Depuis plusieurs années, le gouvernement révolutionnaire cubain met en exergue les paysages archéologiques et culturels de l’Île. Ces paysages, parties intégrantes du patrimoine, peuvent tout aussi bien être urbains ou ruraux1, et donnent sans aucun doute à voir un nouveau visage du pays, ce qui n’est pas sans poser quelques questions.
Nous souhaitons ainsi analyser les causes qui, depuis le début des années 1990, poussent les dirigeants cubains à réinvestir certains territoires, et à leur redonner une signification pour la population. En effet, l’ouverture au tourisme consécutive à la Période spéciale n’a pas été sans conséquence pour le paysage cubain, qu’il a dans une certaine mesure fallu repenser.
Bien évidemment, nous nous attacherons dans un deuxième temps à étudier les impacts – positifs ou négatifs – d’une (re)composition du paysage impulsée par les autorités, sur le lien que les habitants de l’Île entretiennent avec ces espaces, et nous nous intéresserons à la possible recomposition de l’identité révolutionnaire sous-jacente.
Enfin, nous nous demanderons si le paysage culturel peut être une façon de relier la cubanía à la caribeanidad et à la latino-américanité, en tentant notamment de comprendre quels liens les paysages présentés comme « culturels » par les institutions cubaines, et reconnus en tant que tels par les institutions internationales, permettent d’établir avec la Caraïbe et l’ensemble du territoire latino-américain.
Commençons par rappeler que les labels sont décernés aux espaces patrimoniaux par les institutions gouvernementales, qui « voient dans le processus de classement de territoires fragiles un moyen de les protéger dans une optique environnementale et patrimoniale »2. Mais elles sont également épaulées dans cette tâche par des organismes internationaux, tel l’UNESCO, dont la reconnaissance, et notamment l’inscription sur la liste des biens du patrimoine mondial de l’humanité, constitue « un formidable outil de promotion, de reconnaissance et de lisibilité au niveau international »3. Pour un pays tel que Cuba, que l’on a bien souvent présenté comme isolé, l’inscription de sites sur la liste du patrimoine mondial constitue une ouverture sur le monde, et donne à voir un autre visage, une autre image du pays que celle, largement relayée, de dictature totalement hermétique qui colle au Crocodile vert.
Il convient donc de préciser que mettre en valeur les paysages devenait, avec la chute de l’URSS, une nécessité pour l’Île. Après son indépendance vis-à-vis de l’Espagne, l’Île s’est convertie en un lieu de plaisirs pour les citoyens des États-Unis, état de fait que la Révolution devait venir bouleverser :
Le tourisme cubain a connu trois phases de développement […] : d’abord tourisme de « débauche » pour les riches nord-américains, il devient, avec le triomphe de la révolution de 1959, un tourisme plus restreint mais respectueux des valeurs culturelles et sociales du pays ; après 1970, et plus encore dans les tumultueuses années 80, le développement du tourisme international s’affirme de manière conséquente4.
Bien évidemment, la période consécutive à la chute du camp socialiste a renforcé la « vocation » touristique de Cuba. En effet, la disparition des principaux alliés économiques et politiques de l’Île l’obligea à trouver de nouvelles sources de devises, et à réinvestir des territoires. Pour Cuba, repenser le territoire pour y accueillir le visiteur, jusqu’alors plutôt considéré comme un intrus, a supposé de réinvestir cet espace, mais également de se réapproprier l’Histoire. Dans un contexte de crise aiguë, les paysages cubains ont pu être perçus par les autorités cubaines comme un potentiel à exploiter, un facteur de développement économique.
Le danger qui survient est celui de la patrimonialisation à outrance, impulsée avant tout dans le but d’attirer les touristes ; elle n’est plus alors l’expression de la mise en valeur d’un patrimoine ressenti comme commun, mais une simple « exposition » de ce que d’aucuns pourraient appeler péjorativement « folklore » – point sur lequel nous reviendrons. Notons, pour le moment, que « le folklore – c’est-à-dire l’artisanat, la danse ou la musique, certaines coutumes – est l’un [des] éléments [constitutifs du potentiel touristique d’un pays], au même titre que le paysage, les plages, les vestiges de cultures passées ou l’architecture et, éventuellement, la gastronomie »5. Ce lien entre patrimoine, folklore et tourisme a été renforcé ces dernières années par une volonté apparemment universelle de conserver, sauvegarder et restaurer toutes les traces des racines de l’ensemble des cultures mondiales. Cela étant :
[…] la vague internationale de reconquête des identités perdues ou en perdition, […] mouvement qui se présente comme consensuel, n’est pas sans poser problème. Il indique en effet que les signes visibles (et invisibles) de la mémoire sont indispensables à l’identité des groupes sociaux comme aux intérêts scientifiques de l’histoire de l’art et de la muséographie ; que certains édifices ou paysages sont plus valorisables que d’autres ; et que les intérêts marchands, touristiques, de loisirs et résidentiels, peuvent tirer profit de ces nouvelles ressources : les patrimoines conservés et restaurés. Or, toutes les cultures n’entretiennent pas avec la destruction des objets et des espaces ces rapports de restauration « compulsive »6.
