La démultiplication quasi exponentielle d’ouvrages de littérature de jeunesse, albums et romans confondus, consacrés à des thématiques écologiques depuis plus dix ans en France atteste des préoccupations des adultes créateurs, éditeurs, prescripteurs sur le sujet et de leur volonté d’orienter le jeune lecteur vers un engagement écologique singulier1. Nathalie Prince parle déjà en 2018 à propos de ce mouvement de fond d’« écolije »2 et y voit « une modernité de la littérature de jeunesse »3, voire une rupture, notamment en ce que ces productions modifient la place et le rôle de l’enfant destinataire, l’invitent à grandir, à être responsable « pour qu’il ne devienne pas comme l’adulte qui jusque-là a mené la nature, le monde, la terre à sa perte »4.
L’attention particulière au végétal, et plus largement à la nature, n’est cependant pas récente. En littérature de jeunesse, la question des sensibilités végétales se pose d’abord comme sensibilité au végétal, dans une démarche parfois clairement éducative qui n’écarte pas pour autant la recherche esthétique. Ainsi, lorsqu’en 1934, Paul Faucher, créateur du Père Castor, initie la série le Roman des bêtes, il s’attache certes à la première année de la vie de différents animaux, celle de Froux le lièvre, de Bourru l’ours brun5 mais chacun de ces animaux est aussi inscrit dans un véritable éco-système. Paul Faucher propose aux jeunes lecteurs une plongée dans la réalité animale et végétale et cherche à leur apporter « le vrai merveilleux : celui de la nature et de la vraie poésie : celle de la réalité »6. Les illustrations de Rojankovski rendent compte avec une grande précision des comportements des animaux dans des territoires qui ne sont pas de simples décors, mais des lieux de vie. Et l’on entend, dans Bourru l’ours brun, une formule qui pourrait retrouver dans certaines contributions quelques échos : « L’école, c’est la forêt ».
Pendant un temps, cette présence végétale s’est estompée dans les albums, suivant l’urbanisation de la société. En effet, l’espace urbain, plus minéral, s’est progressivement fait une place dans une partie des albums à la fin des années 70 et « à partir des années 2000, dans près de la moitié des albums ayant pour thème ou pour cadre un espace particulière, c’était la ville qui était choisie », affirme Christophe Meunier7. Et si parfois la minéralisation de la ville a très vite fait rêver à d’autres réalités, plus végétales, comme l’album de Claude Roy et Alain le Foll intitulé C’est le Bouquet !, si, par ailleurs, quelques albums pouvaient dès les années 70 porter une attention souvent engagée et idéologique au végétal, comme Le Gros Chêne de Pierre Gascar et Jacqueline Delaunay8 ou un peu plus tard encore L’Arbre en bois de Philippe Corentin9, il faut attendre la fin des années 2000 pour constater non seulement un retour de la présence végétale, mais aussi de nouvelles représentations des espaces naturels et une attention particulière au monde végétal.
La sensibilisation au végétal se manifeste aujourd’hui dans les très nombreuses publications d’albums, d’abécédaires, d’imagiers, de romans dont il serait difficile de dresser une liste exhaustive. Dans ce vaste corpus contemporain, je m’intéresserai plus particulièrement à des albums qui jouent avec la matière ou la texture du livre pour offrir au lecteur une expérience du végétal. Mon corpus rassemble ainsi des albums à systèmes contemporains que ce soit des livres à découpe ou des pop-ups. Il s’agira d’analyser comment, dans le travail même de la matière, les créateurs proposent au jeune lecteur des modalités variées de lecture qui sont autant de manières d’appréhender les sensibilités végétales.
Parmi les auteurs-illustrateurs contemporains qui s’intéressent au végétal à travers leur création, j’ai choisi de m’arrêter sur l’œuvre d’Emilie Vast qui a publié près d’une vingtaine d’albums aux éditions MeMo, maison d’édition qui fait la part belle à l’illustration, dans une démarche explicitement artistique, en remettant en lumière des artistes du patrimoine, mais aussi en publiant des artistes contemporains, avec une grande attention accordée à la matière, au papier, au graphisme. Le style graphique d’Emilie Vast est très reconnaissable dans son économie chromatique et dans le recours au dessin vectoriel qui produisent des figures d’une délicatesse presque désuète. L’illustratrice invite dans la majorité de ses albums à une exploration du vivant, animaux et végétaux, souvent représentés dans leur cohabitation et leurs interactions, comme on peut le voir sur de nombreuses premières de couverture10.
Il était un arbre11 présente la vie d’un arbre, au cours des saisons. Le thème est un topos de la littérature de jeunesse en album et l’ouvrage, comme bien d’autres, pourrait seulement être l’occasion/prétexte de faire comprendre le principe des saisons aux jeunes lecteurs. Pourtant le travail graphique, l’organisation de la page, le jeu de découpe proposés par Emilie Vast leur offrent une autre expérience : ils invitent aussi et surtout à une forme d’exploration de l’espace du livre qui met en lien toutes les manifestations du vivant.
Après une première double page qui montre la croissance progressive d’un arbre, depuis la graine jusqu’à la taille adulte d’un arbre, en passant par la pousse en plusieurs étapes, l’album fonctionne sur le principe de deux doubles pages : la première représente l’arbre au centre, à cheval sur la pliure, qui gardera cette position et les mêmes proportions tout au long de l’ouvrage. Dès la deuxième double page, apparaît un trou, une découpe, dont la taille et l’emplacement sont ensuite variables au fil des doubles pages : cette découpe fait apparaitre un animal sauvage - un cerf, un lapin, un canard, un renard - et invite le lecteur/observateur à poursuivre la découverte, sur la deuxième double page suivante qui s’ouvre sur un autre espace, instaurant ainsi une forme de continuité. Le procédé est repris jusqu’à la dernière simple page qui renvoie au début de l’album, dans un mouvement cyclique qui mime celui des saisons, puisque l’on y retrouve l’écureuil du début qui va enterrer un fruit, qui donnera une graine etc.
