Lorsque Jean-Philippe Toussaint débute, en 1989, la rédaction de ce qui deviendra La Réticence, il souhaite, écrit-il dans un court texte publié sur son site Internet, « Le Jour où j’ai commencé à écrire La Réticence », écrire un roman à propos de son fils Jean, né quelques mois plus tôt, et dont la première phrase est : « Je vais vous parler de mon fils, je pense que cela peut vous intéresser »1. Toussaint, qui a déjà publié La Salle de Bain, Monsieur et L’Appareil-photo, vient d’achever le montage de l’adaptation cinématographique de Monsieur. Il se retire en Corse. Il est loin de savoir, à cet instant, que la rédaction de ce nouveau roman le verra produire 2500 pages de brouillons, avant d’en extraire 159 qui seront le texte définitif, achevé deux ans après, à Madrid. Plus tard, Toussaint poursuivra l’expérience de La Réticence en publiant sur son site Internet en 2002 ce texte, « Le Jour où j’ai commencé à écrire La Réticence », ainsi que la planche de photographies prises « Le Jour où... »2.
Pourquoi avoir publié ces éléments plus de dix ans après ? Il est possible que, ce faisant, Toussaint invite l’internaute à lire ou à relire La Réticence en lui proposant une « piste » pour emprunter à la terminologie du roman policier. Notre propos souhaite donc interroger le roman depuis ces éléments palimpsestes que constituent les ajouts a posteriori sur le site Internet. Dans « Le jour où j’ai commencé La Réticence », Toussaint écrit :
Maintenant, avec le recul, si on regarde la planche-contact du film que j'ai fait ce jour-là, on retrouve tous les éléments qui seront présents dans le livre, le chat mort dans le port, le village désert, la cabine téléphonique, et la présence-absence du narrateur, qui rôde entre les photos et rôdera plus tard entre les pages3.
Plus que la mise en relation des photographies avec le récit, c’est la mention « avec le recul » qui nous semble importante. Comment l’interpréter ? Toussaint se met – même si l’utilisation du « on » indéfini ne permet pas de l’affirmer absolument – dans la position de celui qui cherche à comprendre le roman qu’il a pourtant écrit. Le sens du roman lui aurait-il échappé ? Le sens de son écriture aussi ? Il serait à chercher dans cette série de photographies qui pourraient, a posteriori, proposer une explication.
C’est ce jour-là que m’est apparu que toutes les tentatives que j’avais échafaudées jusqu’alors pour entamer ce nouveau roman étaient comme empruntées et artificielles et pesaient de bien peu de poids à côté de la simple réalité. Et, de retour dans mon bureau, j’ai écrit d’un trait la première phrase : « Ce matin, il y avait un chat mort dans le port, un chat noir qui flottait à la surface de l'eau, il était droit et raide, et il dérivait lentement le long d’une barque4.
Mais Toussaint n’explique pas. Il relie le fait, le hasard
d’avoir rencontré le cadavre dans le port, avec l’écriture de la première
phrase sans dire ce que cette rencontre a suscité en lui. En publiant ces
photographies, il revient sur ce qui est l’élément déclencheur de la narration
en le transformant en événement, c’est-à-dire en un « hasard » qui
rompt l’habitude et qui cherche son explication. Si la séquence du chat mort
dans le port est, dans le roman, le résultat d’un hasard – rien ne vient
expliquer pourquoi le narrateur « rencontre » le cadavre du chat dans
le port –, le fait de publier les photographies oriente l’interprétation
du roman selon deux axes : le premier est celui de la relation
entre la fiction et la réalité, le deuxième est celui de l’importance du regard
dans sa relation à l’écriture. En effet, la séquence n’est plus liée au
narrateur exclusivement, mais à Toussaint lui-même aussi d’une part, – du
moins à un autre Toussaint, photographe – et à une signification qu’il
faut découvrir « après-coup » d’autre part.
Dans son séminaire XI, publié en 1973 sous le titre Les Quatre concepts fondamentaux de la psychanalyse, Lacan reprend à Aristote le terme de « tuchê » afin de définir un événement qui se donne comme au hasard mais qui, puisqu’il se répète, est l’expression d’un fait impossible à représenter qui ne doit rien au hasard et tout au nécessaire. Il l’oppose à l’« automaton », autre notion empruntée à Aristote qu’Agnès Sofiyana définit ainsi :
L’automaton est donc le réseau des signifiants, support de la parole et du discours. Le discours qui se répète est donc à situer du côté de l’automaton, sans but, réglé comme une équation, quand bien même ce discours aurait les qualités d’une association libre, c’est-à-dire emporté par le hasard de la pensée5.