Pour sa part, le gouvernement révolutionnaire a toujours insisté sur le fait qu’il considérait la sauvegarde du patrimoine culturel et naturel comme une condition préalable au développement socio-économique des pays et des peuples – il en a donc fait une priorité, et considère que le patrimoine passé est une marche sur laquelle l’Homme du présent doit s’appuyer pour aller vers son futur.
Mais il faut encore dire que, dans certains cas (comme celui de la Vieille Havane), le réinvestissement des bénéfices générés par le tourisme dans la conservation ou la restauration du patrimoine bâti est plus que nécessaire, la situation économique de l’Île ne lui permettant pas d’investir massivement dans ce domaine sans le soutien que constituent les visiteurs7 :
En 1993, année où la crise atteignait son paroxysme, débuta la phase la plus ambitieuse du projet de rénovation de la Vieille Havane. En effet, le Decreto Ley 143 donnait l’autorisation à la Oficina del Historiador de la Ciudad (Bureau de l’Historien de la Ville), dirigé par Eusebio Leal Spengler, de réinvestir l’argent apporté par les touristes dans la reconstruction, la restauration et la préservation de la Vieille Havane – contre l’engagement d’œuvrer à des projets sociaux8.
De plus, l’élan de restauration et de conservation cubain, ajouté au nombre de sites classés dans le pays, peut avoir provoqué une sorte de « décalage » entre l’Île et ses voisins, et a sans doute contribué à faire du Crocodile vert « la » référence pour le touriste attiré par un voyage culturel dans la Caraïbe – on trouve là un éventuel motif de tension entre les États d’une zone à la recherche, depuis des décennies, d’une intégration totale réussie qui lui échappe totalement.
Ainsi, parmi les paysages culturels inscrits à la liste du patrimoine mondial de l’Humanité, on compte à Cuba le paysage archéologique des premières plantations de café du sud-est de Cuba (inscrit en 2000, et qui couvre 171 plantations sur 800 km²) et la Vallée de Viñales (inscrite en 1999). Cuba est d’ailleurs le seul pays latino-américain à posséder plusieurs sites inscrits à la liste des paysages culturels (la Valle de los Ingenios a été inscrite en 2005 en association avec un espace urbain, le Centre historique de Trinidad). Bien évidemment, cela ne signifie nullement que le patrimoine cubain soit « meilleur » que celui de ses voisins, « mais simplement que la politique publique de [cet État] promeut l’inscription au patrimoine mondial dans l’optique de la promotion touristique et la création d’opportunités de développement pour [son économie] »9, bien plus que d’autres.
Le doute n’est ici plus permis : sortir d’une situation d’isolement politico-diplomatique s’imposait aux autorités cubaines comme une impérieuse nécessité, et le tourisme culturel, soutenu par un patrimoine « fort », riche et diversifié, apparaissait dans les années 1990 comme une bouée de sauvetage économique. D’ailleurs, la Vieille Havane et Trinidad ont été classées « patrimoine mondial de l’humanité » par l’UNESCO, et le paysage urbanistique ne doit ainsi pas être oublié.
Les dates d’inscription montrent par ailleurs bien que la crise consécutive à l’effondrement du camp socialiste a induit une redéfinition du patrimoine, en heureux parallèle avec le nouvel intérêt, depuis 199210, de l’UNESCO, pour la patrimonialisation de paysages. En effet, si la préoccupation du gouvernement cubain pour le patrimoine est antérieure à la Période spéciale (la Constitution de 1976 comporte, par exemple, une loi relative à la protection du patrimoine culturel), il faut reconnaître que, depuis les années 1990, la patrimonialisation a acquis une autre signification pour Cuba. On note ainsi que les travaux de restauration entrepris dans les plantations du sud-est de l’Île sont allés de pair, durant la dernière décennie du XXe siècle, avec le développement du musée La Isabelica, institution de Santiago de Cuba en charge de la conservation, préservation et diffusion des connaissances à propos de l’émigration franco-haïtienne à Cuba. Plus près de nous, on peut citer la « maison du planteur » au musée de la plantation de Ti Arriba ou le jardin à San Juan de Escocia. Ces exemples montrent que l’on ne souhaite plus uniquement conserver le passé, du fait d’un effet de mode ou pour attirer les touristes, mais bien également l’expliquer, le comprendre, et le faire partager. Malgré tout, la tentation d’exposer des clichés, plus que de faire découvrir la culture, existe bel et bien :
Les années 1990 furent ainsi celles de l’impulsion donnée aux programmes de sauvegarde et réhabilitation d’édifices historiques à La Havane. En effet, il ne suffisait plus de construire de quoi loger ou divertir les touristes, il fallait provoquer chez ces derniers l’envie de découvrir l’Île et sa culture. Pour ce faire, on a remis au goût du jour des styles architecturaux typiques de l’époque précolombienne. Ces styles, communs à de nombreux pays de la Caraïbe, peuvent tout à la fois rapprocher Cuba de sa zone géographique, et contribuer à gommer une partie de son identité culturelle propre11.
