L’expression « littérature migrante » a servi à classer les récits de Fatou Diome, les nouvelles de son recueil La Préférence Nationale, ainsi que ses romans, Le Ventre de l’Atlantique et Celles qui attendent. Aux caractéristiques communes à cette littérature (l’inspiration autobiographique, le regard décentré, une tonalité exotique, une nuance critique…), il faut ajouter le travail d’un parcours d’écriture et la puissance d’un style. Elle dit « tricoter des mots » dans la langue française qu’elle anime avec les mots de sa grand-mère, sa voix et son rythme, ses dictons et ses proverbes, les enseignements explicites, les sons et les images sensibles.
Son style musical nous conduit à travers des mots et des images en mouvement. Le Ventre de l’Atlantique, sous une traversée de contrastes, investit un imaginaire traditionnel : la symbolique du voyage, du corps et de l’océan, fil conducteur du récit et de l’histoire – des images qui fonctionnent comme les repères, incertains, de l’espace où l’écrivaine prend appui dans le monde ; elles dessinent la puissance de ses souvenirs et signalent l’élan de ses transitions. La narratrice se révèle comme l’« écrivaine migrante », sujet unique mais partagé entre les parcelles d’une réalité proche et les fragments d’une expérience lointaine, en même temps familière et étrange. L’écriture elle-même se transforme en barque, ou en carpe, petit poisson qui plonge dans l’océan de la vie. Josyane Savignau interprétait l’esthétique de son premier roman1, dont l’humour faisait la force : « C’est à coup sûr l’humour de ce premier roman qui incite à en savoir plus sur son auteur […]. C’est aussi la liberté de ton, le sens du récit, la justesse des descriptions qui font lire d’une traite Le Ventre de l’Atlantique »2. Les motifs, notamment celui du voyage3, et le ton de ce roman reviennent, en 2010, avec Celles qui attendent.
Fatou Diome a signalé à plusieurs reprises la part d’autobiographie que ces deux romans recèlent. Quelques infinitifs puissants ponctuent ces textes : « vivre », « partir », comme les expressions de la nécessité et du désir. Le sens de « vivre » émerge dans les images du combat et de la quête et dans les motifs de l’orgueil et de la dignité qui constituent l’objet de cette quête personnelle, car « on travaille pour garder la tête haute »4. L’écriture se promet un double bénéfice : elle devient un système d’apprentissage et de connaissance, « écrire, pour apprendre à vivre ; analyser, pour essayer de comprendre », et une possibilité de communication de ses rêves, et de sa révolte. Grâce à l’écriture, Fatou Diome prend position, elle trouve sa place dans le monde et se définit elle-même5 comme « une fille de l’entre-deux », comme celle qui écrit depuis une perspective essentiellement double, où le lien et l’unité s’inscrivent dans le voyage même.
Si l’expression « littérature migrante » sert à caractériser l’œuvre de Fatou Diome, à la ranger à côté des livres qui présentent les biographies du déracinement et un certain exotisme (dans les années où ces récits représentaient une nouveauté), Le Ventre de l’Atlantique évoque un réseau plus nuancé de regards qui s’entrecroisent, plus complexes, plus riches, et parfois contradictoires. Fatou Diome a dépassé ici la peur de l’ambiguïté et du paradoxe. Dans les récits de La Préférence Nationale, parfois, « la colère étouffe les idées »6. Le « je » autobiographique peut ouvrir ou fermer les portes ; devenir ou non ce point de départ vers les autres7. Le verbe « partir » marque le commencement de la quête et des possibles rencontres. Toute image est la tentative et la métaphore d’un voyage, le raccourci d’un parcours toujours renouvelé, hérité et nouveau. Il faut partir pour établir la distance et convoquer la réflexion ; il faut partir pour regarder différemment ce qui était jusqu’à présent familier et proche. Fatou Diome et ses personnages d’élection se présentent comme les héros des légendes : elle est une héroïne qui vit par miracle, grâce à sa grand-mère, maîtresse et guide ; obligée de s’éloigner de son espace naturel auquel on lui refuse l’appartenance ; obligée de voyager, de chercher le succès, l’ordre, l’équilibre, en fait son droit à la vie et à la parole.