L’album est presque sans texte : seul un verbe à l’infinitif apparait toutes les deux doubles pages : « Grandir », « Séduire », « Faire son nid », « Profiter de la vie », « Faire ses réserves », « Migrer », « Survivre », « Recommencer ».
L’arbre, arrivé à maturité, ne bouge donc plus de sa position centrale, confirmant d’une certaine façon son statut de personnage principal comme le titre l’annonçait : il est au cœur du livre, littéralement, et constitue le repère dans l’espace de la page et dans le cours des saisons dont il porte aussi les signes en se couvrant de fleurs, de feuilles, puis de fruits, avant de se dépouiller des unes et des autres. Fixe mais cependant changeant, il permet de saisir l’évolution temporelle12. Cependant, le jeu de découpe invite, à mon sens, à d’autres expériences de lecture et à une autre réflexion sur la réalité de l’arbre.
En effet, la découpe ouvre à un espace élargi, ou qui, plus exactement, s’élargit en suivant le mouvement des animaux, au-delà de l’emplacement de l’arbre, au-delà de la page que le lecteur a sous les yeux. On y découvre d’autres plantes et fleurs qui jalonnent le parcours du cerf, du faisan, du lapin, tout un éco-système qui suit aussi le même rythme des saisons. A la floraison du poirier, puisqu’il s’agit d’un poirier, fait écho l’éclosion des iris et d’autres fleurs des champs ; à l’arrivée des poires sur la double page, répond la pousse des petits pois ou des carottes. Au moment où l’arbre perd ses feuilles, le trou dans la page en haut à droite focalise l’attention sur un canard sauvage dont on découvre le vol migratoire, au-dessus d’un étang, par-delà les montagnes, comme si, en quelque sorte, quelque chose de l’arbre aussi se déplaçait, comme si la vie de l’arbre prenait de l’ampleur.
Les effets d’échos d’une double page à l’autre, grâce à la découpe, sont également renforcés par le jeu chromatique : en effet, Emilie Vast a recours à peu de couleurs et ne cherche pas à reproduire à l’identique les couleurs naturelles. Mais par les effets de rappel chromatique, dans des variations limitées au gris, au noir et à l’orange, elle suggère tout à la fois la simultanéité des phénomènes naturels, leur continuité, leur contiguïté et leurs interactions.
Pour clore l’exploration de cet ouvrage, je reviendrai sur les infinitifs qui constituent le seul texte de cet album : à eux seuls, ils ne peuvent raconter une histoire, puisqu’ils n’ont pas d’inscription temporelle et qu’ils ne sont pas actualisés par un sujet. On ne peut guère faire appel aux fonctions convoquées par Barthes concernant le rôle du message linguistique par rapport à l’image13 : le texte, ici, n’assure ni une fonction d’ancrage ni une fonction de relais. Loin de la fonction répressive du texte, ou de la visée injonctive parfois rattachée à ce mode verbal, il semblerait ici que l’infinitif fonctionne au contraire comme une ouverture. Parce qu’il ne porte pas les marques de personne, le verbe à l’infinitif peut alors être un signifiant commun à tous les vivants qui se trouvent représentés dans l’image et qui l’actualisent chacun à sa manière, mais, en même temps, en lien avec tous : les végétaux, les animaux non-humains, mais aussi humains dont on aperçoit les traces d’activités dans bon nombre de pages, comme un vélo posé contre l’arbre, le bonhomme de neige ou encore une brouette.
Ainsi, dans cet album d’Emilie Vast, l’infinitif apparait comme une forme en creux, dans un jeu de convergence avec la découpe même du papier : pour prendre sens, l’un et l’autre nécessitent d’être traversés par un sujet. Le jeu sur la matière - le papier - et le jeu sur la langue invitent ici le jeune lecteur à participer à cet élargissement de l’expérience de l’arbre, à éprouver la continuité, la similitude et les interactions entre les êtres vivants, la richesse de son monde partagé. En cela, l’expérience de l’album, en tant que traversée de la matière et de la langue offre au jeune lecteur, fait écho aux propos d’Emanuele Coccia :
Ce n’est que lorsque nous reconnaissons que la vie qui nous anime et nous traverse est la même que celle qui anime et traverse un pissenlit, un oiseau de paradis, mais aussi les champignons, bactéries ou virus (…) que nous pouvons changer notre regard, notre attitude et nos actions envers la planète14.
Les ouvrages que je me propose d’étudier dans ce deuxième temps sont des pop-ups, publiés entre 2008 et 2018. Le pop-up fait partie des livres à système, des livres-objets qui proposent dans l’ouverture de la double page le déploiement d’un système en trois dimensions qui vient en quelque sorte déborder le cadre strict du livre, ou élargir son espace. Il nécessite un travail sur la matière, une superposition de papier, de découpes et pliages de manière à créer le surgissement de formes à la tourne de page, formes qui sont associées à des « sculptures de papier », dans la suite des créations d’un Calder ou d’un Bruno Munari. Ces livres-objets existent depuis longtemps mais se sont multipliées plus récemment, grâce à l’évolution des techniques et au moindre coût de fabrication de tels ouvrages, notamment grâce à la découpe au lazer. Ils n’ont pas été pensés initialement pour inviter le jeune lecteur à s’engager dans une expérience sensible du végétal. Souvent, ils ont cherché à représenter des mécanismes, des monuments, des petits théâtres, parfois des animaux en trois dimensions15. Cependant comme l’affirme Cécile Boulaire, « le livre n’est plus le simple porteur de signes dont le déchiffrement ferait jaillir le sens, il est lui-même objet-sens et objet des sens »16. Or parmi les productions les plus récentes, de plus en plus de pop-ups proposent des dispositifs qui mettent en scène le végétal et l’on peut alors s’interroger sur les expériences spécifiques, sensibles, du végétal que ces ouvrages peuvent proposer.