Nous notons donc que les institutions internationales n’œuvrent pas seules à Cuba, bien au contraire. Le gouvernement a en particulier renforcé les lois encadrant la préservation du patrimoine, naturel ou culturel. Nous pouvons en citer quelques-unes, et nous noterons qu’une liste non exhaustive donne déjà le vertige :
À Cuba, le contexte actuel est [spécifique], non seulement du point du vue quantitatif en raison du nombre d’aires protégées constitutives du patrimoine naturel national, mais aussi fondamentalement en raison de la volonté politique que ces aires servent aux objectifs pour lesquels elles ont été créées. Le 23 décembre 1999, fut promulgué par le Conseil d’État de la République de Cuba, le décret-loi n° 201 « Du système national des aires protégées », dans le but de fonder leur régime légal. On y reconnaît que le système national des aires protégées est un chaînon essentiel pour garantir la conservation et l’utilisation durable de la diversité biologique, en relation avec la politique environnementale nationale et les accords internationaux agréés par la République de Cuba […]. Le décret-loi n° 201 définit les aires protégées comme « des parties identifiées du territoire national déclarées telles conformément à la législation en vigueur et incorporées à l’organisation territoriale, d’importance écologique, sociale et historico-culturelle pour la nation et dans certains cas d’importance internationale, spécialement consacrées, par une gestion efficace, à la protection et au maintien de la diversité biologique et des ressources naturelles, historiques et culturelles associées, dans le but d’atteindre des objectifs spécifiques de conservation et d’utilisation durable. Le Système national des aires protégées à Cuba est organisé en 8 catégories qui sont : la réserve naturelle, le parc national, la réserve écologique, l’élément naturel particulier, la réserve florale organisée, le refuge de faune, le paysage naturel protégé, l’aire protégée de ressources administrées. Cuba a 45 aires protégées approuvées par le Comité Exécutif du Conseil des ministres, 9 réserves de biosphère, 7 sites du patrimoine mondial et 6 sites Ramsar12.
Par ailleurs, certains sites cubains sont déclarés monuments nationaux – par exemple le paysage culturel de la Virgen de la Caridad del Cobre –, et l’on observe ici que les autorités révolutionnaires souhaitent conserver et promouvoir l’intégralité de ces paysages, y compris lorsque ceux-ci ne sont pas reconnus par l’UNESCO.
Mais l’Île souhaite bien évidemment participer d’un mouvement international, ce qui confirme l’importance de l’inscription de sites au patrimoine, et dévoile les intérêts diplomatiques, politiques et économiques d’une telle inscription. Par ailleurs, dans leurs discours, les autorités ont mis en exergue les préoccupations universelles de plus en plus fortes quant à la préservation de l’environnement – alors que l’écologie n’est traditionnellement pas une inquiétude première des Cubains –, instaurant dès lors une attention particulière autour des paysages naturels ou non industriels (les paysages culturels pouvant être bâtis dans le respect de l’environnement).
Outre le lien entre patrimonialisation et économie, une autre question surgit : peut-on biaiser l’Histoire par la patrimonialisation, dès lors qu’elle intervient en lien étroit avec la défense d’un système politique? « Chaque peuple possède un patrimoine naturel constitué par des espèces de flore et de faune sylvestres qui, comme éléments du paysage, constituent un symbole de l’orgueil national étroitement associé à son histoire et à sa culture »13. Comment savoir, à Cuba peut-être plus qu’ailleurs, où se situe la frontière entre fierté du peuple et orgueil étatique ? On se demande alors si le gouvernement cherche à mettre en valeur certains paysages, qui représenteraient les étapes historiques dont il estime pouvoir se prévaloir pour asseoir l’organisation politique qu’il symbolise, au détriment d’autres paysages.
La question de l’identité affleure ici, car on se demande ce que (re)donner un sens aux territoires et au patrimoine peut signifier pour ceux qui habitent ce territoire et vivent ce patrimoine.
La Convention Andrés Bello14 établit que le Patrimoine […] n’est pas une addition d’objets tangibles et intangibles, mais un lieu, un territoire commun où s’ancre et s’identifie une communauté pour savoir « ce qu’elle est », pour savoir « ce qu’elle n’est pas »15.
Espace métaphorique, imaginaire, et parfois idéalisé, le patrimoine – et, en son sein, le paysage – n’en reste pas moins un bien commun, une propriété dont ne peut se prévaloir un gouvernement. Ainsi, on peut penser que la patrimonialisation imposée par un État est un danger pour l’identité. En effet, les populations s’approprient leur environnement, ce qui contribue à en faire des peuples ; dès lors, toute modification dans le lien entre le territoire et ses habitants peut avoir de multiples conséquences sur l’identité d’une population.
Le danger de « folkloriser » un paysage, afin de le présenter comme « typique » ou « représentatif » aux touristes, est bien réel. Lorsque le principal but recherché n’est pas la conservation ou restauration du paysage-patrimoine historique, dans le but de conserver des témoignages du passé, le résultat n’est pas un enrichissement culturel ; il peut tout au contraire être négatif, dès lors que l’exposition de ce patrimoine à des agents naturels, l’intervention de l’homme ou l’usage inadéquat qui en est fait peut en réalité le détruire16. Il ne faut pas oublier qu’à Cuba :
[…] aux quatre coins du pays, on a réalisé des projets touristiques liés au patrimoine historique, qui est devenu une importante source financière et une façon de présenter les racines cubaines et le legs de siècles d’histoire17.
