Notre approche1 du langage est clinique et théorique, elle n’est pas expérimentale. L’approche théorique est celle du linguiste qui s’intéresse aux faits de langue, mais aussi aux différentes composantes d’une sémiotique générale, c’est-à-dire à l’ensemble des éléments de langage (ici entendu au sens large) qui fonctionnent comme signes. L’approche clinique vient d’une expérience de soins de trente ans auprès de bébés souffrants accueillis à l’Institut Départemental de l’Enfance et de la Famille (IDEF) du Rhône, et d’adolescents accueillis à la Maison des Adolescents du Rhône (MDA 69). Les bébés et, d’une manière moins explicite, les adolescents expriment leurs souffrances par diverses perturbations des fonctions et des rythmes corporels qui peuvent être comprises comme un langage préverbal, en ce sens que la bonne « lecture » de ce langage permettra de comprendre ce qui s’exprime et de communiquer avec le bébé ou l’adolescent souffrant. Nous concevons ces perturbations comme un langage préverbal parce qu’elles se situent juste avant l’accès au verbal, et que l’accompagnement soignant visera précisément à permettre à ces sujets souffrants de lier leur souffrance à des contenus signifiés, partageables à travers le langage verbal. Il faut préciser que ces perturbations des fonctions et des rythmes corporels (troubles du sommeil, du tonus, de l’alimentation, addictions à la lumière ou au son pour dormir, ou à d’autres substances, scarifications ou tentatives de suicide, comportements violents etc.) font partie de la dépression du nourrisson ou de l’adolescent, mais qu’elles ne sont pas analysées ici comme éléments de pathologies du spectre autistique, même si certaines « attitudes autistiques » du nourrisson pourraient y faire penser.
Les dispositifs de soin mis en place comportent des présupposés théoriques sur le contenu et l’articulation de ces « langages » préverbaux avec le fonctionnement psychique : qu’il s’agisse par exemple des soins par l’échange relationnel qui se développe dans l’eau pour les bébés, ou en situation familiale et dans des groupes à médiation pour les ados. Ces dispositifs visent à permettre un processus de transformation des langages préverbaux, en passant par le perceptif qui s’associe progressivement à des contenus émotionnels et affectifs. Les présupposés théoriques qui président à la construction de ces dispositifs, et aux processus qu’ils peuvent permettre, sont vérifiés tout au long de ces soins et les résultats obtenus en attestent, même s’ils ne sont en rien comparables à des résultats expérimentaux. La psychologie expérimentale a en effet un objet différent, elle cherche à décrire et à expliquer certains événements ou comportements observés dans des conditions données, et bien souvent contrôlées, même si tout ne se fait plus en laboratoire (Myers & Hansen, 2003 : 14).
La troisième source de l’approche clinique et théorique présentée ici vient de l’expérience transférentielle de la situation analytique (Nassikas, 2012). Du fait de la régression psychique qui se développe dans le dispositif analytique, les expressions langagières verbales et préverbales (gestuelles mais aussi corporelles au sens large) se mêlent : il revient à l’analyste d’entendre le supplément de sens apporté par les éléments préverbaux et de permettre à l’analysant de formuler ces éléments. Ce que nous appelons ici éléments préverbaux implique une participation du corps tout entier à l’élaboration comme à la perception du sens. En témoignent les expressions artistiques qui toujours convoquent le corps au moins dans certaines phases de leur élaboration, mais aussi les sémiologies médicales qui décomposent le corps en organes. Ce corps affecté par le monde a donné lieu à toute une anthropologie pathique développée en Allemagne au début du 20e siècle (voir par ex. les travaux de Viktor von Weizsäcker) et, plus récemment, à l’essor de l’empathie (y compris à travers sa technicisation robotisée) ou de l’haptonomie.