Faire surgir et émerveiller : tels semblent être les maitres-mots dans la création des pop-ups et dans l’effet dans leur réception. La maison d’édition Les Grandes Personnes a développé un vaste catalogue de pop-ups dont je retiendrai ici trois titres d’un de leur créateur-phare Philippe UG : Lutin des bois (2015), Le petit peuple du Sol (2017), Corolles (2018).
Chacun des trois pop-ups est accompagné d’une fiche éditoriale où sont clairement affichées les intentions qui prévalent à la création :
« Ce livre animé renferme six planches aux délicates sculptures de papier, aussi belle et fragiles que les pétales de fleurs que l’on y découvre. Un hommage aux fleurs, leur diversité, leurs textes, leurs couleurs, leur senteur, leur beauté. Ce livre s’adresse à tous les amoureux de ces merveilles de la nature… » (Corolles)17
« Dans la terre, dans les bois, sous les feuilles mortes, un petit peuple bien particulier vous attend. Cinq splendides planches mettent en scène des champignons dans toute leur beauté et leur diversité, ainsi que les petits insectes qui s’activent autour d’eux. Une ode à la nature ». (Le petit peuple du sol)
Les lutins des bois se réunissent pour célébrer la fin de l’hiver. Retrouve-les dans ce conte à travers sept magnifiques tableaux qui évoquent la magie des paysages hivernaux ». (Lutin des bois)
Que le pop-up se focalise sur les fleurs, les sous-sols, la vie animale et végétale ou bien encore sur une histoire qui met en scène des personnages imaginaires au cœur de la forêt, le discours éditorial qui l’accompagne souligne la volonté de proposer une œuvre d’art qui cherche à émerveiller et célébrer la beauté du « spectacle de la nature » pour reprendre le titre de l’ouvrage de l’Abbé Pluche au 18e siècle18 dont Armand Guillem présente ainsi l’une des visées :
En fait, il s’agit pour Pluche d’ouvrir les yeux des lecteurs sur les richesses de la nature, afin qu’ils perçoivent ce que l’éloignement, la petitesse et l’inattention leur dérobaient19.
De fait, dans les pop-ups retenus, il s’agit bien par le surgissement des formes de créer un effet d’émerveillement que certains ont pu appeler l’effet « Waouh »20. Le surgissement dans certains albums est d’autant plus spectaculaire qu’il déplace le point de vue du lecteur/spectateur qu’il positionne à hauteur du sol, des plantes ou des fleurs, parfois même dans une légère contre-plongée qui amplifie son effet. Le spectacle suscite aussi l’émerveillement parce que l’ouverture de la double page qui crée le surgissement semble presque mimer la pousse des végétaux, ou encore l’épanouissement des fleurs. Dans Corolles, le choix des couleurs vives pourrait faire penser à une sorte de feu d’artifice floral.
Plusieurs sens sont donc convoqués dans ce spectacle : la vue, bien sûr, mais aussi l’ouïe car l’ouverture de chaque double page provoque des bruits que l’on pourrait assimiler à tous ces petits sons presque imperceptibles du monde végétal et animal. Enfin, le toucher, quoique périlleux pour la conservation du livre, est également sollicité car la prouesse technique de ce déploiement invite à toucher ces sculptures de papier, à faire l’expérience sensible de leur délicatesse et de leur fragilité. Seul l’odorat, quoi qu’en dise le discours éditorial, n’est pas directement sollicité, même si certains des textes évoquent « le parfum des fleurs, dans le soir » (Corolles).
Le dispositif qui suscite l’émerveillement peut aussi solliciter l’attention, la capacité d’observation des jeunes lecteurs. Ainsi, dans le Petit peuple du sol, au-delà de l’admiration éprouvée face à toutes les variétés de champignons qui semblent surgir de la page, il s’agit aussi de repérer des insectes qui vivent tout autour. Et si certains sont représentés, comme les collemboles, sur la partie plane de la page, et donc assez aisément repérables, d’autres sont à trouver sur les parties en relief. Les pyrrhocoris apterus, plus connus sous de nom de gendarmes, ne sont pas vraiment cachés et un œil de jeune lecteur n’aura aucun mal à les apercevoir. Dans les mises en relief frontales, l’insecte est encore repérable quoique moins visible. En revanche, la dernière double page où se déploie une sorte de double cercle de champignons, appelé cercles des fées ou rond de sorcière, le lecteur/spectateur/observateur est invité à tourner le livre ou bien à se déplacer autour de lui pour observer l’envol du scarabée qui suit ce cercle.
Le spectacle de la sculpture de papier crée assurément l’émerveillement, mais sollicite les sens et parfois le corps du lecteur pour admirer, chercher ou observer les champignons et les insectes qui s’inscrivent dans leur environnement. Le texte présent sur chaque double page oriente le lecteur dans sa recherche et vient poser des noms généralement assez précis, voire tout à fait scientifiques sur ces réalités du vivant, sans pour autant écarter une dimension poétique du propos.