Le mélange des genres semble ici périlleux. A titre d’exemple, un restaurant a été construit au beau milieu des anciens baraquements d’esclaves de la plantation de café la Dionisia, afin de recevoir « comme il se doit » des touristes qui s’attendent à trouver dans l’Île des prestations touristiques correspondant aux standards internationaux. Mais les conséquences seront sans doute dramatiques, car « cette construction se trouve tout près d’un mur sans crépi appartenant aux baraquements d’esclaves domestiques, [et son toit y déversera les eaux de pluie], provocant des dommages irréparables […] »18. On est bien loin alors de la sauvegarde du patrimoine, et le paysage se trouvera, à plus ou moins long terme, modifié par la main de l’Homme et les décisions des gouvernements qui auront donné la priorité à des considérations financières.
D’un autre côté, on peut considérer que :
[…] le patrimoine doit être utile et rentabilisé par la communauté, il doit apporter des bénéfices à la qualité de vie, si la communauté ne l’utilise pas, s’il n’est pas vivant, s’il n’est pas intégré à sa vie quotidienne, il sera alors condamné à être manipulé, falsifié, et à long terme à disparaître19.
Pour le dire autrement, le paysage ne doit pas être « muséifié », il doit au contraire constituer un témoignage du passé intégré dans le présent, sans être toutefois endommagé par une modernisation ou une modernité destructrices. En ce sens, la recherche de racines identitaires dans le passé, racines que l’on souhaite lier au présent, montre bien les interrogations de l’Homme quant à l’évolution du monde, et son souci du territoire qu’il léguera lui-même à ses descendants. Le passé et le patrimoine peuvent alors devenir des remparts à la globalisation, si on envisage cette dernière comme un rouleau compresseur, un « lisseur culturel ». Finalement, une histoire à la fois atypique, du fait de la résonnance de sa Révolution, et représentative de l’Histoire latino-américaine, surtout dans ses rapports avec les États-Unis, comme l’est celle de Cuba, implique sans aucun doute une défense ferme du patrimoine face à l’uniformisation (irons-nous jusqu’à dire la coca-colarisation ?) du monde. Partant, le paysage devient un lieu de rencontre pour différents versants d’une même culture cubaine. Effectivement :
[…] la démarche de valorisation patrimoniale et territoriale s’appuie sur les sociétés locales et leurs dynamismes économiques tout en permettant une réappropriation matérielle et symbolique de leurs patrimoines naturel, culturel et immatériel20.
En conséquence, le faible poids de la société civile cubaine peut constituer un écueil sur le long terme ; malgré tout, on voit naître certains groupes de citoyens impliqués dans la patrimonialisation, et notamment dans la restauration des centres historiques de La Havane ou Camagüey.
Ainsi, le gouvernement cubain a rapidement compris que sa politique devait être menée avec l’appui des populations, et a, pour ce faire, développé des programmes afin d’intégrer les habitants et citoyens à la mise en valeur de certains sites. Le tourisme, par la formation de professionnels qualifiés, conscients de leur environnement et du patrimoine qu’ils font visiter – sachant lire le paysage et non seulement le voir –, redevient une chance. Partant, la mise en valeur des paysages culturels industriels peut, dans le même temps, répondre au questionnement identitaire de la population :
Face à l’interrogation sur la façon d’agir sur un paysage culturel industriel, la méthode la plus répandue consiste à le conserver comme référent de l’identité locale, en offrant aux habitants d’une zone déterminée, dans laquelle s’insère ledit paysage, l’opportunité qu’il intègre leur expérience de vie, de manière à ce qu’il puisse être identifié comme propre et reconnu comme partie de leur Histoire. Une solution possible : le développement et la réorientation du tourisme vers les paysages industriels21.
Mais il faut encore que les Cubains soient associés aux projets liés au patrimoine, dès le début, et non à partir de la phase « d’exploitation » dudit patrimoine, car celui-ci est un élément commun, et implique donc, à tous les niveaux, l’ensemble de la communauté qui le reconnaît comme tel. En parallèle, un autre défi s’impose, car on constate que les villes au sein desquelles on a voulu concentrer le tourisme ne sont plus capables d’absorber les flots de touristes en augmentation constante. Une nouvelle mutation s’amorce alors :
Citons quelques-unes des destinations culturelles « en voie de développement » et encouragées par le gouvernement cubain afin de rééquilibrer la répartition des visiteurs et de faire face – à terme, mais cela paraît peu probable… – à la concentration touristique qui affecte aujourd’hui les enclaves balnéaires, en particulier les îlots, mais aussi la bande de terre sacrifiée au tourisme international Varadero et dans une moindre mesure La Havane […] : Pinar del Río (avec la vallée de Viñales), Santiago de Cuba (le cœur historique, la plage de Siboney, le parc de Baconoa), Cienfuegos, etc., sans oublier les deux sites inscrits sur la liste du Patrimoine de l’Humanité par l’Unesco (Trinidad, et la Vieille Havane)22.