Le voyage, à travers une géographie bien concrète, se double d’une naissance et d’une découverte symboliques : l’écriture est aussi ce voyage qui va du moi à l’Autre et qui s’investit dans les textes. Pour Fatou Diome il y a le voyage de la nuit, « mon délire »8, écriture nocturne que la musique du pays accompagne, et le voyage du jour, « l’intelligent », contrôlé, dans ses essais et ses conférences. Chaque voyage choisit ses véhicules, le style qui s’adapte à chaque ouvrage, car « l’histoire choisit sa forme »9, son mouvement. Dans ses poèmes, l’écrivaine est le poème ; elle est la chanson et son corps marque le rythme. Dans ses récits, les idées, comme des couteaux (« les idées en couperet »)10, imposent les formes courtes et la surprise ; les romans souhaitent des chemins lents, des carrefours compliqués, des clairières poétiques. Mais toujours, Fatou Diome va définir son écriture par le nécessaire mouvement qu’elle demande : « tricoter les mots »11 comme l’expression en même temps de l’impuissance et de la force qui, selon elle, caractérise son style : « mon grand pouvoir c’est la légèreté de mon style »12. Ainsi, une écriture en langue française sur un fond de musique africaine, comme un corps hybride de synesthésies culturelles, rend sensible le parcours d’une existence en mouvement. « Je me sers de la langue de ma grand-mère pour l’ajouter dans la langue française en mélangeant les deux »13, dit-elle, car la langue de la grand-mère révèle son rythme, son caractère assertif (les proverbes et les dictons abondent), et surtout une quantité surprenante d’images concrètes. Écrire est l’espace, la distance et le chemin. Écrire est le moyen et la force. Écrire ouvre la voie, dévoile le tunnel, la fissure, dont le but est le lecteur.
Dans les romans de Fatou Diome, comme chez la plupart des écrivaines, les personnages féminins sont les personnages protagonistes14. Ce sont elles qui voyagent, ou elles qui attendent, marquées par leur sexe, mais marquées aussi par la culture et la politique. Les difficultés qu’elles doivent traverser, comme autant d’épreuves, surgissent dans toutes les étapes de leurs aventures. Partir est difficile ; partir signifie abandonner une tradition et un ordre qui priment sur l’appartenance. Il faut démythifier cet ordre même pour que les femmes, là où elles ne sont que sujets de devoirs, acquièrent sagesse et puissance. Quand le protagoniste du voyage est une femme, l’aventure est source de conflits mais en même temps ces difficultés déclenchent la narration ; les stratégies qui favorisent le mouvement et l’action des femmes leur donnent aussi le droit à la parole. La perspective comparatiste s’avère la plus pertinente pour rendre compte des expériences de ces personnages migrants et voyageurs. Les récits, les textes autobiographiques, journalistiques ou même politiques sont le support et la structure privilégiée par ces voyages. Malheureusement, « l’écriture migrante » a aujourd’hui établi ses propres topiques, des lieux communs auxquels il est très difficile d’échapper. Pourtant, le voyage vers ces territoires nouveaux et inconnus, à travers la géographie personnelle de chaque écrivain, ne devrait pas fuir les dangers ni se conformer aux stéréotypes mais miser sur la dynamique et les bénéfices du chemin.