« L’oronge rougissante et l’amanite tue-mouche regardent passer les limaces amoureuses »
« Dans l’humus, les collemboles soignent la colonie de mousserons et ses jeunes pousses » (Le petit peuple des bois)
« Quand le soleil du printemps réchauffe la terre, le calice grandit et les sépales s’ouvrent » (Corolles)
L’artifice de papier parvient donc à associer émerveillement, poésie et savoirs scientifiques. Il laisse entendre dans la co-présence du végétal et de l’animal, des formes de cohabitations et d’interactions, commentées poétiquement et scientifiquement par un texte bref. Les réalisations plastiques, prouesses techniques dans le cas de Philippe UG, relèvent bien d’une poétique du surgissement mais aussi d’une esthétique du plein : les fleurs, les arbres, les champignons se dressent et occupent une large partie du champ visuel. Et même si la tourne de page fait disparaitre une scène pour en faire advenir une autre, l’attention est surtout portée au phénomène d’apparition comme affirmation d’une présence immédiate.
D’autres pop-ups vont faire jouer leurs systèmes non seulement pour expérimenter le surgissement, mais aussi pour rendre compte de la dissimulation, de l’éloignement ou de la disparition du végétal pour sensibiliser à des réalités végétales moins visibles ou pour suggérer un discours d’alerte sur les menaces qui pèsent sur le monde du vivant.
Ainsi la démarche de l’artiste Susumu Shingu offre au jeune lecteur une autre expérience à travers la sculpture de papier qui produit un effet de déplacement et invite à l’exploration. Susumu Shingu est un artiste japonais, reconnu mondialement dont les installations alliant métal et toile s’apparentent souvent à des mobiles. Il est présenté sur le site de la galerie Jeanne Bucher Jaeger comme « peintre, sculpteur et philosophe de la nature » ou plus poétiquement « sculpteur du vent, de l’eau et de la gravité »21. Pour les enfants, il a réalisé des albums publiés en France chez Gallimard Jeunesse Giboulées. La plupart mettent en scène des éléments naturels : l’araignée, la fraise, les papillons monarques. Je m’arrêterai sur l’un des deux pop-ups que l’artiste a produit à destination des enfants, Un petit bois mystérieux, paru en 201522.
Si la première page relève du surgissement, le petit bois est paradoxalement masqué et vu d’au-dessus, à travers les nuages. Chaque double page, par une sorte d’effet de zoom avant, produit par la taille et l’emplacement de la figure de papier, permet au jeune lecteur de s’approcher de cette forêt et de pénétrer en son cœur : ainsi, la page suivante isole un arbre et ses habitants, puis le sol couvert de fleurs. On se rapproche encore pour observer des animaux : insectes et petits reptiles, animaux aquatiques de l’étang. Si la page suivante qui rassemble des animaux d’origine variées peut laisser plus perplexe, la progression dans l’album fait ensuite découvrir par un zoom arrière, le bois en plongée, illuminé par le coucher de soleil. Enfin, la dernière page opère un dernier zoom arrière, au-dessus de la voute céleste, sous-laquelle apparait, minuscule, le petit bois : cette dernière page suggère que la scène soit éclairée pour que les découpes de la voûte céleste permettent une projection sur la double page noire, inscrivant l’arbre dans une dimension cosmologique.
À travers cette rapide description, on peut constater que si le surgissement reste de mise car il y a bien une création de forme en trois dimensions à chaque tourne de page, il ne produit toutefois pas le même effet que dans les précédents ouvrages. De fait, l’apparition s’accompagne ici d’une dissimulation, celle du petit bois, en première et en dernière doubles pages. Le créateur, en positionnant la structure en relief à des endroits différents doubles pages intermédiaires, crée des effets de zoom avant ou arrière, invitant alors de lecteur non seulement à une expérience en trois dimensions, mais à une véritable expérience du déplacement, au plus près des vies animales et végétales qu’il recèle. Une expérience du déplacement dans l’espace et dans le temps aussi puisque la perception suit l’évolution du jour et de la lumière. L’émerveillement reste présent, selon des modalités différentes, suggérée par un texte minimal qui sert de guide au lecteur. Mais le lecteur-spectateur est aussi un promeneur ou un explorateur, invité à pénétrer dans le cœur du petit bois, dans un double mouvement qui révèle alternativement l’infiniment petit et l’infiniment grand.
Le pop-up permet aussi de prendre conscience de la vie végétale qui échappe à l’œil humain, à ce qui se joue ailleurs, notamment sous terre. C’est le cas d’un autre album des éditions des Grandes Personnes intitulé La Noisette23 destiné aux tout petits : d’abord, cette noisette apparait entre les pattes d’un écureuil qui la laisse échapper. Elle est progressivement enfouie dans l’épaisseur de la neige et sous la surface blanche de la page : la découpe du papier permet d’entrevoir son enfouissement, avant sa disparition totale, son invisibilité pour le jeune lecteur mais aussi pour les animaux qui surgissent de page en page. Le lecteur est alors mis dans une position de de connaissance. La noisette ne réapparait qu’à l’avant-dernière page, métamorphosée en une petite pousse au creux de la pliure, puis en page finale, sous la forme d’un noisetier. Le pop-up accompagne ici le rythme des saisons, met en avant une temporalité cyclique, comme on a déjà pu le voir dans d’autres ouvrages, mais joue surtout sur la dissimulation explicitée par l’évidement de la page pour ensuite suggérer l’existence d’une vie végétale qui se poursuit, hors de notre vue, sous les couches de neige et de papier. Le jeu sur la matière est ici ludique mais aussi très clairement éducatif.
Le pop-up Dans la forêt du paresseux, d’Anouk Boisrobert et Louis Rigaud aux éditions Hélium joue sur l’effet de disparition en s’appuyant sur un dispositif plus complexe au service d’un autre discours plus alarmiste24 : en effet, il ne s’agit plus ici seulement de rendre compte du cycle naturel de la vie végétale, mais au contraire de rendre visibles les effets de l’intervention humaine qui menace l’espace forestier et, par voie de conséquence, le monde animal dont il constitue le territoire.