Si le paysage s’inscrit à la fois dans l’Histoire passée, présente, et à venir, il s’inscrit donc dans une histoire en mouvement et sans doute en construction. En ce sens, les autorités nationales ont un rôle primordial, puisqu’elles contribuent à mettre en relief certains pans de l’Histoire de la Nation, au détriment d’autres étapes et périodes. Ainsi, la réinscription des Noirs dans l’histoire cubaine, par le biais de la patrimonialisation d’espaces liés à l’esclavage, s’est faite en lien avec l’identité révolutionnaire. Dès lors, paysages et nature s’entremêlent parfois, pour inscrire la Révolution dans un continuum temporel :
Glissant évoque […] sa relation à Fidel Castro : « J’ai toujours été frappé du fait que, quand Fidel Castro a voulu rentrer à Cuba avec les futurs barbudos, alors qu’il aurait pu se cacher, se perdre dans La Havane, une ville d’un million et plus d’habitants, il a solennellement annoncé qu’il allait monter dans la Sierra Maestra, où seule la nature préservée pouvait le protéger. C’était là une forme de marronnage, culturellement une décision de vivre le paysage à la manière des anciens nègres marrons. Cette liaison au paysage fait la liaison à l’histoire23.
La valorisation de certains sites contribue donc à valoriser la Révolution – et nous n’évoquons même pas ici les paysages urbains saturés de messages que d’aucuns qualifieraient de propagande, de portraits et sculptures des « héros glorieux » de la Révolution, que le cubain lambda doit prendre en exemple s’il veut avoir une chance d’être considéré comme un bon révolutionnaire, et entrer ainsi dans la communauté cubaine telle que présentée par les autorités…. Conserver le paysage historique, culturel, archéologique, c’est, dans une certaine mesure, conserver la Révolution. La différence ténue entre identité cubaine et identité révolutionnaire, puisque les deux se confondent dans les discours officiels, pose alors question. La Révolution a imposé de nouvelles « valeurs » culturelles, et a donc nécessairement influé sur la sélection et hiérarchisation du paysage-patrimoine à sauvegarder en priorité. Néanmoins, l’une des bases de l’identité cubaine actuelle nous semble résider dans le concept de transculturation tel qu’énoncé par Ortiz ; pour le dire autrement, l’identité cubaine se recrée perpétuellement, et se nourrit de ses rencontres avec « l’Autre ». Il faut alors chercher à savoir comment le paysage devient un trait d’union entre Cuba et ses voisins.
Les premières inscriptions de sites sur la liste du patrimoine mondial ont montré de grandes disparités et inégalités entre pays « développés » et pays « en voie de développement » :
Les sites inscrits en tant que paysages culturels se situent à 60 % en Europe. Les caractéristiques de ces sites sont diverses : routes, chemins de pèlerinages, vallées culturelles et agricoles, paysages agricoles spécifiques (rizières, terrasses, paysages viticoles...), lieux sacrés (montagnes, forêts...), jardins ou même paysages industriels. Ces sites combinent le plus souvent paysages ruraux et urbains et sont pour certains très étendus (Vallée de la Loire en France)24.
Malgré tout, l’espace caribéen ne saurait être oublié, même si les pays de la Caraïbe paraissent offrir la même image d’Épinal : une infinité d’espaces qui sont autant de paysages de cartes postales, typiques du tourisme de masse balnéaire, dont on ne retient que le soleil et la plage. La « tropicalité » et ses apparents corollaires, tels l’ambiance festive et la jovialité supposée des populations, permettent donc, dans une certaine mesure, de « vendre du rêve » aux touristes étrangers. Cette représentation de la Caraïbe, vision occidentale qui a converti certains éléments identitaires ou naturels en clichés, efface sans aucun doute d’autres aspects culturels plus profonds, mais donne, en tous les cas, à voir la zone comme un espace assez homogène, comme un ensemble constitué de paysages similaires baignés de soleil toute l’année, ce qui n’est bien évidemment pas le cas25. Cette image fait oublier qu’il existe un lien entre le paysage et l’homme (comme le précisent de nombreux documents de l’UNESCO relatifs aux paysages culturels26), qui a dû « dompter » les espaces pour se les approprier. En outre, et nous insistons, le paysage culturel ne l’est que parce que les peuples le ressentent ainsi :
El patrimonio cultural es inicialmente pasivo, existe como objeto, independiente del reconocimiento o no de su valor cultural, y es la comunidad la que, en un momento determinado de su desarrollo, lo selecciona, lo escoge como elemento que debe ser conservado, por valores que trascienden su uso o función primitiva. Es sólo en este acto que queda definido como bien cultural27.
D’un autre côté, un type de tourisme très en vogue actuellement, et qui permet à la Caraïbe de développer des projets communs, est l’écotourisme. Celui-ci :
[…] ne saurait se développer par la juxtaposition d’éléments disparates, isolés, surnageant dans un environnement qui leur est devenu complètement étranger. Rappelons pour mémoire que lorsque l’UNESCO fait appliquer sa convention sur le patrimoine mondial, l’un de ses critères est la cohérence entre une architecture et un paysage qui en est le doublon privilégié, tous deux issus du long travail de l’homme (« On parle toujours de beautés naturelles. C’est une erreur » remarquait P. Francastel, « les beaux paysages sont des paysages construits »). Ainsi […] la vallée de los Ingenios28 […] a été l’objet d’un classement en 1988, qui rend justice à la remarquable préservation des lieux29.