Le point de convergence théorique majeur des approches linguistiques et psychanalytiques mises en dialogue dans cette contribution porte sur la deixis, qui regroupe un ensemble de marqueurs ou signifiants dont le sens se construit en situation, c’est-à-dire en lien avec la situation dans laquelle ils ont été produits ou énoncés. Ainsi de « ce livre » qui, à la différence de « le livre de Pierre » introduit une référence variable, comme l’explique bien André Rousseau (Rousseau, 1990 : 366). C’est justement parce qu’aucun déictique ne peut être compris sans lien avec la situation d’énonciation que les déictiques impliquent toujours la prise en compte d’éléments perceptifs : nous le voyons bien dans le cas de gestes déictiques de pointage, où ces éléments perceptifs sont absolument nécessaires. Dans de nombreuses cultures, ce doigt pointé se distingue nettement du geste de préhension ou même d’autres gestes plus iconiques : c’est seulement quand le co-énonciateur regarde l’objet pointé en cherchant à comprendre pourquoi il lui est désigné que le geste prend tout son sens et devient un véritable signe. Lorsqu’un enfant montre à sa mère un pantalon en demandant « Papa ? »2, il convoque un ensemble de vécus et de souvenirs communs liés à ce pantalon et il ouvre ainsi un espace d’interprétation et de dialogue. C’est précisément cela qui définit la deixis au sens où nous l’entendons : la participation du vécu perceptif d’un sujet à la co-construction du sens, qui se situe alors au croisement de vécus corporels et sensoriels ou percepts, et de perception-réception de ce qui nous entoure, c’est-à-dire aussi l’articulation des échanges verbaux avec un langage affectif et perceptif constitué de « traces » qui accompagnent nécessairement le langage verbal.
La vie psychique du nourrisson se développe à partir d’un substrat biologique, et les logiques du vivant (bio-logiques) fonctionnent sur des principes d’auto-organisation. Or l’intériorisation psychique de l’absence, dominée par le développement pulsionnel et fantasmatique sur l’axe du plaisir-déplaisir, retraduit en partie ces logiques en les intégrant dans des logiques psychiques (psycho-logiques), indexant l’objet absent au signe (Nassikas, 1996). De telles traductions se produisent tout au long de la vie, mais elles prennent une place fondamentale dans la vie du nourrisson, dont les aptitudes à la communication se développent sur fond de savoir pré-discursif : on repère déjà chez le fœtus des logiques qui sont autant de codes et structures perceptives se rapportant aux présences de son entourage. Ces logiques sont issues de la sensorialité du fœtus –audition, olfaction, rythmes, kinesthésies etc. Tout ceci n’est bien sûr pas automatique, la rencontre du savoir pré-discursif du sujet naissant avec ses objets demande un temps d’accordage affectif qui passe par différentes modalités perceptives et qui est, de ce fait, multimodal et trans-modal (Stern, 1985). Les parents et les proches de l’enfant sont amenés à proposer des traductions de ces structures perceptives et ces traductions dépendent de leurs capacités à l’empathie et à la rêverie. Elles contribuent à donner du sens aux vécus du bébé en même temps qu’elles lient structures perceptives et syntaxes langagières.
Cependant, dans les premiers temps de la vie psychique, le lieu de présence de l’autre se situe à l’intérieur du sentir, d’où cet autre qui est objet de satisfaction va progressivement s’absenter pour devenir représentation psychique. Ce qui rend possible ce passage, c’est ce que la Freud appelle l’auto-érostisme du nourrisson, c’est-à-dire son fonctionnement en vase clos qui le conduit à percevoir en lui-même l’origine de toute sensation, et à répéter les gestes qui correspondent à la satisfaction de ses besoins, par exemple en reproduisant le geste de la tétée en l’absence de sein ou de biberon. Cette reproduction hallucinatoire peut permettre l’attente de la satisfaction réelle des besoins, mais elle permet aussi et surtout à tout objet sensoriel de s’absenter et d’être remplacé par ses représentations psychiques. L’objet perdu-absent devient alors le destinataire du désir (de fusion, qui efface le manque), de l’imaginaire et des identifications, dans la mesure où l’objet est un autre sujet doué de désirs et d’un imaginaire qui lui sont propres.
L’objet de représentations est « négativisé » lorsque les preuves sensorielles de sa présence ne sont plus nécessaires, dans un mouvement qui permet de sortir d’un code de proto-significations binaires percepts-affects tout en garantissant un sentiment de continuité entre soi et l’objet. Ce mouvement accompagne la construction progressive de la deixis.