Fatou Diome a trouvé une solution provisoire dans ses premiers romans. Dans son imaginaire, elle a dissocié le jour de la nuit, le temps de la pensée et de l’engagement du temps intime des émotions. Pour le premier, le jour et son image publique ; pour le second, la nuit, les sensations, la musique et les couleurs. Interrogée à propos des motifs de ses contes et romans, Fatou Diome répond qu’elle ne veut pas être appréciée comme écrivain pour le contenu de ses œuvres mais en raison de la forme dans laquelle celui-ci s’inscrit dans l’œuvre. Son travail esthétique sur la langue nous conduit aussi par le chemin des mots et des images en mouvement.
Le Ventre de l’Atlantique reflète un imaginaire du corps océanique à travers des images où brillent le contraste et la surprise :
Là-bas, depuis des siècles, les hommes sont pendus à un bout de terre, l’île de Niodior. Accrochés à la gencive de l’Atlantique, tels des résidus de repas, ils attendent, résignés, que la prochaine vague les emporte ou leur laisse la vie sauve15.
Des images récurrentes qui acquièrent le caractère et la force des symboles dans la grande métaphore traditionnelle qui dessine la vie comme un voyage et un combat :
Ici, accrochés aux gencives de la terre, les humbles ne redoutent pas les tempêtes de la vie, ils savent que l’Atlantique ne les engloutit que par pitié16.
Les images qui s’agrandissent et se transforment en symboles perdent leur force sensible. En revanche, quand il n’est plus possible d’oublier l’énorme bouche de l’océan qui avale les vies, sa langue, son haleine,… alors les mots se font corps : « Les insulaires s’accrochaient toujours aux gencives de l’Atlantique qui rotait, tirait sa langue avide et desséchait les fleurs de son haleine chaude »17. Ces images océaniques fonctionnent comme le fil conducteur de la narration, le point où se retrouvent l’espace et la présence, la mémoire et la transition ; à la fin du roman, le petit colis que reçoit la narratrice, installée à Strasbourg, représente cet espace parcouru et le chemin aller-retour des souvenirs :
Ce petit paquet signifiait que là-bas au bout du monde, dans le Sahel où le sable brûle les semailles, où les vautours sont seuls à se réjouir du passage des troupeaux, là-bas, dans le ventre de l’Atlantique, où seul le sel se récolte à profusion, là-bas donc où il serait plus judicieux de garder ses maigres denrées que de les offrir, quelqu’un pensait à moi avec beaucoup d’amour18.
L’identification personnage = voyage émerge, synthétisée dans les derniers mots du roman : « Partir, vivre libre et mourir, comme une algue de l’Atlantique »19, grâce à ces infinitifs qui expriment le désir, qui explicitent un programme de vie20, et qui se répètent, comme un écho, dans ses romans postérieurs.
Dans Le Ventre de l’Atlantique, la voix de Salie crie la situation de compromis de ceux qui reviennent à l’île depuis la France, accablés par les attentes démesurées des insulaires21. Personne ne veut écouter son discours ni le récit de son voyage. Le personnage de Salie représente l’errance, l’éternel voyage, car il n’appartient plus à aucun paysage ; il sera toujours « l’autre », sur les deux rives de l’Atlantique. Une musique, un bal sont évoqués pour dessiner son mouvement ; la valse inscrit l’émotion dans le corps :
Qui sont ces gens que j’appelle mon frère, ma sœur, etc. ? Qui suis-je pour eux ? L’intruse qui porte en elle ce qu’ils attendent et qu’ils désespèrent de retrouver ? L’étrangère qui débarque ? Ces questions accompagnent ma valse entre les deux continents22.
Les mots et les images évoquent ce va-et-vient du corps et de l’esprit, la sensation d’un mouvement qui jamais ne s’arrête, entre une origine et une destinée effacées :
Voilà bientôt dix ans que j’ai quitté l’ombre des cocotiers. Heurtant le bitume, mes pieds emprisonnés se souviennent de la liberté d’antan, de la caresse du sable chaud, de la morsure des coquillages et de quelques piqûres d’épines […]. Les pieds modelés, marqués par la terre africaine, je foule le sol européen. Un pas après l’autre, c’est toujours le même geste effectué par tous les humains sur la planète23.