En 2009, les deux mêmes créateurs avaient présenté dans Popville un dispositif également très efficace rendant compte de l’urbanisation et l’industrialisation à outrance et de la disparition de certains espaces naturels. En 2013, avec Océano, c’est sur et sous les océans qu’ils invitent le lecteur, pour évoquer à la fois la beauté des fonds marins mais aussi les menaces qui pèsent sur eux.
Dans la forêt du paresseux, marqué par un même engagement, fait dans un premier surgir une forêt touffue, en jouant de l’évidement de la page, comme l’a bien décrit Eléonore Hamaide-Jager. Mais au fil des pages cet évidement se réduit au fur et à mesure que l’espace de la forêt s’amenuise, sous l’effet de l’intervention humaine et des « engins aux mâchoires terribles ». Les pages d’abord dominées par le vert se vident progressivement pour laisser place au blanc, donnant à voir l’espace amputé puis vidé de sa réalité végétale. L’effet combiné du pop-up et du jeu chromatique est spectaculaire : il propose une expérience, non du surgissement mais de l’effacement et de la disparition. Le paresseux, quant à lui, initialement dissimulé dans la forêt et quasi invisible pour le lecteur enjoint de le trouver, finit par être tout à fait visible, suspendu au seul arbre encore vivant, exposé et donc menacé de disparition. L’avant dernière-page sans relief, confirme la disparition de la forêt dont il ne reste que quelques tout petits morceaux de bois et du paresseux : « tout est désolation, tout est sans vie » dit le texte. Toutefois si l’album donne à faire de manière particulièrement efficace l’expérience de la disparition végétale et animal, il incite aussi le lecteur à l’action, à l’image de l’homme qui, dans l’album, décide de « planter une nouvelle forêt ». L’avant-dernière page fait appel à un système de tiret : la languette sur laquelle est représentée un homme en train de semer doit être activée par le lecteur pour que surgissent très modestement de petites pousses annonciatrices d’une nouvelle forêt qui s’épanouit à la page la page suivante dissimulant et protégeant de nouveau le paresseux.
Le pop-up ici sert donc un propos engagé, entre mise en garde, dénonciation mais aussi incitation à l’action, comme l’attestent les propos exposés sur la quatrième de couverture :
13 millions d’hectares de forêts ont disparu entre 2000 et 2010. Cette destruction menace la survie de nombreuses espèces, parmi lesquelles le paresseux à crinière. Mais il n’est pas encore trop tard pour empêcher ces ravages.
Si les jeunes lecteurs peuvent – ou pas – lire ce texte de quatrième de couverture, peut-être plus adressé aux adultes médiateurs, en revanche, le dispositif lui-même leur donne à faire directement l’expérience sensible de cette menace de la forêt tout en leur conférant le pouvoir d’agir d’abord sur le livre lui-même, laissant alors entendre que c’est à lui, et sans doute à sa génération que revient le pouvoir d’agir et de réagir, ainsi que l’affirme Nathalie Prince dans l’introduction d’Eco-graphie : « C’est à l’enfant de réinventer et de réenchanter le monde de demain. Voilà ce que lui demande l’adulte »25. Le système du pop-up, comme l’a montré Anne Chassagnol26, invite bien le lecteur à une activité participative. Dans le cadre de l’album d’Anouk Boisrobert et Louis Rigaud, cette participation se fait acte écologique et politique.
Je terminerai ce parcours par l’évocation d’un dernier pop-up, loin de toute spectacularisation, celui de l’artiste japonais Komagata, co-édité par One Stroke et Les Trois Ourses, paru en 2008, puis au Cosmographe en 2018 : Petit Arbre. Entre temps, il a été notamment réédité, selon la volonté de l’artiste, après la catastrophe de Fukushima. Ici, l’apparition est clairement le corolaire de la disparition, comme on peut le voir sur la première de couverture où l’arbre se dessine dans les creux de la matière.
Ce petit arbre, surgit seul et modestement au beau milieu de la page, blanc sur fond blanc, « une si petite présence » dit le texte, à peine visible. La tourne de page le voit croître doucement, les pages épaisses changent de texture, se colorent légèrement en rose, bleu au fur et à mesure de sa croissance et une ombre vient le prolonger indiquant la position d’un soleil hors cadre. Le printemps, l’été, puis l’automne semblent toucher l’arbre mais aussi l’ensemble de la page qui, dans l’hiver, devient noire, de la même manière que l’arbre.
Des oiseaux quittent l’arbre, d’autres s’installent et ces va-et-vient changent « son point de vue » dit le texte. L’arbre accueille aussi la lumière, l’homme en deuil puis disparait aussi discrètement qu’il avait surgi, dans le gris de la page, sans qu’aucune raison ne soit donnée : il meurt, tout simplement. Les enfants et les vieilles personnes ne peuvent plus profiter de sa présence mais le gardent en mémoire. La dernière page fait écho à la première, laissant surgir une toute petite pousse, ailleurs.