Pour Danon-Boileau, il y a bien plus dans le geste d’ostension que le prolongement de la préhension, « car seul l’homme qui symbolise est capable de désigner un objet sans le toucher » (Danon-Boileau, 1990 : 415). Il cite le geste de certains enfants autistes qui posent la main de l’adulte sur ce dont ils veulent se saisir plutôt que de pointer. Or même si dans la phylogenèse le geste de pointage dérive probablement du geste de préhension, et même si dans l’ontogenèse les manipulations et dons d’objets sont probablement des étapes nécessaires sur le plan moteur, le pointage, qui se met en place chez l’enfant aux alentours de neuf mois, n’est jamais uniquement une façon de se saisir d’un objet qui se trouve à distance. Il établit un objet d’attention conjointe et un thème conversationnel, et met ainsi en place une relation triadique entre locuteur, interlocuteur et objet attentionnel et conversationnel. C’est précisément ce triangle est au fondement de toute communication. En effet, lorsque l’enfant désigne l’objet pour l’adulte, il ne se contente pas d’instaurer une nouvelle manière d’agir sur les objets, sans contact direct avec eux, mais il ouvre aussi un espace du « vouloir dire » (Grice, 1957) qui va permettre aux interprétations de l’adulte de se déployer.
Ce détachement de l’objet désiré ou désigné est absolument nécessaire à la mise en place des premières désignations verbales (Rossi, 2012) et c’est dans ce mouvement que l’enfant construit sa place dans la relation d’interlocution et apprend à devenir énonciateur (Morgenstern, 1995 et 2009). Ce cheminement ne se fait pas en pleine conscience, et l’on parle plutôt d’acquisition que d’apprentissage, en raison de l’absence de procédés ou stratégies explicitement mises en place pour y parvenir : « l’acquisition langagière est un processus inconscient ; ceux qui acquièrent la langue ne sont pas conscients de ce fait, mais seulement du fait qu’ils utilisent la langue pour communiquer. Le résultat de l’acquisition – la compétence acquise – est elle aussi inconsciente. En général, nous ne sommes pas conscients des règles des langues que nous avons acquises. Nous “ressentons” ce qui est correct ou non » (Krashen, 1987 : 10, traduit par Hilton, 2014).
Le pointage peut s’accompagner de vocalisations ou de mots, et de manière générale, les premières productions langagières de l’enfant sont souvent déictiques, car elles sont très ancrées dans la situation d’interlocution. Même le babillage se module en situation et reprend les sons et courbes intonatives entendues, se faisant ainsi l’écho de partenaires conversationnels dont la présence se dessine en creux au moment où l’enfant babille. On le voit, les premières formes de communication sont déjà des manifestations de ce qu’Antoine Culioli (2002 : 27) appelait la co-énonciation, car tout locuteur est aussi son propre récepteur et parce que l’on ne peut être destinataire du langage de l’autre qu’en tant qu’émetteur potentiel.
En psychanalyse, la situation transférentielle semble être de nature à convoquer le dispositif déictique ainsi décrit (Nassikas, 2012). En effet, la tendance à l’actualisation pulsionnelle qui compose l’agir de la répétition transférentielle fait voir (de façon hallucinatoire) en la personne de l’analyste la présence invisible des objets infantiles, objets dont le sujet attend toujours des réponses et des satisfactions. Cette vision est composée de mouvements affectifs qui contiennent une sorte d’hallucination négative, à la recherche d’une représentation de l’objet du manque. C’est la désignation et la nomination des places des présents et des absents par l’analyste, ainsi que du sens et des enjeux de leurs relations, qui nous a conduits à décrire cette situation à la lumière des premières situations de communication et des premières productions langagières de l’enfant, et de voir dans la situation analytique une autre « fabrique de la langue ».