Lien entre la nature et l’homme qui, s’il prend des formes différentes à travers le continent du fait de la diversité des climats et des reliefs, unit donc, malgré tout : c’est l’effort de toutes les populations latino-américaines que l’on met ici en exergue. Lien « pratique » également, qui nécessite l’emploi de différentes techniques et ressources, mais qui n’est pas dénué, dans de nombreux cas, d’un lien spirituel (que les habitants voient dans certains espaces un lieu sacré, ou dans certains paysages la manifestation d’esprits).
Le site officiel de l’UNESCO présente ainsi le site archéologique des premières plantations de café du sud-est de Cuba :
Les vestiges des plantations de café du XIXe siècle, au pied de la Sierra Maestra, constituent un témoignage unique d'une forme novatrice d'agriculture en terrain difficile. Ils éclairent l'histoire économique, sociale et technologique de la région Caraïbes-Amérique latine30.
C’est une relation forte qui est établie ici entre Cuba, la Caraïbe et l’entièreté de l’Amérique Latine. Il semble même que le patrimoine cubain se pose en exemple et en témoin de l’histoire coloniale latino-américaine. Bien évidemment, cela induit de multiples questions, car si le patrimoine de l’Île peut effectivement être considéré comme un reflet fidèle d’un morceau de l’Histoire partagée, ce sont de multiples histoires qui ont fait l’Histoire latino-américaine. Le site précédemment cité précise d’ailleurs plus loin que « la production caféière dans l'est de Cuba au XIXe et au début du XXe siècle a créé un paysage culturel unique ». Malgré tout, le lien que constituent l’esclavage et la plantation, leur impact sur le paysage et sur l’identité, dépasse les histoires singulières, et les spécificités n’empêchent pas l’éclosion d’un sentiment non d’unicité mais bien d’unité dans la région.
Le paysage, « à l’état brut » ou travaillé par l’homme, reflète donc une identité nationale, mais aussi, dans une certaine mesure, une identité régionale qui dépasse les frontières géographiques et politiques. Il représente la culture et l’identité, patrimoine de l’Homme, avant de représenter une culture et une identité locales, régionales, spécifiques, comme dans le cas des espaces historiques de l’esclavage. On peut de la sorte dire que les plantations du sud-est de Cuba, en plus de symboliser le choc et la rencontre de la culture du maître et de l’esclave, sont reconnues comme « plantations franco-haïtiennes du XIXe siècle ». Ainsi, ce paysage qui transcende l’espace cubain, pour s’inscrire dans une histoire régionale mais également mondiale, fait de la traite des Noirs et de l’esclavage un trait d’union entre les pays caribéens et, dans une certaine mesure, entre ces pays et le continent américain.
On peut encore mentionner que l’Organisation Mondiale du Tourisme et l’UNESCO ont impulsé conjointement un projet portant sur « la route des esclaves qui s’inscrit dans une problématique du développement d’un tourisme culturel dans la région »31. Le port de Santiago de Cuba a ainsi été mis en valeur, au sein d’un plan touchant la Caraïbe et permettant à l’Île de s’ouvrir sur la région caribéenne. En tous les cas, le cheminement proposé entre différentes îles, et dont le thème central touche de près l’Histoire des pays du bassin caribéen, constitue un trait d’union entre ces derniers. Plus largement, préserver la Vieille Havane, c’est-à-dire l’héritage architectural colonial, n’induit-il pas un rapprochement avec la Caraïbe, elle aussi victime de la colonisation ?
Quoi qu’il en soit, la conservation des paysages historiques, et particulièrement des paysages culturels et archéologiques, est un défi qui doit être envisagé globalement, à un niveau supranational. Elle s’impose ainsi comme le témoignage d’une évolution technologique, politique et économique, et d’une modernité respectueuse des traditions, qui engagerait les États et les populations et permettrait d’unir la région caribéenne, qui se perçoit elle-même comme balkanisée. A un degré différent de l’Europe – puisque le patrimoine ne vient pas conforter une citoyenneté caribéenne –, il s’agit pour la Caraïbe de construire ou conforter une identité régionale encore difficilement définissable, au sein d’une aire qui s’est construite vers l’extérieur et le plus souvent dans la méconnaissance des cultures voisines.
Pour conclure, notons que les efforts du gouvernement cubain et l’implication d’organisations internationales de poids telles que l’UNESCO ont permis de montrer au monde une autre Cuba, en proie certes à des difficultés économiques, mais toujours en quête d’une identité cubaine non excluante, car liée très directement à son environnement immédiat et à son sous-continent. Ainsi, l’effondrement du bloc socialiste, et la crise globale qui s’ensuivit, ne sont pas venu à bout de la volonté cubaine de définition – du Soi, de l’Autre, et de la relation de Cuba au monde.
Mais dans l’Île, peut-être plus qu’ailleurs, les difficultés économiques ont imposé la patrimonialisation plus qu’elles ne l’ont impulsé. Partant, et particulièrement pour l’œil occidental, tout ce qui est mis en œuvre par le gouvernement cubain est suspect, et montre avant tout une volonté d’attirer le touriste. On ne saurait cependant nier à la Révolution cubaine son attachement à la préservation d’une culture cubaine, perpétuellement en dialogue avec les autres cultures, au niveau régional mais aussi mondial.