Une maxime servira à généraliser l’expérience des hommes sur la terre et à tranquilliser tous les voyageurs : « un pas après l’autre » ; les mots résument ce voyage qui est la vie, ce geste commun et nécessaire qui assure au moins notre humanité. En dehors de ce geste, toute évocation se révèle dans les oppositions ; elle est toujours éprouvée comme un danger :
Enracinée partout, exilée tout le temps, je suis chez moi là où l’Afrique et l’Europe perdent leur orgueil et se contentent de s’additionner : sur une page, pleine de l’alliage qu’elles m’ont légué24.
Dans Celles qui attendent, l’île tout entière semble prédestinée au mouvement perpétuel. Comme une barque sur l’océan, l’île, comme un corps, brave le danger et supporte le vertige :
C’est dans la fragmentation et la juxtaposition des miettes de réalités que la vie gagnait en fluidité et se mettait en mouvement. La vie des insulaires ne connaissait aucune pause, les événements, même insignifiants, s’additionnaient à l’infini et composaient le fondu enchaîné d’un film déroutant. Les peuples marins ont le cœur accroché pour supporter la houle, mais cela ne les met guère à l’abri du vertige25.
Bouée de sauvetage, l’écriture, comme un voyage de nuit, parcourt aussi une géographie proche, celle de la page, qui fait signe, proposant des « rails », des « sillons », des repères :
Exilée en permanence, je passe mes nuits à souder les rails qui mènent à l’identité. L’écriture est la cire chaude que je coule entre les sillons creusés par les bâtisseurs de cloisons et des bords26.
L’écriture seule proclame l’unité du sujet ; Fatou Diome se définit comme celle qui est en voyage, sujet partagé entre les parcelles d’une réalité en même temps proche et lointaine, familière et étrange. Ses impressions changent quand la distance et son regard se modifient. Et l’écriture seule peut servir de pont, rétablir le fil et les liens :
Des faits qui jadis ne retenaient guère mon attention, je compose maintenant mes nourritures d’exil, et surtout, les fils de tisserand censés rafistoler les liens rompus par le voyage ; […] des mots trop limités pour servir de pont entre l’ici et l’ailleurs. […] Finalement des mots-valises au contenu prohibé, dont le sens, malgré les détours, conduit vers un double soi : moi d’ici, moi de là-bas27.
Les isotopies du voyage et de l’écriture se combinent pour créer les images sensibles et dessiner le corps de l’expérience. Fatou Diome choisit l’italique pour ses mots clés : moi, Partir, mon Aventure ambiguë. Le terme « Partir », anaphorique, rythme sa force et sa richesse comme les échos d’un poème :
Partir, c’est porter en soi non seulement tous ceux qu’on a aimés, mais aussi ceux qu’on détestait. Partir, c’est devenir un tombeau ambulant rempli d’ombres, où les vivants et les morts ont l’absence en partage. Partir, c’est mourir d’absence…28.
Dans Celles qui attendent, l’attention que la narratrice prête aux mots est encore plus consciente et plus explicite : un véritable métalangage cherche à dévoiler les nuances sémantiques que les mots doivent à cette aventure existentielle qui se veut et se dit synonyme du « voyage » ; les substantifs « immigration »29, « mort », « patience »30, le verbe « quitter » :
Elle avait glissé le mot quitter dans sa missive comme un navire en perdition lance une fusée de détresse au milieu de l’océan31.
Et les mots et les concepts qui se combinent suscitent des images d’une très riche plasticité. Le virus du voyage niche dans le cœur des insulaires, où il se développe malgré le contrôle exercé par la tradition et l’éducation reçues :
En dépit d’une éducation traditionnelle, qui tâchait de la modeler comme du beurre de karité, Sankèle avait grandi avec des ailes de pélican assoiffé d’azur32.