Il existe des situations où ce processus de négativisation de la présence perceptive de l’objet-autre répondant aux besoins physiques et psychiques du bébé échoue. Les raisons de cet échec peuvent être génétiques (obstacles neurologiques), biologiques, mais elles peuvent aussi constituer des échecs de l’accordage et du développement de la communication dans l’interaction. La difficulté ou l’impossibilité pour le bébé de solliciter en lui la représentation de l’objet absent l’oblige à le solliciter en le rendant présent dans ses perceptions sensorielles. Il s’agit alors d’une repositivisation de l’absence, par la voie sensorielle, à travers un autoérotisme régressif. Cette régression autoérotique réduit les échanges avec l’objet-autre à des proto-significations binaires, vidant progressivement cette relation de ses contenus imaginaires et érotiques. Cet auto(éro)tisme sans Éros donne lieu à des attitudes d’autostimulation à but auto-calmant que l’on retrouve dans bon nombre de pathologies du spectre autistique.
Les dépressions du nourrisson s’accompagnent souvent de telles autostimulations sensorielles : elles prennent la forme de balancements (pour se calmer ou pour s’endormir), de mérycisme ou d’autres troubles des conduites alimentaires, d’un besoin de stimulation sensorielle pour s’endormir (toucher, lumière, son etc.), d’hypertonies qui peuvent se transformer en hyperactivité quelques années plus tard. Ces formes d’autostimulations calmantes changent un peu de nature chez l’adolescent, où les scarifications et autres auto-traumatismes sont les formes les plus courantes, pouvant aller jusqu’aux tentatives de suicide. Les troubles des conduites alimentaires s’inscrivent dans une problématique plus globale regroupant plusieurs types d’autostimulations auto-calmantes : celle des addictions (Nassikas, 2009). Par analogie, on peut dire que ces modes d’expression sont structurés comme un langage et ont un fonctionnement sémiotique simplifié. Nous les appelons « langages perceptifs binaires » parce qu’ils déconstruisent la relation triadique à l’œuvre dans toute communication ordinaire. Ce langage binaire ne fait aucune place à l’intériorisation psychique de l’absence et ne permet pas à la subjectivité de se déployer dans un espace dialogique : il met en présence deux « ils » (c’est d’ailleurs le sens de la racine grecque auto), l’un répondant aux besoins de l’autre, sans construction possible puisque toute construction langagière nécessite le codage triadique du signe. On assiste alors à de simples « auto » réponses.
C’est ainsi que fonctionnait Sarah, placée à l’âge de six mois à la pouponnière de l’IDEF pour maltraitance parentale. Elle était dans un retrait relationnel quasi-total, acceptant les soins corporels dans l’indifférence, et le seul moment où elle semblait s’animer était celui de l’endormissement. De légers balancements de la tête se mettaient alors en marche, qui donnaient l’impression d’un auto-bercement. Comme le sommeil n’arrivait pas à s’installer, le balancement s’amplifiait jusqu’à ce que l’enfant vienne se cogner la tête aux barreaux du lit. Ces chocs semblaient constituer un message décisif permettant au sommeil de s’installer. Les soins mis en place à la pouponnière et auxquels elle était intégrée visaient à ouvrir ce langage binaire auto-calmant en utilisant sa propre sensorialité, pour l’acheminer vers une sensorialité associant le contact avec une autre personne et l’émotion, reconstruisant ainsi le percept-affect dans la relation intersubjective. Le dispositif mis en place associe les sensations aux qualifications affectives (bon, mauvais) au sein d’un groupe thérapeutique composé de deux ou trois bébés et de deux psychomotriciennes, dans une petite piscine remplie d’eau, qui est utilisée comme médiatrice, enveloppe permettant la détente et la fusion avec un élément objectal.
