formes distanciées telles que l’humour, l’euphémisme et la métaphore.
La métaphore suppose le recours à des référents qui ne sont pas tous dans la situation, sans terme comparatif. Le jeu porte sur les représentations uniquement. Certaines expressions de type métaphorique émergent en 2006, avec des termes lexicaux tels que simple, lancer, coller, lâcher, bon ou encore brilliant (52-56) affectés d’une variation sémantique de type métaphorique. De même, on the computer (57-59) n’implique pas d’être physiquement sur ou au-dessus de l’ordinateur et over n’a pas son sens propre en (60-61) :
(52) un simple dessin (AG32)
(53) nous avons lancé le jeu (CM120)
(54) il va me coller tout le temps il va pas me lâcher les baskets (CM200-201)
(55) ils sont sortis un bon matin vers neuf heures (GP61)
(56) this had a brilliant time (AX73)
(57) they were actually on the computer (EB99)
(58) the two children are playing on the computer playing games on it (EB93)
(59) and they went on the computer straight away (BL98)
(60) I had my friends my school friends over (EB53)
(61) in case I have a friend to sleep over (BL23)
Dans l’euphémisme, l’énonciateur prend en compte l’effet que pourrait produire son discours, juge cela choquant et l’atténue. Ces opérations s’effectuent sur des représentations : le discours initial n’est pas produit mais seulement imaginé (Vincent-Durroux, 2010). Le corpus de 1988 ne comporte que deux occurrences d’euphémisme, à propos du handicap auditif :
(62) mais y’en a beaucoup monde il parle en même temps puis j’entends pas beaucoup (jd291-294)
(63) ah oui je veux le savoir écouter mais j’avais beaucoup un peu la difficulté (…) puis y’avait plusieurs d’amies m’expliquent pour je n’entends pas bien (mjl90-99)
Dans le corpus de 2006, les emplois de ce type ne concernent pas le handicap de la surdité :
(64) he got milk and and breakfast stuff and medicines because I think he’s not feeling very well (AX39)
(65) hum well but my friends haven’t really invited Leo (AX123)
(66) because she because she don’t know my old friend very much and I don’t think she will enjoy herself (EB166-170)
(67) it’s a bit harsh on me (AM129-133)
L’humour se caractérise par une prise de recul sur une représentation. Alors que le corpus de 1988 ne comporte aucun trait d’humour, le corpus de 2006 en comporte plusieurs occurrences :
(68) I was hoping there’d be a big present on the table which was a big present hum I got an i-pod speakers (LS89-90)
(69) en avion (…) c’est quoi le prix Internet prix avion pour l’Italie ouai huit cent soixante-quinze euro euh ouai bon on verra bien hein (GP113-119)
(70) il y a pas de tour à exploser là-bas t’inquiète ah non ouai il y a Pise (GP98-101)
L’énoncé (68) comporte un jeu sur big, au sens concret puis symbolique. En (69), le sujet GP mime la recherche d’un prix qui doit être modique pour être un argument en faveur de son voyage. Or GP donne un prix très élevé, reconnaît son erreur (euh ouai) et reporte son argument : on verra bien hein. En (70), l’humour concerne la comparaison ridicule entre les « tours jumelles » de New York et la tour de Pise.
Les phénomènes récurrents sont moins largement représentés chez les sujets dont la réhabilitation perceptuelle est bonne et ils pourraient passer inaperçus. Une certaine vigilance s’impose donc.
Les sourds ne traitent pas comme des unités les syntagmes et les relations prédicatives. Chez les locuteurs entendants, l’existence de ces unités se perçoit par des groupes de souffle délimités par des pauses silence, pauses qui n’interviennent pas à l’intérieur d’un syntagme, ni entre le sujet et le verbe. Les praticiens pourraient associer un entraînement sur le niveau de remontée dans la production de reprises et de répétitions, à un travail sur les groupes de souffle, tant en perception qu’en production.
Les énumérations constituent en revanche une unité pour les sourds (déterminant unique). Là aussi, un travail sur le souffle et les pauses qui délimitent les éléments constitutifs des énumérations pourrait être utile.
Concernant les prépositions, un travail est nécessaire sur la variété des prépositions, sur les différences entre les emplois statiques et les emplois dynamiques faisant défaut et sur la représentation de l’espace symbolique dans lequel s’inscrivent le mouvement et l’événement.