L’analyste ne considérera plus le hasard comme hasard, mais
comme porteur d’un sens : devenu événement, il doit d’être interprété
selon un sens analogique puisqu’il est un symptôme ou une image recouvrant un
« impossible à dire ». Le chat mort dans le port n’est pas une image
issue du rêve ou de « l’imagination », comme l’affirme Toussaint
en publiant ces photographies, ces preuves. Le chat mort est une réalité
rencontrée dans le port de la ville corse où il habite. Mais lui-même n’a pas
utilisé la preuve pour construire le récit, il a seulement utilisé l’impression
que lui a laissée le cadavre du chat. Cette impression pourrait être ce qui
fait basculer la réalité vers la fiction, expliquant l’élaboration de La
Réticence. Or, il écrit, dans « Le jour où... » : «
Je ne sais pas – j’ai oublié – l’impression que me fit cette
découverte sur le moment [...] »6.
La proposition « j’ai oublié », mise entre tirets, semble ouvrir à un
accident, un « impossible à dire » dans lequel se lit le principe
même du roman.
La terminologie lacanienne semble pertinente pour traiter de La Réticence. S’il ne s’agit pas d’une théorie littéraire, elle propose un schéma de construction du discours en relation au réel qui est l’un des sujets de Toussaint. La « tuchê », nous dit Lacan, ne se repère que dans la répétition : « La répétition est quelque chose qui, de sa véritable nature, est toujours voilée dans l’analyse, à cause de l’identification de la répétition et du transfert dans la conceptualisation des analystes »7. La Réticence se construit sur la répétition, jamais identique, de la séquence relatée dans l’incipit, et photographiée dans le réel. La répétition, l’« automaton », empêche la « tuchê » de se dire, de s’incarner : la « tuchê » cependant se manifeste lors d’une coupure. La répétition est également le principe de construction du discours dissimulant le signifiant qui se dérobe alors qu’il est présent : c’est le sens que donne Lacan à la nouvelle La Lettre volée de Poe – lettre volée qui est un des éléments narratifs de La Réticence – où chaque scène reproduit l’autre scène dans sa structure mais où chaque personnage endosse un rôle interchangeable. La « tuchê », – la lettre volée qui ne sera jamais dévoilée – nous dit Lacan, se conçoit comme la rencontre avec le réel, rencontre toujours manquée.
Toussaint installe l’internaute dans la position du narrateur de La Réticence, celle de l’analyste devenu enquêteur, qui a la charge de comprendre la « tuchê » à travers l’« automaton ». La publication des photographies engage l’internaute à revenir au roman, en considérant l’incipit non pas pour ce qu’il est, mais comme l’écriture d’une image du réel en décalage d’une réalité, réalité qui empruntera au roman policier comme au roman fantastique. D’une certaine manière, en publiant ces photographies, Toussaint invite le lecteur, dix ans après, à reconsidérer un énième rendez-vous avec La Réticence.
La Réticence est construit sur la séquence du cadavre du chat noir flottant dans l’eau qui revient dans la narration, à chaque fois envisagée de façon différente.
Ce matin, il y avait un chat mort dans le port, un chat noir qui flottait à la surface de l’eau, il était droit et raide, et il dérivait lentement le long d’une barque. Hors de sa gueule pendait une tête de poisson décomposée de laquelle dépassait un fil de pêche cassé d’une longueur de trois ou quatre centimètres. Sur le moment, j’avais simplement imaginé que cette tête de poisson était ce qui restait d’un appât de ligne morte, le chat avait dû se pencher dans l’eau pour attraper le poisson, et, au moment de s’en saisir, l’hameçon accroché dans la gueule, il avait perdu l’équilibre et était tombé8.
L’objet de la séquence, « un chat mort dans le port », est précisé selon une logique qui dévoile et qui, en même temps, interroge : le chat, la gueule, l’hameçon, la tête de poisson et, enfin, le fil sectionné. Il ne s’agit pas d’une image fixe mais d’une image déjà en mouvement. Le premier mouvement est celui du cadavre, relayé par les verbes à l’imparfait, « flottait » et « dérivait » modalisé par l’adverbe « lentement », introduisant une temporalité incertaine, passée et pourtant proche du temps de l’énonciation comme le précisent les premiers mots du texte. Le second mouvement est celui de la perception du narrateur qui définit un ordre et une direction : l’ordre est celui, latéral, qui part du chat pour aller vers le fil de pêche, la direction est celle de l’agrandissement qui part du chat pour se centrer sur sa tête. D’emblée, le narrateur se définit comme un regard de type photographique. Dans Petite histoire de la photographie, Walter Benjamin écrit :
[...] la plus exacte technique peut donner à ses produits une valeur magique, beaucoup plus que celle dont pourrait jouir à nos yeux une image peinte. Malgré toute l’ingéniosité du photographe, malgré l’affectation de l’attitude de son modèle, le spectateur ressent le besoin irrésistible de chercher dans une telle image la plus petite étincelle de hasard [...]9.
Comment ? Par le ralenti et l’agrandissement10. Si on considère ces deux moyens par lesquels celui qui regarde devient lecteur de l’image, alors le mouvement du cadavre est avant tout le fait du regard du narrateur.