Philippe Morlot27 a souligné la maitrise de l’espace, du format, du hors champ qui par le simple jeu d’ombre visible sur les pages suggère une vie, un territoire, progressivement urbanisé saisi du point de vue de l’arbre. Le lecteur est invité à tourner le livre pour comprendre de quelle présence ces ombres sont les marques, en adoptant pour ainsi dire le point de vue de l’arbre. Caroline Dumont, dans un très bel article issu de son travail de mémoire sur la temporalité chez Komagata28, a pu montrer comment le travail sur la matière même du livre, sur l’épaisseur et le tissage du papier, convoque la vue mais aussi le toucher, pour faire l’expérience même du cours de la vie. Le lecteur se trouve donc face à cet arbre qui surgit et disparait, face à lui-même en quelque sorte, et la perception du temps passe par l’attention à la matière végétale qui constitue le livre. Une expérience sensible et ontologique, partagée entre l’arbre et le lecteur et rendue possible par un dispositif au cœur de la matière, dans une retenue très éloignée du déploiement spectaculaire des premiers ouvrages évoqués.
Ce parcours à travers quelques ouvrages pop-ups ou à découpe nous a permis de décliner des expériences du végétal diverses : du spectacle de la nature à l’exploration du monde végétal, de l’émerveillement à l’exploration, de l’observation à la rêverie. Si certains ouvrages jouent d’abord et surtout sur l’effet de surgissement rendu possible par le dispositif même du livre à système, d’autres proposent d’aller au-delà pour participer à l’expérience végétale, ou pour partager cette expérience, dans le déploiement des pages mais aussi dans l’épaisseur végétale du papier dont les livres sont faits. C’est à cette expérience sensible de cette sorte que convie un autre livre-objet très récent, intitulé La Nature au bout des doigts29, qui joue du gaufrage des pages et invite à une lecture tactile, digitale des végétaux représentés en relief, blanc sur fond blanc.
Une autre expérience proposée par une maison d’édition argentine, a mis en évidence le lien organique entre les livres et les arbres. Mi papá estuvo en la selva a été publié pour la première fois en 2008 puis a été réédité en 201330. Comme on peut le voir sur la vidéo produite par la maison d’édition31, l’album réalisé selon des procédés respectueux de la nature, est présenté comme un « libro árbol », un livre-arbre qu’il s’agit effectivement de planter quand la lecture est achevée. Le récit proposé par l’album sous sa première forme, qui évoque l’expérience du père du narrateur dans la forêt équatorienne, la découverte d’autres pratiques et valeurs à l’égard des vivants au cœur de cet espace, trouve un prolongement dans la matière même du livre et dans le geste que cette matière induit : à savoir planter le livre afin que les graines de jacaranda contenues entre ses pages surgissent ensuite de la terre où l’ouvrage aura été enfoui, tel un trésor32. Si l’on ne pourrait y voir qu’un événement commercial s’appuyant sur une logique de spectacularisation, il n’en reste pas moins que l’expérience proposée relève d’un engagement éditorial et d’une sensibilisation au végétal auprès des jeunes lecteurs, à sa fragilité et aux menaces qui pèsent sur lui, au creux même de la matière. Le geste créateur, alliant l’artistique et l’artisanal, comme dans certains des pop-ups étudiés, pose le lecteur comme un être sensible qui grandit en faisant croître, comme un « rapporteur » de la nature pour éviter, comme le dit Philippe Descola33, que celle-ci ne devienne orpheline.
[1] Il n’est pas envisageable d’établir une bibliographie complète de l’ensemble de cette production. Pour donner toutefois un ordre d’idées, nous renvoyons à une petite investigation sur le site Ricochet, site dédiée à la littérature de jeunesse pour le seul mot clé « arbre ». Entre 2001 et 2011 sont parus 21 albums dont le sujet ou le titre concerne ce mot-clé. Pour la période 2012 et 2021, il n’y a pas moins que 112 ouvrages parus qui abordent l’éco-motif de l’arbre, https://www.ricochet-jeunes.org consulté le 6 avril 2022. Cet éco-motif dans la littérature de jeunesse a d’ailleurs donné lieu dans l’ouvrage dirigé par Nathalie Prince et Sébastian Thiltges, à un article de Gwenola Caradec, « Comme un oiseau sur la branche : l’écomotif de l’arbre dans l’album de jeunesse », p. 119-132.
[2] Nathalie PRINCE, Sébastian THILTGES, Éco-graphies. Écologie et littératures pour la jeunesse, PUR, 2018.
[3] Ibid., p. 10.
[4] Ibid., p. 15.
[5] Lida ROJAN, Froux le lièvre, Père Castor, « Le Roman des bêtes », Flammarion, 1935 ; Bourru l’ours brun, « Le Roman des bêtes », Flammarion, 1936.
[6] Paul FAUCHER, La mission éducative des albums du Père Castor. Texte de la conférence de Girenbad, 18 mai 1957, édité par Les amis du Père Castor, 1998.
[7] Christophe MEUNIER, « Images de l’urbain dans les albums pour enfants », Strenæ [En ligne], 12 | 2017, mis en ligne le 20 juin 2017, consulté le 07 avril 2022. URL : http://journals.openedition.org/strenae/1724 ; DOI : https://doi.org/10.4000/strenae.1724.
[8] Pierre GASCAR, Jacqueline DELAUNAY, Le Gros Chêne, collection Dauphin Bleu, Robert Laffont, 1977. L’album met en scène deux enfants qui s’opposent à la destruction d’un gros chêne qui abrite des milliers de vies animales et réussissent à convaincre les adultes de s’engager dans la plantation d’autres arbres.
[9] Philippe CORENTIN, L’Arbre en bois, L’école des loisirs, 1999. Par la voix d’une table de chevet, qui était originellement un arbre, Corentin ici met en cause, de manière carnavalesque, la folie consumériste qui favorise la destruction massive et les éco-systèmes.
[10] L’ensemble des créations d’Emilie VAST fait une large place à la représentation végétale. Nous pouvons toutefois mentionner la série des différents herbiers qu’elle a créés, L’Herbier d’Emilie Vast, Petite flore des bois d’Europe, Memo, 2010, L’Herbier d’Emilie Vast, Petite flore des bois d’Europe ; la série des Eaux : Eau douce, MeMo, 2021, Eau Salée, MeMo, 2021 ; ou encore Plantes Vagabondes, MeMo, 2018.