Dans la temporalité, les locuteurs sourds sont sensibles à la consécution des événements, dans un rapport ténu avec l’extralinguistique. Un travail peut être suggéré, autour de narrations qui réorganisent les événements de manière autre que consécutive, nécessitant de jouer avec leurs représentations.
De manière générale, quand les observations concernent les représentations spatio-temporelles, il sera utile de chercher à faire porter les interventions sur le langage, au-delà des formes observées dans la langue.
[1] Par langue de référence, je désigne la langue orale utilisée dans l’environnement de l’enfant.
[2] Il faut distinguer les langues signées, aux structures syntaxiques propres, et les codages manuels de type LPC (Langage Parlé Complété), Français signé ou Anglais signé, qui se superposent à la langue orale pour lever certaines ambiguïtés en lecture labiale. Ces codages ont vocation à être temporaires.
[3] Le corpus de 1988 a été recueilli pour ma thèse de doctorat (Ph.D. en Études françaises à l’Université de Sherbrooke, Québec, Canada), avec une bourse de l’Entraide Universitaire Mondiale du Canada de 1987 à 1990. En 2006, le recueil des données a été soutenu par l’Equipe d’Accueil 741 (EMMA – Etudes Montpelliéraines du Monde Anglophone, Université de Montpellier 3). Je remercie ces organismes, les enfants et adolescents participant à cette étude, leurs parents, leurs orthophonistes, les Professeurs Danon-Boileau, Dubuisson, Joly, Léard et Mondain.
[4] Les énoncés cités sont identifiés par des lettres et des chiffres. Les lettres minuscules renvoient au corpus de 1988 et les lettres majuscules à celui de 2006.
[5] La catégorisation concerne des relations abstraites entre les référents avec une hiérarchie entre type et sous-type ; cette hiérarchie est souvent représentée visuellement ou linguistiquement par des images d’emboîtement, donc par une image inscrite dans l’espace.
Résumé
Quelles sont les répercussions de la surdité profonde sur le langage ? Comment se manifestent-elles dans la langue orale des jeunes sourds ? Cet article a pour objet de présenter des travaux d’analyse linguistique sur la langue orale des jeunes sourds profonds oralistes et de mettre en évidence des prolongements possibles pour les praticiens. Après quelques précisions sur des concepts linguistiques pertinents (langage, langues, sujet énonciateur et sujet cognitif) et sur les choix méthodologiques effectués (corpus et moyens d’analyse), nous montrons que les spécificités relevées font système et renvoient à des éléments fondateurs d’ordre conceptuel (prédication, repérages et syntagmes). Leur manifestation est parfois discrète, notamment chez des sujets ayant une bonne réhabilitation auditive depuis plusieurs années. Par ailleurs, des formes émergentes dans nos données les plus récentes pourraient constituer des points d’appui pour aider les jeunes sourds à développer leur maîtrise langagière : il s’agit de l’humour, ainsi que des emplois métaphoriques et euphémiques.
Abstract
What are the consequences of profound deafness on the faculty of language? How do they show in the spoken language of deaf youngsters? This article is based on results of linguistic analyses on spoken data yielded by oral deaf youngsters. Some suggestions based on these results are provided for praticians, The first sections of the paper detail the relevant linguistic concepts and the methodology of our study (data collection and analysis). Linguistic specificities as evidenced by the analysis are then developed. They happen to constitute a system related to major conceptual linguistic operations, such as predication, localisation, and syntax. These specificities may be unobtrusive, especially in speakers with good rehabilitation of hearing loss. Yet they need to be taken into account by praticians. To that effect, the forms of speech that appear to be emerging in our data, such as humour, euphemism and metaphors, could serve as new points of support for praticians.
Des schémas cognitifs aux représentations linguistiques
Le sujet dont la surdité profonde est prélinguistique
La démarche : du Deaf English aux « langues sourdes »
Formes récurrentes, formes émergentes dans les corpus
Formes spécifiques récurrentes
Eléments constitutifs des énoncés : notions, prédication, syntagmes
Laurence VINCENT-DURROUX
Université Grenoble Alpes, Laboratoire LIDILEM
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