Les premières lignes de La Réticence posent donc un principe : en observant le réel comme on observe une image, le narrateur, dès la première séquence, s’énonce comme celui qui cherche dans le réel le « hasard » qu’évoque Benjamin et qu’évoquera plus tard, selon des modalités plus précises, Lacan. Le réel n’est pas donné. Il se dérobe dans la langue parce qu’il est, d’emblée, travaillé par le regard du narrateur qui occupe deux fonctions cohabitant tout au long du roman : celle de regarder le réel dans le présent et celle d’écrire le réel dans le décalage où s’entend le narrateur. Dans la troisième phrase de l’incipit, le pronom « Je », sujet du verbe « imaginer » au plus-que-parfait se révèle dans le discours non pas comme celui qui regarde mais comme celui qui cherche à comprendre ce qu’il regarde en essayant de construire un enchaînement de causes qui aboutiraient à ce que le « Je », implicite, invisible, a regardé. Le plus-que-parfait indique que la construction énoncée ne sera pas celle retenue. Le « Je » est à la fois regard et écriture du regard, écriture erronée. L’un des principes du roman se lit ici. Le narrateur cherchera à écrire l’enchaînement préalable des causes qui ont conduit le chat à flotter, mort, dans le port, et, l’écrivant, le rationalisant, à réduire ce décalage où il est contraint. Le narrateur cherche à comprendre le hasard.
De plus, Benjamin précise, de façon intuitive, que la recherche de ce « hasard » dans l’image est aussi celle d’un avenir :
[...] le besoin de trouver l’endroit invisible où, dans l’apparence de cette minute depuis longtemps écoulée, niche aujourd’hui encore l’avenir, et si éloquemment que, regardant en arrière, nous pouvons le découvrir11.
Le narrateur de La Réticence, après avoir relaté sa rencontre avec le cadavre du chat, déporte son regard sur l’eau, sur les eaux sombres. Bachelard note dans L’Eau et les rêves que la contemplation de l’eau amène à envisager notre avenir comme dissolution12 :
Or, en poésie dynamique, les choses ne sont pas ce qu’elles sont, elles sont ce qu’elles deviennent. Elles deviennent dans les images ce qu’elles deviennent dans notre rêverie, dans nos interminables songeries. Contempler l’eau, c’est s’écouler, c’est se dissoudre, c’est mourir13.
Voici ce que, dans La Réticence, le narrateur regarde dans les « eaux sombres » :
Les eaux du port étaient très sombres à l’endroit où je me trouvais, mais, de temps en temps, je devinais la présence d’un cortège de poissons qui passait en silence sous mes yeux, des labres ou des mulets, tandis que, tout au fond, parmi les algues et les cailloux, des myriades grouillantes d’alevins s’acharnaient sur le cadavre éventré d’une murène en décomposition14.
Le cadavre de la murène semble être le devenir du cadavre du chat, son avenir. Le narrateur « devine » d’abord la « présence d’un cortège » – à la connotation funéraire –, puis porte son regard sous la surface, pour y voir l’autre cadavre à un stade de décomposition avancé caractérisé par une coupure puisqu’il est « éventré », et par un voile qui le recouvre puisque c’est la présence des alevins en nombre qui signale le corps de la murène en instance de disparition. La séquence s’approfondit vers l’avenir. Elle semble être l’émanation d’un « impossible à dire » qui est aussi un impossible à voir : une « tuchê » voilée d’alevins.
À la fin de ce premier paragraphe, enfin, le narrateur quitte le quai. Il regarde à nouveau les eaux :
Avant de repartir, je m’attardai encore un instant sur la jetée à regarder le chat mort, qui continuait de dériver dans le port dans un très lent mouvement de va-et-vient, tantôt vers la gauche, et tantôt vers la droite, suivant le flux et le reflux imperceptible du courant à la surface de l’eau15.
Revenu vers la surface, vers le cadavre du chat noir, le regard retrouve son mouvement premier, celui de la lenteur, tandis que le mouvement de l’eau, celui du réel, est « imperceptible », c’est-à-dire échappant à la perception. Le réel se referme. La coupure également. Il faudra attendre que le cadavre du chat revienne dans la narration afin que soit reprise de nouveau la séquence de la rencontre ratée avec ce réel.
Le « hasard » veut que le cadavre rencontré soit celui d’un chat noir, topos de la culture populaire que l’on retrouve dans la littérature. Ce chat noir fait penser à celui de la nouvelle de Poe parce que l’auteur américain y met en scène un narrateur non fiable qui précise, dès l’incipit, qu’en dépit de sa folie identifiée par la justice, il n’est pas fou. Le lecteur se trouve donc confronté à un discours qui, potentiellement, peut être lu comme celui d’une reconstruction a posteriori de faits afin de justifier l’injustifiable, le meurtre de la femme16. La nouvelle interroge aussi l’image à l’intérieur de la réalité comme signe d’un basculement vers une irréalité : après avoir retiré un œil de son chat et l’avoir pendu avec une corde, et après l’incendie de sa demeure, le narrateur du Chat noir, visitant les ruines, voit, sur le seul mur intact, l’image de son chat. S’il trouve d’abord une explication logique à cette apparition, plus tard un autre chat, identique au premier, borgne également, entre dans sa réalité, l’amenant à tuer sa femme.