Ainsi, et même si sur ce point également, on peut taxer le gouvernement cubain d’opportunisme, le paysage est devenu un trait d’union avec l’espace caribéen et plus largement latino-américain. Pour Cuba, qui a souvent été isolé de la communauté latino-américaine, il s’agit d’une opportunité unique de partager une expérience solide, dans le domaine de la conservation du patrimoine, et d’ouvrir la porte à bien d’autres relations.
Finalement, le paysage, comme élément du patrimoine et de l’identité, a une résonnance particulière dans l’Île :
L’expression « patrimoine paysager » peut soit faire référence à l’identité culturelle vécue comme repli identitaire, soit évoquer l’identité culturelle affirmée comme appartenance territoriale et lien social. Reste que la notion de « patrimoine paysager » pèse lourdement dans les prises de décisions. C’est par le paysage que se construit la relation du patrimoine commun au territoire. Tout paysage est, on le sait, culturel dans la mesure où les hommes inscrivent leurs préoccupations (alimentaires, économiques, religieuses, esthétiques, sociales) dans le cadre du territoire vécu32.
Le patrimoine paysage peut alors devenir une charnière de la connaissance culturelle, dans un espace cloisonné, multiculturel, et qui cherche à (re)découvrir ses racines communes. De l’ajiaco cubain naîtront peut-être de nouvelles saveurs caribéennes ?
[1] Il n’est que de citer la Vieille Havane ou les plantations de café de l’est de l’Île.
[2] Élodie SALIN, « Les paysages culturels entre tourisme, valorisation patrimoniale et émergence de nouveaux territoires », Cahiers des Amériques Latines, 1-2 (54-55), 2007, p. 121-136. https://halshs.archives-ouvertes.fr/halshs-00476948/, p. 2, consulté le 05 janvier 2016.
[3] Ibid.
[4] Frank MICHEL, Voyage au bout du sexe : trafics et tourisme sexuels en Asie et ailleurs, Sainte-Foix, Les Presses de l’Université de Laval, 2006, p. 162.
[5] Anne-Lisa PIETRI-LEVY, L'objet dénaturé, Toulouse, Presses Universitaires du Mirail, 1991, p. 408.
[6] Pierre DONADIEU et Michel PÉRIGORD, Clés pour le paysage, Paris, Ophrys, 2005, p. 257.
[7] Les bénéfices du Bureau de l’Historien de La Havane sont répartis comme suit : 20% vont à l’État, 45% sont réinvestis dans les infrastructures touristiques et le patrimoine, et 35% vont à des entreprises communautaires, telles que des librairies, cliniques, centres sportifs…
[8] Janice ARGAILLOT, « L’architecture havanaise depuis le début de la Période spéciale : symbole d’un processus et d’une quête identitaires », Urbanités, 2, Villes en crise, Crises en ville, novembre 2013, http://www.revue-urbanites.fr/larchitecture-havanaise-depuis-le-debut-de-la-periode-speciale-symbole-dun-processus-et-dune-quete-identitaires/, p. 6.
[9] Miguel Ángel GÓMEZ BORJA, Gregorio LÓPEZ SANZ, Silvia VILTE, « Los modelos de gestión en ciudades patrimonio de la humanidad: un estudio comparativo entre España y el norte de Argentina », in Guido FERRARI, José María MONTERO LORENZO, José MONDEJAR JIMÉNEZ et Manuel VARGAS VARGAS (coord.), Investigaciones, métodos y análisis del turismo, Oviedo, Septem Ediciones, 2014, p. 173-184, p. 178. Notre traduction.
[10] Date à laquelle les paysages sont ajoutés à la liste des monuments constitutifs du patrimoine mondial, dans le but de ne pas exclure de ladite liste les cultures ne s’appuyant pas principalement sur un patrimoine bâti.
[11] Janice ARGAILLOT, op. cit., p. 5.
[12] Marlena CASTELLANOS CASTRO, Leonel CARABALLA MAQUEIRA et Mayra M. ESPINOSA VALDÉS, « Droit de l’environnement, patrimoine et développement durable. Un regard cubain sur le tourisme alternatif », in Jean-Marie BRETON (dir.), Patrimoine, tourisme, environnement et développement durable : Europe, Caraïbe, Amériques, Maghreb, Proche-Orient, Asie, Océanie, Paris, Karthala, 2010, p. 161-176, p. 164.
[13] M. CASTELLANOS CASTRO, L. CARABALLA MAQUEIRA et M. M. ESPINOSA VALDÉS, op. cit., p. 162.
[14] D’après son site internet : « La Organización del Convenio Andrés Bello de integración Educativa, Científica, Tecnológica y Cultural, es un organismo con personería jurídica internacional, intergubernamental, creado en virtud del Tratado suscrito en Bogotá, el 31 de enero de 1970, sustituido en Madrid en 1990. El Convenio Andrés Bello como organización internacional de carácter intergubernamental, favorece el fortalecimiento de los procesos de integración y la configuración y desarrollo de un espacio cultural común. Busca generar consensos y cursos de acción en cultura, educación, ciencia y tecnología, con el propósito de que sus beneficios contribuyan a un desarrollo equitativo, sostenible y democrático de los países miembros”.