L’imaginaire animal joue ici un rôle fondamental ; paradoxalement il signale en même temps l’essence voyageuse des hommes et s’inscrit dans la tradition des mythes et de la littérature : le désir du voyage donne des ailes33 ; il suffit de regarder ce « pélican assoiffé d’azur » qui semble venir directement de l’esthétique symboliste ; il donne aussi des nageoires et des écailles qui favorisent la traversée des océans. Ainsi, chaque fois que la narratrice compare un homme ou une femme à une carpe34, elle évoque la lutte pour la vie et les dangers d’une navigation et d’un voyage hasardeux35.
Fatou Diome reprend les proverbes sénégalais qui, traduits en français, peuvent surprendre les lecteurs par l’originalité des images qu’ils suggèrent. Parfois, elle intègre dans ses récits des proverbes bien connus en Europe ; dans les deux cas, la structure des proverbes est toujours la même et contribue à effacer les frontières : des propositions assertives, des parallélismes lapidaires et fermés à la critique. C’est le moule de la définition, de l’axiome, de la leçon morale ; difficile de savoir si Fatou Diome s’inscrit dans la tradition sénégalaise, si elle suit la tradition européenne, ou encore si elle invente elle-même ses adages et ses proverbes à partir d’une rhétorique bien apprise, car elle signale rarement la source de ces expressions : « Les prières des vieilles personnes valent mieux que les billets de banque, dit-on »36. Ainsi « dit-on », dans son ambiguïté, tantôt ajoute de la valeur aux propos, tantôt signale la banalité du discours et ouvre la porte à une certaine désolidarisation de la part de la narratrice, et à un clin d’œil aux lecteurs : « Les barques tanguent beaucoup mais ne prennent pas l’eau pour autant. Tanguer n’est pas chavirer, dit-on ici »37. Partant, en s’appuyant sur la traduction, la narratrice s’accorde aussi une liberté explicite. Au sujet du voyage elle ose composer une ballade : « j’improvisais une ballade sur le modèle des chants de lamentation de mon village […]. Nous sommes les Malgré-nous du voyage »38. Nous sommes les Malgré-nous du voyage est le dernier vers de cette ballade de cinq strophes de trois vers. Le terme de « Malgré nous », chargé d’une histoire à laquelle Fatou Diome est confrontée en Alsace, désigne allusivement les voyageurs contraints à l’expatriation par des impératifs extérieurs, mais soupçonnés de trahison dans la décision de leur départ. Volontaire ou non, la perspective du voyage centrifuge est toujours présente dans l’île, pour ceux qui partent comme pour celles qui restent, à attendre. Tous sont pris par les marées de la vie :
Ne voyant aucun chemin susceptible de les mener vers un avenir rassurant, les garçons se jettent dans l’Atlantique, se ruent vers l’Europe, comme un chasseur perdu se jette dans les buissons, en quête d’une nouvelle piste. Les filles, quant à elles, s’accrochent à ces forcenés de l’exil qui les entraînent dans une dérive où l’utopie sert de socle aux sentiments39.
Que la traversée soit maritime ou terrestre, elle dessine un chemin toujours plein de pièges, que seule l’écriture est capable de réduire à la taille humaine ; elle seule peut les contrôler, les apprivoiser : « Ce soleil, qui filait lentement se saborder dans l’Atlantique, Arame aurait voulu le précipiter comme on renverse un bol de lait avarié »40. L’écriture convoque les souvenirs, superpose les images, agite et pousse l’écrivaine qui, comme une barque, comme une carpe, voyage, baignée par les images océaniques et par celles, plus proches, d’un monde domestique et féminin.
[1] Elle avait publié auparavant La Préférence Nationale (2001), recueil de six récits. « Une langue riche, colorée et incisive […] à l’humour féroce », Renée MENDY-ONGOUNDOU, « La Préférence nationale par Fatou Diome », Interview, Amina, 379, nov. 2001, http://aflit.arts.uwa.edu.au/AMINAdiome01.html ; ce sont les caractéristiques qu’à partir de ce moment la critique évoquera pour définir toute son œuvre.