La Réticence s’amuse avec un certain nombre
d’éléments de la nouvelle de Poe : un chat noir mort et sa
« résurrection » ambiguë sous la forme du chat que le
narrateur rencontre au retour de son expédition nocturne chez Biaggi. Mais ce
qui rapproche surtout La Réticence du Chat noir, c’est ce
discours du narrateur qui tente de trouver une explication rationnelle à une
représentation irrationnelle.
La chute des autres murailles avait comprimé la victime de ma cruauté dans la substance du plâtre fraîchement étendu ; la chaux de ce mur, combinée avec les flammes et l’ammoniaque du cadavre, avait ainsi opéré l’image telle que je la voyais17.
Telle est l’explication que donne le narrateur du Chat noir à l’image du chat qu’il découvre sur le mur. À la fin de la première partie, après avoir raconté ses premiers jours à Sasuelo, le narrateur de La Réticence revient sur la séquence initiale : « C’est ce matin-là, peu avant le lever du soleil, que j’ai découvert le chat mort dans le port »18. Cette fois, le discours du narrateur évoque, « avec le recul », les circonstances dans lesquelles il a vu le cadavre. Il considère la forme, les angles, la perspective. Il n’écrit plus tant ce qu’il a vu, que les circonstances qui l’ont amené à voir le chat mort.
De la manière dont il était placé alors, il était impossible de voir sa tête, et ce n’est que lorsque le courant fit légèrement pivoter le corps sur lui-même que je me rendis compte qu’une tête de poisson pendait hors de sa gueule, de laquelle dépassait un fragment de fil de pêche cassé d’une longueur de trois ou quatre centimètres. Et c’est précisément la présence de ce fragment de fil de pêche dans sa gueule qui me fit penser, un peu plus tard dans la soirée – sur le moment, je l’avais simplement examiné distraitement, ce fragment de fil de pêche –, que le chat avait été assassiné19.
Le mouvement généré par le « courant » amène le narrateur à s’interroger sur les causes de ce qu’il a regardé. Plus précisément, nous dit-il, selon le principe de l’agrandissement, c’est le détail du fil de pêche qui retient son attention, non pas à l’instant, mais « dans la soirée ». La réalité se reconstruit alors « après coup » et s’interprète comme un récit policier : le fil de pêche devient l’instrument d’un crime dont le chat serait la victime.
Le paragraphe suivant est une succession d’interrogatives formées autour du verbe « expliquer », répété trois fois, qui envisagent l’ensemble des éléments de la séquence répétée, déjà donnés dans l’incipit, comme autant d’hypothèses :
Comment en effet expliquer la présence de ce fragment de fil de pêche dans sa gueule ? Comment expliquer qu’un fil de pêche aussi dur et résistant ait pu être rompu par l’animal lui-même ? Comment même, à supposer qu’il y soit parvenu, expliquer la présence d’une ligne morte dans le port à quelques mètres du bord de la jetée alors qu’elle aurait dû reposer au large par dix ou vingt mètres de fond ?20
Au lieu d’exprimer le sens de la séquence, le narrateur envisage les circonstances qui ont conduit à la mort, circonstances spéculatives qui consistent désormais à répondre à la question « qui a tué le chat ? » : il s’agit d’un stratagème dans lequel le narrateur déploie le questionnement d’une réalité qui se construit en l’incluant.
Le fil de pêche, sa solidité, sa place, la netteté de sa coupure sont autant d’indices qui deviennent, de facto, les preuves qu’il ne s’agit pas d’un accident mais d’un crime dont le coupable est, le narrateur en est sûr désormais, Biaggi. Qui est Biaggi ? C’est le personnage – le couple, d’abord puisqu’il s’agit des Biaggi – que le narrateur est venu rencontrer à Sasuelo. Il leur a écrit avant son départ pour annoncer son arrivée. Seulement, pour une raison que le narrateur n’identifie pas, il éprouve une réticence à se rendre chez eux. Après la séquence de la rencontre avec le cadavre, Biaggi endosse un autre rôle : le narrateur pense que Biaggi a tué le chat, et a coupé le fil de pêche. Il serait donc la cause première de ce qui a été vu. Rien ne le justifie. Pourtant cette hypothèse devient une réalité autour de laquelle s’articulent les déplacements du narrateur d’une part, et ses interrogations d’autre part.
Dans son séminaire sur La Lettre volée, Lacan lit la nouvelle de Poe en décomposant, dans chacune des séquences répétées, trois rôles que les personnages s’échangent sans le savoir : celui qui ne voit rien, celui qui voit celui qui ne voit rien et qui se leurre à être le seul à le voir, et celui qui voit ce qu’il y a voir et qui veut s’en emparer. La narration n’est jamais que la répétition de ces trois instances qui se distribuent en trois temps. Agnès Sofinaya résume alors ainsi la narration, selon Lacan :
Ainsi, les déplacements des trois acteurs sont « déterminés par la place que vient à occuper le pur signifiant qu’est la Lettre volée, dans leur trio » et c’est précisément cette persistance du signifiant qui permet à Lacan d’y voir un automatisme de répétition, au sens freudien21.