[15] M. CASTELLANOS CASTRO, L. CARABALLA MAQUEIRA et M. M. ESPINOSA VALDÉS, op. cit., p. 171.
[16] Odlanyer HERNÁNDEZ DE LARA, De esclavos e inmigrantes. Arqueología histórica en una plantación cafetalera cubana, Buenos Aires, Centro de Investigaciones Precolombinas, Instituto Superior del Profesorado Dr. Joaquín V. González, 2010, p. 137-138.
[17] Ibid., p. 137-138.
[18] Op. cit., p. 143.
[19] M. CASTELLANOS CASTRO, L. CARABALLA MAQUEIRA et M. M. ESPINOSA VALDÉS, op. cit., p. 171.
[20] É. SALIN, art. cit, p. 2.
[21] Lisette ROURA ÁLVAREZ, « Patrimonio industrial y arqueología: acercamiento a sus relaciones en Cuba », in Mariano RAMOS et Odlanyer HERNÁNDEZ DE LARA (éd.), Arqueología histórica en América Latina: perspectivas desde Argentina y Cuba, Buenos Aires, Universidad Nacional de Luján, 2011, p. 171-186, p. 173.
[22] Frank MICHEL, « Le tourisme international : une bouée de sauvetage pour Cuba ? », in Frank MICHEL (dir.), Tourismes, touristes, sociétés, Paris, L’Harmattan, 1998, p. 251-287, p. 266.
[23] Aliocha WALD LASOWSKI, Édouard Glissant, penseur des archipels, Paris, Univers Poche, 2015, s. p.
[24] É. SALIN, art. cit., p. 4-5.
[25] Janice ARGAILLOT, « Nouveaux tourismes caribéens : expériences et conséquences », Études caribéennes [En ligne], 31-32, Août-Décembre 2015, mis en ligne le 20 novembre 2015, consulté le 27 janvier 2016, URL : http://journals.openedition.org/etudescaribeennes/7599, DOI : 10.4000/etudescaribeennes.7599.
[26] Voir par exemple Operational guidelines for the implementation of the World Heritage Convention. Centro del Patrimonio Mundial, 1999.
[27] Marta ARJONA, « Patrimonio Cultura e identidad », La Havane, Editorial Letras Cubana, 1986, p. 13.
[28] Toujours dans l’est de Cuba.
[29] Danielle BÉGOT, « Écotourisme et valorisation du patrimoine historique et culturel », in Jean-Marie BRETON (dir.), L’écotourisme : un nouveau défi pour la Caraïbe, Paris, Karthala, 2001, p. 93-101, p. 101.
[30] http://whc.unesco.org/fr/list/1008 [consulté le 21 janvier 2016]
[31] Joël RABOTEUR, « Impact économique de la culture dans le développement touristique », in Paul ROSELE CHIM et Joël RABOTEUR (dir.), Le développement du tourisme de santé de remise en forme et de bien être : opportunités et potentialités de développement local, le territoire du nord et l’Est Grande-terre en Guadeloupe, Paris, Publibook, 2009, p. 65-72, p. 68.
[32] P. DONADIEU et M. PÉRIGORD, op. cit., p. 104.
Résumé
Le gouvernement cubain, malgré les difficultés économiques que l’on connaît, a fait de la restauration et de la sauvegarde du patrimoine un élément fort de sa politique. Ce travail se propose d’analyser la place particulière des paysages culturels et archéologiques dans la « patrimonialisation » que les autorités de l’Île semblent ardemment désirer. De la sorte, il interroge la mise en valeur de certains sites et l’exploitation qui en est faite, notamment dans le cadre de l’ouverture du pays au tourisme. La question centrale est donc celle de l’identité et de la culture, et de leur sauvegarde ou, au contraire, de leur perte dans le cadre d’une patrimonialisation qui ne respecterait pas les populations autochtones.
Resumen
A pesar de unas dificultades económicas bien conocidas, el gobierno cubano hizo de la restauración y preservación del patrimonio un fundamento de su política. Este trabajo propone un análisis del lugar particular que ocupan los paisajes culturales y arqueológicos en esa «patrimonalización» que parecen desear ardientemente las autoridades de la Isla. Se interroga en particular sobre la valoración y explotación de algunos sitios en el marco de la apertura del país al turismo. El tema central del estudio es pues la preservación de la identidad y de la cultura o, al contrario, su pérdida, en el marco de una patrimonialización que no respetara a los pueblos autóctonos.
Crise et réinvestissement des territoires
Paysages, identité et Révolution
Des paysages cubains pour une identité latino-américaine ?
Conclusion(s)
Janice ARGAILLOT
ARGAILLOT, Janice, « L’architecture havanaise depuis le début de la Période spéciale : symbole d’un processus et d’une quête identitaires », Urbanités, 2, Villes en crise, Crises en ville, novembre 2013, http://www.revue-urbanites.fr/larchitecture-havanaise-depuis-le-debut-de-la-periode-speciale-symbole-dun-processus-et-dune-quete-identitaires/.
—, « Nouveaux tourismes caribéens : expériences et conséquences », Études caribéennes, 31-32, Août-Décembre 2015, URL : http://journals.openedition.org/etudescaribeennes/7599.
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