[2] Josyane SAVIGNEAU, Le Monde des livres, vendredi 22 août 2003.
[3] Fatou Diome a écrit une thèse sur le voyage, les échanges et la formation dans l’œuvre littéraire et cinématographique de Sembène Ousmane.
[4] R. MENDY-ONGOUNDOU, « La Préférence Nationale par Fatou Diome ».
[5] Ibid.
[6] Ibid.
[7] « Toute image procède d’une prise de conscience, si minime soit-elle, d’un Je par rapport à un Autre, d’un Ici par rapport à un Ailleurs. L’image est donc l’expression, littéraire ou non, d’un écart significatif entre deux ordres de réalité culturelle », Daniel-Henri PAGEAUX, « De l’imaginaire culturel à l’imaginaire », in Pierre BRUNEL et Yves CHEVREL (dir.), Précis de Littérature Comparée, Paris, PUF, 1989, p. 133-161, p. 135.
[8] Alison RICE, « An Interview with Fatou Diome », https://www.youtube.com/watch?v=l6RHx8ifO38, http://francophonemetronomes.com/, 31/01/2014.
[9] Ibid.
[10] Ibid.
[11] Ibid.
[12] Olivier BARROT présente « Fatou Diome : Le Ventre de l’Atlantique », https://www.ina.fr/video/2455082001, Un livre, un jour, 04/12/2003.
[13] Ibid.
[14] Traditionnellement les récits sur l’émigration avaient toujours les hommes comme protagonistes. Le voyage masculin était la norme. Seuls les hommes servaient de modèle.
[15] Fatou DIOME, Le Ventre de l’Atlantique, Paris, Éditions Anne Carrière, 2003, p. 12-13.
[16] Ibid., p. 18.
[17] Ibid., p. 229.
[18] Ibid., p. 250.
[19] Ibid., p. 255.
[20] Le leitmotiv de la légende de Sédar et Soutra : « Atlantique, emporte-moi, ton ventre amer me sera plus doux que mon lit. La légende dit que tu offres l’asile à ceux qui te le demandent », F. DIOME, Le Ventre de l’Atlantique, p. 111.
[21] Comme dans Celles qui attendent : « C’était à son tour, pensait-il, de profiter de ce système où chaque barque qui mouille peine à flotter, assaillie par la parentèle », F. DIOME, Celles qui attendent, Paris, Flammarion, 2010, p. 48.
[22] F. DIOME, Le Ventre de l’Atlantique, p. 227.
[23] Ibid., p. 13.
[24] Ibid., p. 281-281.
[25] F. DIOME, Celles qui attendent, p. 151.
[26] F. DIOME, Le Ventre de l’Atlantique, p. 254.
[27] Ibid., p. 224-225.
[28] Ibid., p. 227.
[29] « Le mot immigration renferme des réalités multiples dont certaines sont si souterraines qu’elles échappent à l’acuité des analyses du phénomène », F. DIOME, Celles qui attendent, p. 40.
[30] « C’est seulement quand on a compris et accepté toutes les nuances que couvre le mot patience qu’on peut jeter son dévolu sur un homme des mers. […] Tu aimeras la mer, ta mère et ta femme ! Tous les garçons de l’île grandissent avec un théorème de ce genre » (Ibid., p. 169).
[31] Ibid., p. 191.
[32] F. DIOME, Le Ventre de l’Atlantique, p. 169.
[33] Il peut aussi les couper : « les enfants de la misère qui viennent se briser les ailes contre la vitrine européenne, comme des oiseaux happés dans les lames d’une girouette. Les lois contre l’immigration changent en permanence, tels des pièges sans cesse repositionnés afin de ne laisser aucune chance au gibier. Ainsi dans cette chasse qui ne dit pas son nom, le chemin de la veille devient le guet-apens du lendemain, quand la mauvaise foi des politiques légitime tous les appâts », F. DIOME, Celles qui attendent, p. 201.