Dans La Réticence, le narrateur est à la fois enquêteur, témoin (le narrateur a vu le chat la veille de son « assassinat ») et victime potentielle (Biaggi cherche à l’éliminer parce que le narrateur sait.) Le narrateur sera celui qui voit, celui qui est vu et celui qui voit qu’il est vu. À partir de la séquence initiale, c’est l’ensemble de la réalité de Sasuelo qui sera interrogée comme l’a été le cadavre du chat. Les signes à l’intérieur de cette réalité deviennent autant d’éléments possibles du crime, et donc du récit. Les exemples, dans La Réticence, sont nombreux. Au début de la seconde partie, notamment, le narrateur descend à la salle à manger de l’hôtel. Quatre tables ont été utilisées avant lui. Des miettes y sont restées. Immédiatement, ces miettes deviennent des signes qui attestent, selon le narrateur, de la présence de Biaggi à l’hôtel pour le surveiller. Il en est de même pour les lettres disparues dans la boîte aux lettres de Biaggi, pour la Mercedes aperçue sur la jetée, pour la présence du patron à des moments inopportuns (c’est donc un complice de Biaggi...) et pour d’autres détails qui, normalement, auraient dû être considérés comme, au sens premier, insignifiants. C’est ainsi que se construit le récit de La Réticence : comme une interprétation constante des signes de la réalité dans un ordre de causalité qui devient fiction.
La réalité est donc une construction « in progress » qui se détourne du cadavre du chat. Le lendemain de la rencontre avec celui-ci, au matin, alors que le narrateur se rend sur le port, il observe à nouveau le cadavre : le chat, écrit-il, ne s’est pas vraiment transformé.
Son séjour prolongé dans l’eau ne semblait pas avoir tellement altéré son état, il n’y avait encore aucune trace de décomposition sur son corps, ni lésion visible, seule la peau de son oreille droite était maintenant tailladée sur quelques centimètres, la fourrure vraisemblablement mise en pièces par des crabes, et laissait à vif une petite surface pâle et fragile, comme vidée de sang22.
Paradoxalement, alors que le narrateur note que le cadavre n’est pas encore altéré, il livre une description précise de la décomposition qui œuvre. La décomposition, c’est le temps du réel, le temps que le narrateur ne veut pas voir, préférant consacrer son attention à la réalité qu’il construit : le fil de pêche et la tête de poisson ont disparu. « – comme si quelqu’un, pendant la nuit, s’était rendu dans le port pour les faire disparaître »23. L’utilisation de l’adverbe modalisateur avec la négation, « pas tellement », montre toute la tension de celui qui voit et celui qui ne veut pas voir.
Là encore, en décalage, à la nuit tombée, alors que le narrateur a quitté en cachette sa chambre d’hôtel, il exprime complètement ce qui, selon lui, a dû se produire : « La lumière du phare revenait éclairer le cadavre par intermittence, et, à chacun de ses passages, surgissait dans la lumière sa gueule horriblement ouverte et crispée »24. La lumière, répétée, donne une autre expression au cadavre qui corrobore ce que le narrateur a immédiatement pensé : quelqu’un, en voulant effacer la trace, le fil de pêche, a tailladé la gueule. Et, par un accident quasi-burlesque dont Toussaint a le secret, le narrateur devient acteur à part entière de cette fiction puisque, se penchant, « pour vérifier cette hypothèse »25, écrit-il, il laisse tomber dans l’eau les quatre lettres qu’il avait dérobées dans la boîte des Biaggi. Il en récupère trois sauf la sienne :
J’abandonnai finalement, et je restai un long moment debout sur la jetée à regarder la lettre qui continuait de dériver à la surface, arrêtée bientôt par le cadavre du chat sur le flanc duquel elle vint buter, s’immobiliser lentement, enveloppe blanche immobile dans la nuit qui flottait à côté du cadavre et sur laquelle un nom et une adresse faiblement éclairés par la lune étaient écrits à l’encre noire, Paul Biaggi, villa des Pins, Sasuelo26.
Ce que laisse le narrateur auprès du cadavre est une trace écrite, un nom : Biaggi. Ce que le narrateur a écrit à Biaggi, et qu’il veut faire disparaître, ne sera, à l’instar de la lettre dans La Lettre volée, jamais dévoilé. Cette lettre, qui devient l’objet de la réticence éprouvée, est vouée à rejoindre, dans l’eau, le cadavre du chat et celui de la murène : s’inscrit donc dans cette scène une relation entre l’écriture et la rencontre avec le cadavre, la coupure initiale. Elle rejoint le « non-dit ». À partir de cet instant, la narration délaisse l’interrogation sur le cadavre pour se déporter vers l’énigme que constitue Biaggi. Le chat noir apparaîtra encore deux fois. Qu’il soit vivant ou non n’a désormais plus aucune importance : il n’est plus le cadavre en décomposition, il est un signe de la réalité, un signe qui fait basculer cette réalité vers le fantastique, comme le chat noir de Poe, un signe, enfin, que le narrateur interprète comme une menace. Un signe appelé à devenir Biaggi lui-même, cadavre flottant à la place de celui du chat mort, dans un rêve éveillé du narrateur.