[11] Emilie VAST, Il était un arbre, MeMo, 2012.
[12] Gwenola CARADEC montre que l’éco-motif de l’arbre est non seulement l’occasion d’une éducation au temps cyclique des saisons. Elle suggère aussi que cet éco-motif, « merveilleuse horloge cosmique » pour Bachelard, peut également proposer d’autres expériences temporelles : un temps étiré, ralenti par l’arrêt sur l’image, l’observation attentive des mille vies que l’arbre abrite, par exemple chez Anne Crausaz, contemporaine d’Emilie Vast, op. cit., p. 129.
[13] Roland BARTHES, « Rhétorique de l’image », Communication, 4, p. 40-51.
[14] Emanuele COCCIA, propos tenus dans Le Monde, « Nous sommes tous une seule et même vie », 5 août 2020.
[15] Jean-Charles TREBBI, L’art du pop-up et du livre animé, Éditions alternatives, 2012.
[16] Cécile BOULAIRE, « Pop-ups, matières, sensualité : des objets très spéciaux… », Françoise Legendre éd., Bibliothèques, enfance et jeunesse, Éditions du Cercle de la Librairie, 2015, p. 62-65.
[17] C’est moi qui souligne en gras et en couleurs certains éléments des propos éditoriaux.
[18] L’ABBÉ PLUCHE, Le Spectacle de la nature ou Entretiens sur les particularités de l’histoire naturelle qui ont paru les plus propres à rendre les jeunes gens curieux et à leur former l’esprit, publié entre 1732 et 1750.
[19] Armand GUILHEM, « Le Spectacle de la nature ou l'esthétique de la Révélation », Dix-huitième siècle, vol. 45, n°1, 2013, p. 329-345.
[20] L’usage de cette onomatopée qui renvoie au caractère spectaculaire et bluffant du dispositif du livre serait peut-être à réinterrogée : en effet, elle est employée dans l’univers du marketing et de la communication. Il y a toutefois un effet immédiat, sans filtre, qui peut précéder l’état d’émerveillement qui relève d’une autre temporalité.
[21] Le site de la galerie présente le parcours et les principales œuvres de l’artiste qui s’appuie sur les forces naturelles pour animer ses créations. https://jeannebucherjaeger.com/fr/artist/shingu-susumu/, consulté le 7 avril 2022.
[22] L’artiste a produit un second pop-up, Le Voyage du vent, Giboulées, Gallimard Jeunesse, 2017.
[23] Anne-Florence LEMASSON, Dominique EHRHARD, La Noisette, Éditions Les Grandes Personnes, 2017.
[24] L’album est souvent cité ou analysé que ce soit dans des études sur les livres-objets ou sur les sujets abordant l’écologie. Toutefois, il me semblait impossible, dans le cadre de cette réflexion, de faire l’impasse sur cet ouvrage très époustouflant dans l’efficacité de son dispositif. Cf. Eléonore HAMAIDE-JAGER, « Trous du livre, plénitude du sens ? », Formes : supports/espaces, Christelle REGGIANI et alii (dir.), Presses universitaires du Nouveau Monde, 2015, p. 121-137 ; Gwenola Caradec, op.cit., p. 131 ; Nathalie Prince, op.cit., p. 10.
[25] Op.cit., p. 13.
[26] CHASSAGNOL Anne, « Pop-up ! L'esthétique du déploiement ou les débords du livre-objet », Le français aujourd'hui, 2014/3 (n° 186), p. 22-33. DOI : 10.3917/lfa.186.0022, URL : https://www.cairn.info/revue-le-francais-aujourd-hui-2014-3-page-22.htm.
[27] Philippe MORLOT, « Le livre-objet et l'émergence de l'enfant lecteur », Le français aujourd'hui, vol. 186, no. 3, 2014, pp. 105-113.
[28] Caroline DUMONT, « Les albums de Katsumi Komagata ou comment traduire la lente dépose du temps », a reçu le prix Critique 2019 de l’Institut Perrault, et a été publié sur le site. http://www.institutperrault.org/centre-de-ressources/pole-ressources/articles/les-albums-de-katsumi-komagata-ou-comment-traduire-la-, consulté le 25 avril 2022.
[29] PÉNÉLOPE, La Nature au bout des doigts, éditions Les Grandes Personnes, 2021. Cet ouvrage est présenté comme un pont entre voyants et non-voyants sur le site de la maison d’édition.
[30] Anne Decis GUSTI, Mi papá estuvo en la selva, Pequeño editor, 2008.
[31] Il s’agit d’une vidéo produite dans une visée publicitaire mais qui montre les principes au cœur de cette création. https://www.estandarte.com/noticias/libros/infantil-y-juvenil/mi-papa-estuvo-en-la-selva-un-libroarbol_3278.html, consulté le 25 avril 2022.
[32] Deux formes de rééditions ont été réalisées : la première reprend le même principe mais n’est pas commercialisée, alors que la deuxième est plus traditionnelle. Elle propose l’album dans une toile de jute et un marque-page qui contient les graines.
[33] Philippe DESCOLA, Par-delà nature et culture, Gallimard, 2005 ; réédition, Folio Essai, p. 690.