[34] « La carpe baille et se débat, elle ne braille pas [Coumba]. Lorsque la tristesse l’étranglait, Coumba restait muette », F. DIOME, Celles qui attendent, p. 232, ou « Issa s’échappa comme une carpe saute hors du filet » (Id., p. 132). L’image de la carpe est présente aussi dans les récits de La Préférence Nationale : « Je me débattis comme une carpe », F. DIOME, La Préférence Nationale, p. 29, de même que celle de la vie comme voyage maritime : « Nos destins, tels des bras de mer nés de sources opposées, s’étaient rencontrés… » (Ibid., p. 23).
[35] Une image animale, opposée, sert à identifier les hommes dans l’univers citadin : « Perdue dans l’univers citadin, chaque tortue traîne sa carapace au rythme de son souffle », F. DIOME, Le Ventre de l’Atlantique, p. 104.
[36] F. DIOME, Le Ventre de l’Atlantique, p. 35.
[37] Ibid., p. 59.
[38] Ibid., p. 216-217.
[39] F. DIOME, Celles qui attendent, p. 190.
[40] Ibid., p. 108.
Résumé
Fatou Diome « tricote des mots » dans la langue française qu’elle anime avec les mots de sa grand-mère, sa voix et son rythme, ses dictons et ses proverbes, les enseignements explicites, les sons et les images sensibles. Le Ventre de l’Atlantique, dans une traversée de contrastes, investit un imaginaire traditionnel : la symbolique du voyage, du corps et de l’océan. La narratrice se révèle comme une « écrivaine migrante », en même temps familière et étrange. L’écriture elle-même se transforme en barque, ou en carpe, petit poisson qui plonge dans l’océan de la vie.
Resumen
Fatou Diome “teje palabras” en lengua francesa animándolas con las palabras de su abuela, con su voz, su ritmo, sus dichos y proverbios, las enseñanzas explícitas, los sonidos y las imágenes sensibles. Le Ventre de l’Atlantique, en una travesía de contrastes integra un imaginario tradicional: el simbolismo del viaje, del cuerpo y del océano. La narradora se presenta como una “escritora migrante”, al mismo tiempo familiar y extraña. La escritura misma se transforma en barca, o en carpa, pececito que se sumerge en el océano de la vida.
María Vicenta HERNÁNDEZ ÁLVAREZ
Université de Salamanque
BARROT, Olivier, « Fatou Diome : Le Ventre de l’Atlantique », https://www.ina.fr/video/2455082001, Un livre, un jour, 04/12/2003 (consulté le 11/03/2020).
FATOU, Diome, La Préférence Nationale, nouvelles, Paris, Présence Africaine, 2001.
—, Le Ventre de l’Atlantique, Paris, Éditions Anne Carrière, 2003.
—, Celles qui attendent, Paris, Flammarion, 2010.
MENDY-ONGOUNDOU, Renée, « La Préférence Nationale par Fatou Diome », Interview de Fatou Diome, Amina, 379, nov. 2001, http://aflit.arts.uwa.edu.au/AMINAdiome01.html (consulté le 11/03/2020).
PAGEAUX, Daniel-Henri, « De l’imaginaire culturel à l’imaginaire », in Pierre BRUNEL et Yves CHEVREL (dir.), Précis de Littérature comparée, Paris, PUF, 1989, p. 133-161.
RICE, Alison, « An Interview with Fatou Diome », https://www.youtube.com/watch?v=l6RHx8ifO38, http://francophonemetronomes.com/, 31/01/2014. (consulté le 11/03/2020).
SAVIGNEAU, Josyane, « Rencontre : Fatou Diome, la liberté des mots », Le Monde des Livres, 22 août 2003, p. 3.