Seulement Biaggi est absent. Biaggi est cette instance autour de laquelle s’élabore un récit en prolongement du premier : ce qui les relie est l’idée de la disparition. Le cadavre de la murène porte, implicitement, le sens de cette disparition. D’une certaine manière, selon un principe de transfert, le récit qui couvre les parties II et III se résume ainsi : faire la preuve que Biaggi est présent. Mais, ce faisant, l’enjeu véritable de cette enquête est, pour le narrateur, de se déterminer, de se révéler dans cette enquête qui, pourtant, montrera que Biaggi est bien absent.
Mais présence comme absence connotent absence ou présence possibles. Dès que le sujet lui-même vient à l’être, il le doit à un certain non-être sur lequel il élève son être. Et s’il n’est pas, s’il n’est pas quelque chose, c’est évidemment de quelque absence qu’il témoigne, mais il restera toujours débiteur de cette absence, je veux dire qu’il aura à en faire la preuve, faute de pouvoir faire la preuve de la présence27,
écrit Lacan dans un autre séminaire, Le Moi dans la théorie de Freud... En témoignant de l’absence de Biaggi dans la réalité par son enquête infructueuse, le narrateur fait la preuve, peu à peu, de sa présence : il laisse des traces. Deux moments dans La Réticence semblent se répondre : le premier a lieu lorsque, la nuit, le narrateur qui s’est introduit dans la villa de Biaggi, voit un miroir dans le vestibule sans que son reflet y apparaisse. Plus tard, alors qu’il se résout à rendre visite à Biaggi, de jour, et non comme un voyeur, il se regarde à nouveau dans un miroir :
Je me tenais tout près de la glace en manteau sombre et en cravate, le visage presque collé au miroir, et je voyais le reflet de mes yeux qui paraissaient bleu-vert dans la pénombre, légèrement cernés, mais ce qui m’apparut surtout, c’est que mon regard était terriblement inquiet. Je me regardais pourtant moi-même, sans animosité sans doute, mais c’était un regard terriblement inquiet qui me regardait là dans la pénombre, comme si c’était de moi que je me méfiais, comme si c’était moi en réalité que je craignais – je traversai la pièce et sortis de la chambre28.
Cette fois, le reflet apparaît. Le narrateur y voit l’inquiétude qui a conduit sa lecture de la réalité. La nature de son regard révélée, il devine ce que potentiellement le cadavre dissimulait : la disparition du corps de la murène. Désormais, La Réticence peut s’écrire à nouveau dans un ordre logique, différent de celui du roman policier ou fantastique, qui avait été immédiatement imaginé dans l’incipit et disqualifié. Le narrateur admet la réalité de ce qu’il a vu en premier. Le roman peut se clore.
Pour Lacan, la « tuchê » peut se révéler grâce à ce qu’il nomme une coupure, un accident dans l’« automaton ». « La coupure a donc le pouvoir de réveiller la tuchê, en désarçonnant la loi de l’automaton29 » écrit encore Agnès Sofiyana à propos du séminaire sur La Lettre volée de Lacan. L’enjeu du récit était donc de retrouver les causes de cette coupure dans le réel, le cadavre du chat, afin que l’ordre des choses, celle, habituelle, d’un village en Méditerranée, puisse reprendre son cours. Mais, dans le même temps, le « hasard » est devenu événement, il est devenu narration.
Revenu sur le port, le narrateur rencontre le pêcheur. Alors qu’ils discutent, un chat noir, encore, apparaît : « et, à peine avais-je pris conscience de l’origine de ces pas qu’un chat noir apparut devant sur la jetée, les yeux verts luminescents qui brillaient dans la nuit et me regardaient fixement »30. Regardé par le chat, désormais, le narrateur ne peut plus se dérober. Le pêcheur peut alors lui raconter ce qui s’est passé la nuit où le chat s’est pris dans le fil de pêche : il y avait deux chats dont l’un a pris le poisson hameçonné. Le pêcheur, pour le libérer, a coupé le fil mais le chat s’est tout de même noyé.