Résumé
La littérature de jeunesse produit aujourd’hui un nombre considérable d’albums centrés sur l’attention au monde végétal et animal. Parmi cette vaste production, l’article s’intéressera particulièrement à des livres à systèmes, pop-ups ou livres à découpe et s’interrogera sur la manière dont ces systèmes ou plus largement les techniques d’élaboration de ces livres-objets sont apte à favoriser une sensibilité au végétal, entre émerveillement, poétisation et mise en garde contre les menaces qui pèsent sur les réalités végétales. Il s’agira de déterminer également la place et le rôle que de tels livres assignent aux jeunes lecteurs.
Abstract
Children’s literature has produced numerous picture books about plant’s and animal’s preservation. Among this production, we selected system books, as pop-up or die-cut books, to observe how these systems can raise particular awareness of plants and vegetal world, between wonder, poetic attention or warning against threats to plant life. This article also aims to describe the place and the role such books assign to young lectors.
Des pop-ups pour quelles sensibilités au végétal ?
Spectacle de la nature et effet « Waouh » des pop-ups
Apparition, disparition, dissimulation : la face cachée de la vie végétale
La disparition et le discours d’alerte
Florence GAIOTTI
Université d’Artois, Textes et Cultures (EA 4028)
Bibliographie
BARTHES, Roland, « Rhétorique de l’image », Communications, 4, 1964, p. 40-51.
BOULAIRE, Cécile, « Pop-ups, matières, sensualité : des objets très spéciaux… », Françoise Legendre éd., Bibliothèques, enfance et jeunesse, Éditions du Cercle de la Librairie, 2015, p. 62-65.
CARADEC, Gwenola, « Comme un oiseau sur la branche : l’écomotif de l’arbre dans l’album de jeunesse », Nathalie PRINCE, Sébastian THILTGES (dir.), Éco-graphies. Écologie et littératures pour la jeunesse, Presses Universitaires de Rennes, 2018.
CHASSAGNOL, Anne, « Pop-up ! L'esthétique du déploiement ou les débords du livre-objet », Le français aujourd'hui, vol. 186, n°3, Paris, Armand Colin, 2014, p. 22-33.
COCCIA, Emanuele, propos tenus dans Le Monde, « Nous sommes tous une seule et même vie », 5 août 2020.
DESCOLA, Philippe, Par-delà nature et culture, Paris, Gallimard, 2005 ; réédition, Folio Essai.
DUMONT, Caroline, « Les albums de Katsumi Komagata ou comment traduire la lente dépose du temps », site de l’Institut Perrault ; DOI : http://www.institutperrault.org/centre-de-ressources/pole-ressources/articles/les-albums-de-katsumi-komagata-ou-comment-traduire-la-consulté le 25 avril 2022.
GUILHEM, Armand, « Le Spectacle de la nature ou l’esthétique de la Révélation », Dix-huitième siècle, vol. 45, n°1, 2013, p. 329-345.
FAUCHER, Paul, La mission éducative des albums du Père Castor. Texte de la conférence de Girenbad, 18 mai 1957, Meuzac, Les amis du Père Castor, 1998.
HAMAIDE-JAGER, Eléonore, « Trous du livre, plénitude du sens ? », Christelle REGGIANI et alii (dir.), Formes : supports/espaces, Presses Universitaires du Nouveau Monde, 2015, p. 121-137.
MEUNIER, Christophe, « Images de l’urbain dans les albums pour enfants », Strenæ [En ligne], 12 | 2017, mis en ligne le 20 juin 2017, URL : http://journals.openedition.org/strenae/1724 DOI : https://doi.org/10.4000/strenae.1724, consulté le 25 avril 2022.
MORLOT, Philippe, « Le livre-objet et l'émergence de l'enfant lecteur », Le français aujourd'hui, vol. 186, n°3, Armand Colin, 2014, p. 105-113.
PRINCE, Nathalie, THILTGES, Sébastian (dir), Éco-graphies. Écologie et littératures pour la jeunesse, Presses Universitaires de Rennes, 2018.
TREBBI, Jean-Charles, L’art du pop-up et du livre animé, Éditions alternatives, 2012.
Albums du corpus
VAST, Émilie, Il était un arbre, Memo, 2012.
UG, Philippe, Lutins des bois, Les Grandes Personnes, 2015.
—, Le petit peuple du sol, Les Grandes Personnes, 2017.
—, Philippe, Corolles, Les Grandes Personnes, 2018.
SHINGU, Susumu, Un petit bois mystérieux.
LIDA, ROJAN, Froux le lièvre, Père Castor, « Le Roman des bêtes », Flammarion, 1935.
—, Bourru l’ours brun, « Le Roman des bêtes », Flammarion, 1936.
GASCAR, Pierre, Le Gros Chêne, collection Dauphin Bleu, Robert Laffont, 1977.
CORENTIN, Philippe, L’Arbre en bois, L’école des loisirs, 1999.
LEMASSON, Anne-Florence, EHRHARD, Dominique, La Noisette, Éditions Les Grandes Personnes, 2017.
PÉNÉLOPE, La Nature au bout des doigts, Les Grandes Personnes, 2021.
GUSTI, DECIS, Anne, Mi papá estuvo en la selva, Pequeño editor, 2008, réédité en 2013.
BOISROBERT, Anouk, RIGAUD, Louis, Dans la forêt du paresseux, Hélium,
—, Popville, 2009.
—, Océano, 2013.
KOMAGATA, Petit arbre, One Stroke, 2008.
Sitographie
Site de la galerie Jeanne Bucher Jaeger : https://jeannebucherjaeger.com/fr/artist/shingu-susumu/, consulté le 7 avril 2022.
Blog de la revue Estandarte. Vidéo produite dans une visée publicitaire mais qui montre les principes au cœur de cette création du livre-arbre Mi papa estuvo en la selva. https://www.estandarte.com/noticias/libros/infantil-y-juvenil/mi-papa-estuvo-en-la-selva-un-libroarbol_3278.html.