Différents jeux se mettent en place, permettant la progressive reconnaissance par l’enfant de partenaires interactionnels. Cette reconnaissance ne va jamais de soi : elle a nécessité l’accompagnement de l’auxiliaire de puériculture qui était la référente de l’enfant et avait déjà établi avec elle une relation de confiance. Les jeux pouvaient passer par des enveloppements consistant à se laisser aller dans l’eau, à s’allonger en appui sur les soignants ou sans appui, ou utiliser l’eau comme objet que l’on jette ou que l’on verse (les jeux de contenant-contenu pouvant être pratiqués avec des objets ou avec la bouche). À la manière des premiers jeux symboliques décrits par Bruner (1998) comme précurseurs de formes dialoguées plus complexes dont ils possèdent déjà la structure interactionnelle, l’association des percepts avec des affects et des émotions en jouant avec et dans l’eau ont permis à Sarah d’accepter la présence d’un autre puis de le reconnaître comme un partenaire de jeu, et donc aussi comme un interlocuteur. En signant la fin du repli relationnel de l’enfant, cette acceptation a aussi fait disparaître les balancements auto-calmants au moment du coucher, au profit d’un accompagnement fait de bercements.
En guise de conclusion, nous espérons avoir montré comment un dispositif de soin peut s’élaborer au croisement des théories cliniques, linguistiques, sémiotiques et psychanalytiques, et comment le fonctionnement des soins éclaire en retour les constructions théoriques qui ont permis de mettre ce dispositif en place. Sur le plan théorique, le point de rencontre que nous avons défini comme la deixis, dans son acception la plus large, est comprise comme l’un des premiers dispositifs permettant la négociation du sens. La primauté d’un tel dispositif suppose que la multimodalité soit au cœur de toute pratique langagière, et que la parole s’ancre dans des vécus corporels et affectifs toujours remis en jeu dans l’interaction.
[1] Kostas Nassikas est psychanalyste (membre de l’APF), Responsable Médical de la Maison des Adolescents du Rhône et chargé des cours à l’Univ. Lyon 1. Il co-organise à Lyon (avec d’autres psychanalystes, des linguistes et des poètes) un atelier sur le thème : « Fabriques de la langue ». Un colloque a eu lieu sur le même thème à l’ENS en 2010 ; dont les travaux ont été publiés aux PUF dans la collection « Le fil rouge » en 2012. Il a également publié sur le sujet : « Exils de langue », PUF, 2011, « Le langage perceptif du transfert » RFP, 2012, 4, « Le corps dans le langage des adolescents », Eres, 2009 et « Les autostimulations comme remplacement de la pensée du nourrisson » in Neuropsychiatrie Enfance Adolesc, 2001, 49, 42 (7). Caroline Rossi est linguiste, maître de conférences à l’Université Grenoble Alpes. Ancienne élève de l’École Normale Supérieure de Lettres et Sciences Humaines et agrégée d’anglais, son travail de thèse porte sur l’acquisition du langage. Elle co-anime avec Kostas Nassikas l’atelier « Fabriques de la langue » depuis plusieurs années, et a publié à la suite du colloque de 2010 « Des gestes qui font signe : fabriques mimétiques de la langue », in Nassikas, Prak-Derrington & Rossi (éd.) Fabriques de la langue, PUF.
[2] C’est un exemple emprunté à Moreau & Richelle, 1997.
Résumé
Fruit du dialogue entre un psychanalyste et une linguiste, cet article interroge l’articulation entre perception et langage. La réflexion présentée se situe en amont de productions langagières, elle concerne des langages préverbaux que nous appelons « langages perceptifs ». Nous nous intéressons d’abord aux premiers vécus du nourrisson. Nous accordons ensuite une attention particulière à la deixis et à la façon dont se construit la place du locuteur dans l’interaction. Enfin, les autostimulations calmantes et leurs fonctions sont analysées avant la présentation d’une vignette clinique.
Abstract
This paper questions the articulation between perception and language, based on a dialogue between a linguist and a psychoanalyst. The topics discussed occur before language production and concern preverbal languages that we have called “perceptual languages”. We are first interested in the first experiences of the infant. We then pay particular attention to deixis and the interactive construction of the speaker's place. Finally, calming self-stimulations and their functions are analysed and a short case study is presented.
Kostas NASSIKAS
Psychanalyste, Responsable Médical de la Maison des Adolescents du Rhône
K.Nassikas@maisondesados69.fr
Caroline ROSSI
Université Grenoble Alpes
caroline.rossi@univ-grenoble-alpes.fr
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