Il ne reste donc au narrateur qu’à quitter l’hôtel et à repartir vers Paris. Le brouillon de la fin alternative, publié par Toussaint sur son site, est significatif : le narrateur, alors qu’il rend les clés au propriétaire de l’hôtel, et que celui-ci s’absente, en profite pour regarder si son nom apparaît sur le registre : il n’en est rien. « – comme si aucune trace n’existait vraiment de mon passage à Sasuelo en réalité31 » est-il noté. Le brouillon s’achève par la vision, à travers la vitre arrière du taxi, du paysage asséché avec un âne, que voyait le narrateur par la fenêtre de sa chambre. Si Toussaint n’a pas donné cette fin à son roman, c’est peut-être parce qu’elle est un contresens : La Réticence est le récit d’une révélation à soi dans l’absence. Revenons à ce que Toussaint publie sur son site Internet en 2002 sous l’apparence d’une « planche-contact », procédé qui permet, grâce à un papier photosensible, d’obtenir directement un positif à partir d’un négatif : si l’internaute peut d’abord penser qu’il s’agit de négatifs – le bord noir numéroté, notamment, est conservé –, en agrandissant, ce que l’interface permet, il se rendra compte que ce sont bien les positifs de la série, en noir & blanc. L’intérêt du roman, semble-t-il dire, est dans la révélation du négatif en positif, dans cet instant, éprouvé par l’internaute, où l’on ne discerne pas encore l’un de l’autre. La Réticence procède de cet instant. Le processus de la « tuchê » décrit par Lacan est une autre forme de la révélation : repérer un « non-dit » consiste à produire un positif à partir de ce qui sera, toujours, un négatif. L’individu est toujours le positif d’un négatif, l’image d’une reproduction voilée du réel : c’est ainsi qu’il faut concevoir la présence, à partir d’une absence.
C’est pourquoi, peut-être, Toussaint choisit une autre fin que celle envisagée. La fin de L’Appareil-photo, son précédent roman, célébrait l’unicité de l’instant réel, non répétitif, dégagé de toute possibilité de pensée. Le narrateur, cependant, était séparé du paysage, enfermé dans une cabine téléphonique : seul le regard lui permettait d’accéder à ce dévoilement, le lever du jour. La réalité restait à l’extérieur. La fin de La Réticence est son inverse, son négatif – à moins que la fin de L’Appareil-photo ne soit le négatif de celle de La Réticence. Symboliquement, la nuit s’y oppose au jour du précédent roman. Le narrateur se retrouve, à nouveau, seul, face à un paysage.
J’avais déjà laissé le village derrière moi, et je longeais le petit chemin de terre qui menait à la plage, évitant çà et là les grandes flaques d’eau faiblement éclairées par la lune qui s’étaient formées dans les ornières. Il y avait un champ [...] abandonné et silencieux que protégeait une vieille clôture tout abîmée, et, continuant de suivre le chemin désert dans la nuit, je commençai bientôt à entendre le bruit de la mer au loin, le murmure régulier de la mer qui m’apporta peu à peu comme un soulagement des sens et de l’esprit. Arrivé sur la plage, j’ôtai mes chaussures et mes chaussettes et je m’avançai lentement dans la nuit vers le rivage, les pieds nus et mes chaussures à la main. Je sentais le contact froid du sable sous la plante de mes pieds, le sable humide qui s’infiltrait entre mes orteils, et j’enfonçais mes pieds à chaque pas davantage dans le sol pour m’imprégner toujours plus de la sensation de bien-être que me procurait le contact du sable mouillé32.
La nuit, l’ouïe se substitue à l’œil pour repérer le signe. Puis le narrateur entre en contact avec le paysage grâce à ses pieds, grâce au toucher. À l’intérieur de la fiction se dévoile une sensation que le « Je » éprouve, libérée de la répétition. Le « Je » devient présence. Dans La Réticence, le paysage s’envoile de nuit, et c’est la matière qui procure au narrateur la sensation du présent. Il est celui qui est. La Réticence relaie une interrogation constante chez Toussaint repérable dans l’œuvre postérieure et plus particulièrement dans des romans brefs, Autoportrait (à l’étranger) ou, récemment, La Disparition du paysage : comment être réellement dans la littérature ? Réellement, c’est-à-dire autrement que comme fiction.
[1] Jean-Philippe TOUSSAINT, « Le Jour où j’ai commencé La Réticence » : http://www.bon-a-tirer.com/volume6/jpt.html consulté le 5 septembre 2020.
[2] Id., http://www.jptoussaint.com/projet-reticence.html consulté le 5 septembre 2020.
[3] Id., « Le Jour où… » : http://www.bon-a-tirer.com/volume6/jpt.html consulté le 5 septembre 2020.
[4] Ibid.
[5] Agnès SOFIYANA, « Tuchê et Automaton. Introduction à l’Introduction au séminaire sur La Lettre volée », La Clinique lacanienne, n°8, 2004/2, p. 204-205 : https://www.cairn.info/revue-la-clinique-lacanienne-2004-2-page-199.html consulté le 5 septembre 2020.
[6] J.-P. TOUSSAINT, « Le Jour où j’ai commencé à écrire La Réticence ».
[7] Jacques LACAN, Le Séminaire, Les quatre concepts fondamentaux de la psychanalyse [1964], Livre XI, Paris, Seuil, 1973, p. 64.
[8] J.-P. TOUSSAINT, La Réticence, p. 11.
[9] Walter BENJAMIN, Petite histoire de la photographie, [1931], traduit de l’allemand par André Gunthert.
http://www.lhivic.org/sources/divers/benjamin-1931.pdf consulté le 5 septembre 2020, p. 11.
[10] « Zeitlupen oder Vergrösserungen » dans le texte original. Notons que, comme le précisent les auteurs de la note dans l’édition consultée de Petite histoire de la photographie, Benjamin semble confondre deux termes : celui de ralenti (Zeitlupen), propre au cinéma avec celui d’arrêt sur image.
[11] W. BENJAMIN, op. cit., p. 11.
[12] À propos de la différence entre « eaux de surface » et « eaux profondes » Bachelard, en s’appuyant sur certaines images puisées chez Poe, note que se constitue, dans ces « eaux profondes », l’image de la mort.
[13] Gaston BACHELARD, L’Eau et les rêves – Essai sur l’imagination de la matière, Paris, José Corti, 1942, p. 59.
[14] J.-P. TOUSSAINT, La Réticence, p. 11-12.
[15] Ibid., p. 12.
[16] Or, dans La Réticence, s’il est question d’un fils dont s’occupe le narrateur, il n’est jamais question de la mère du fils comme si, elle aussi, avait disparu.
[17] Edgar-Allan POE, « Le Chat noir » [The black cat, 1843] in Nouvelles histoires extraordinaires, traduit par Charles Baudelaire. Paris, Quantin, 1884.
[18] J.-P. TOUSSAINT, La Réticence, p. 36.
[19] Ibid., p. 36-37.
[20] Ibid., p. 37.
[21] A. SOFIYANA, « Tuchê et Automaton », p. 202.
[22] J.-P. TOUSSAINT, La Réticence, p. 45.
[23] Ibid., p. 45.
[24] Ibid., p. 48.
[25] Ibid., p. 49.
[26] Ibid., p. 50.
[27] J. LACAN, Le Séminaire Le Moi dans la théorie de Freud… (1954-1955), Paris, Seuil, 1978. p. 46.
[28] J.-P. TOUSSAINT, La Réticence, p. 113.
[29] A. SOFIYANA, « Tuchê et Automaton », p. 219.
[30] Ibid., p. 156.
[31] J.-P. TOUSSAINT, « Variantes dernières pages PAGES SUPPRIMÉES ». Consulté à cette adresse : http://www.jptoussaint.com/documents/0/03/La_R%C3%A9ticence%2C_derni%C3%A8res_pages_(PAGES_SUPPRIM%C3%89ES).pdf consulté le 5 septembre 2020.
[32] J.-P. TOUSSAINT, La Réticence, p. 158.
Résumé
La publication, dix ans après la sortie de La Réticence, des photographies prises le jour où Toussaint a commencé à écrire ce roman semble indiquer que son thème est celui de la révélation à soi-même. La Réticence s’ouvre sur le récit d’une rencontre avec le cadavre d’un chat noir, récit qui porte en lui un « non-dit ». La narration qui se déploie à partir de cette séquence révèle, durant son élaboration, non pas ce qui restera réticent, mais la présence du narrateur dans le roman qui ouvre à un questionnement constant dans l’œuvre de Toussaint : comment exister réellement dans la fiction ?
Abstract
The publication, ten years after the release of La Réticence, of the photographs taken the day Toussaint began to write this novel seems to indicate that its theme is that of revelation to oneself. La Reticence opens with the story of an encounter with the corpse of a black cat, a story that carries with it an “unsaid”. The narration that unfolds from this sequence reveals, during its development, not what will remain reluctant, but the presence of the narrator in the novel which opens up a constant questioning in the work of Toussaint: how to really exist in fiction ?
Nicolas PIEN
Université de Caen/Normandie
TOUSSAINT, Jean-Philippe, La Réticence, Paris, Éditions de Minuit, 1991.
—, « Le jour où j’ai commencé La Réticence », http://www.bon-a-tirer.com/volume6/jpt.html consulté le 5 septembre 2020.
—, page internet liée à La Réticence sur le site de l’auteur : http://www.jptoussaint.com/la-reticence.html consulté le 5 septembre 2020.
BACHELARD, Gaston, L’Eau et les rêves, Paris, José Corti,1942.
BENJAMIN, Walter, Petite histoire de la photographie, 1931. Traduit par Lionel Duvoy, Paris, Allia, 2012.
LACAN, Jacques, Le Séminaire, Les quatre concepts fondamentaux de la psychanalyse [1964], Livre XI, Paris, Seuil, 1973.
–, Le Séminaire, Le Moi dans la théorie de Freud… [1954-1955], Paris, Seuil, 1978.
POE, Alan-Edgar, « Le Chat noir » in Nouvelles histoires extraordinaires, traduit par Ch. Baudelaire. Paris, Quantin, 1884.
SOFIYANA, Agnès, « Tuchê et Automaton. Introduction à l’Introduction au séminaire sur La Lettre volée », in La Clinique lacanienne, n°8, 2004/2, https://www.cairn.info/revue-la-clinique-lacanienne-2004-2-page-199.html consulté le 5 septembre 2020.